Les collectivités locales sous la menace d'une dégradation de leur notation ?

Une nouvelle et forte baisse des dotations de l'Etat aux collectivités locales pourrait conduire Standard & Poor's à réviser à la baisse leur notation.
Mathias Thépot
Les collectivités sont en grande partie responsables de la baisse du déficit public.

En 2015, la baisse du déficit public français à 3,5 % du PIB fut en grande partie liée aux efforts budgétaires des collectivités locales. Concrètement, celles-ci auraient contribué pour moitié à l'amélioration du déficit l'année dernière. Assez pour que Bercy se félicite de sa capacité à respecter les exigences budgétaires de Bruxelles. Mais pour arriver à un tel objectif, les collectivités locales se sont imposées une cure de rigueur, certes fortement impulsée par l'Etat qui a asséché leurs ressources propres: sur la période 2014-2017 la dotation globale de fonctionnement allouée aux collectivités a été réduite de 11,5 milliards d'euros, affectant leur autofinancement, et contraignant leurs projets d'investissements.

Hausse des transactions immobilières

Standard & Poor's (S&P) se félicite pourtant des résultats budgétaires 2015 « meilleurs qu'attendu » des collectivités locales. Car l'agence de notation prédisait que le solde des comptes 2015 des collectivités locales après investissements serait négatif de 4,4 milliards d'euros. Or, ce solde a finalement atteint l'équilibre ! Deux raisons à cela. D'abord une hausse - inattendue par l'agence - des transactions immobilières en 2015 qui ont fait exploser les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements et les communes de 16% par rapport à 2014 à 11,7 milliards d'euros, en hausse. Autrement dit, c'est 800 millions d'euros de plus que ce que S&P prévoyait.

Investissement à la baisse

Mais c'est donc principalement l'investissement qui a été rogné par les collectivités. une situation préoccupante. L'investissement public local représente en effet 70 % de l'investissement public civil. Et en cette période où moult secteurs ont besoin d'être soutenus par la puissance publique, notamment celui du bâtiment et des travaux publics, et où les croissances française et européenne sont en manque criant d'investissements, il semble que l'Etat français se tire une balle dans le pied en tentant coûte que coûte de respecter ses engagements budgétaires.

Plus concrètement, les collectivités locales ont réduit leurs dépenses d'investissements de 8 %, qui atteignent ainsi leur plus bas niveau depuis 2005, en dessous de la barre 50 milliards d'euros. Et ce, alors même que les collectivités ont en parallèle réalisé des efforts significatifs dans leurs dépenses de fonctionnement - qui augmentent d'à pleine plus d'1 % par an désormais. Autrement dit, elles ont réalisé ce que leur demandait Bercy : faire des économies.

Les dangers d'une nouvelle baisse de la dotation

Même les départements arrivent globalement à compenser dans leurs comptes la hausse des dépenses sociales liée notamment au revenu de solidarité active (RSA) par un travail sur leurs coûts. Bref, la manœuvre de la baisse des dotations de l'Etat aura donc été efficace pour tempérer le train de vie des collectivités locales. Dont acte. Reste qu'elle aura eu comme effet délétère de réduire la voilure sur l'investissement, introduisant beaucoup d'incertitude chez les élus. D'ailleurs, la question qui se pose désormais est de savoir si les collectivités locales vont poursuivre la baisse de leurs investissements après 2017.

Cela dépendra notamment d'une éventuelle baisse des dépenses de soutien de l'Etat . Mais Standard & Poor's avertit : « en cas de nouvelle réduction importante des dotations de l'Etat non accompagnée de mesures compensatoires, nous pourrions être amenés à revoir négativement notre appréciation du cadre institutionnel et financier des collectivités locales françaises, qui constitue aujourd'hui une force en terme de notation financière. ». Or les candidats de droite prévoient, par exemple, tous de tailler dans les dotations aux collectivités locales.

Fin de la reprise immobilière ?

La situation risque d'être difficile, d'autant qu'il n'est par ailleurs pas certain que les DMTO se maintiennent à un niveau élevé. La reprise du marché immobilier résidentiel pourrait en effet s'affaisser dans les prochaines années. Les transactions immobilières sont en effet tirées vers le haut par le niveau historiquement bas des taux d'intérêt nominaux de crédits immobiliers. or ceux-là pourraient remonter à terme et limiter l'engouement actuel.

Bref, il existe un risque réel que la santé financière des collectivités locales soit atteinte et donc qu'elles freinent une nouvelle fois leurs investissements. Or, pour S&P,  « une nouvelle réduction des dépenses d'investissement des collectivités locales françaises pourrait avoir un impact négatif sur l'état des infrastructures et du patrimoine des collectivités locales, sur la reprise économique nationale et sur la dynamique de certaines bases fiscales, en ce qui concernent notamment la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ». Un constat qui peut, du reste, déjà s'appliquer à la situation actuelle de l'économie française.

Mathias Thépot
Commentaires 6
à écrit le 05/10/2016 à 9:30
Signaler
L'avis de Standard & Poor's nous apporte quoi ? Quelle légitimité ? Depuis 2008 comment peut on donner autant d'importance à ces sociétés financières qui ne font que se tromper ? On s'en tape hein, merci.

à écrit le 05/10/2016 à 7:32
Signaler
Les agences de notation ne tiennent pas compte de la situation réelle des comptes des collectivités territoriales françaises qui sont bien meilleurs que leur propres prédictions et donc malgré un retour à l'équilibre, ils dégradent quand même leurs n...

à écrit le 05/10/2016 à 3:02
Signaler
D'apres bercy,(petit b, ca vaut pas +), on devrait encore pouvoir presser davantage le citron. Les francais ont du patrimoine, on va taper dedans.

à écrit le 04/10/2016 à 19:33
Signaler
Coucou me revoilou....il y avait longtemps qu'ils n'avaient rien dégradé les S&P.....cela nous manquait.....

à écrit le 04/10/2016 à 19:21
Signaler
mince alors! plus de ronds points a gogo? plus de recrutement pour des postes territoriaux qui servent a rien? fin des comcoms doublons et autres commissions theodules locales? quelle tristesse! si on ne peut plus jeter l'argent des autres par la ...

le 05/10/2016 à 8:27
Signaler
C'est toujours "amusant" de voir les médias confondre "investissements" et "dépenses". pour moi, "investissements" signifie engager des moyens pour gagner de l'argent..."dépenses", engager des moyens pour gagner du confort.. Il est urgent de faire le...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.