Loi El Khomri : la CGPME maintient la pression

La Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) prévoit de ne pas signer le prochain accord sur l'assurance-chômage actuellement en cours de négociation si la loi portée par la ministre du Travail n'est pas profondément revue.
Fabien Piliu
"On ne peut pas s'essuyer les pieds sur trois millions de chefs d'entreprises", a déclaré, furieux, François Asselin, le président de la CGPME.

La tension monte. Après l'ultimatum lancé mardi par le Medef au gouvernement, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) maintient la pression. Son président, François Asselin, au lendemain d'un comité exécutif, a annoncé ce mercredi que son organisation ne signerait pas le prochain accord sur l'assurance-chômage actuellement en cours de négociation si la loi réformant le droit du travail portée par Myriam El Khomri la ministre du Travail n'est pas profondément revue.

Mardi, lors de sa conférence de presse mensuelle, Pierre Gattaz, le président du Medef a menacé de demander la suspension des négociations sur la nouvelle convention de l'assurance-chômage , si le gouvernement ne corrige pas profondément le texte El Khomri d'ici à "trois semaines ", c'est-à-dire d'ici le 3 mai, date du début de l'examen du texte à l'Assemblée nationale.

Ce à quoi réagissait , ce mercredi sur France Info, le Premier ministre Manuel Valls:

"Je regrette cette méthode qui consiste à poser des ultimatums, à prendre en otage la négociation de l'assurance chômage (...), c'est, je crois honnêtement, ne pas être à la hauteur de la responsabilité en tant que partenaire social. Il faut respecter le Parlement qui aujourd'hui s'est saisi de cette loi, qui l'enrichit, l'amende et est à l'écoute de l'ensemble des partenaires sociaux."

Deux options sur la table

Un front patronal uni est-il en train de se former ? Mardi prochain, les organisations patronales se réuniront pour décider des suites de leurs actions, avant la prochaine journée de négociation prévue le 28 avril. Si tout ou partie du patronat déserte, quelle peut être l'issue des négociations en cours à l'Unedic ? Deux options sont envisageables. Soit la convention actuelle est prolongée, soit le gouvernement reprend la main dans le dossier et décide, à la place des partenaires sociaux, des conditions de la prochaines convention d'assurance-chômage.

Que demande la CGPME ? Le retrait pur et simple de l'amendement instituant une surtaxation des CDD que le gouvernement veut faire passer. Cette mesure fait hurler le patronat. Pour plusieurs raisons : selon plusieurs études d'impact, la taxation des contrats courts n'a pas permis d'augmenter la part des CDI, 80% des embauches étant toujours des CDD ; c'est au patronat, dans le cadre des négociations de la prochaine convention d'assurance chômage de déterminer les modalités de cette surtaxation et notamment son taux.

Il s'insurge également contre la mise en place du compte pénibilité (C3P) qui entrera en vigueur le 1er juillet, intégré au compte personnel d'activité qui verra le jour en 2017. « La prise en compte des risques chimiques ainsi que des geste et postures à risques est techniquement impossible », estime François Asselin.

L'emploi, la priorité

" Avec cette nouvelle modification du texte, il ne reste plus rien du projet initial qui devait libérer les énergies et permettre de faire reculer le nombre de demandeurs d'emplois ", se désole François Asselin, pour qui l'amendement-clé du rapporteur du texte Christophe Sirugue sur les critères des licenciements économiques, différencié selon la taille des entreprises, n'est pas une consolation suffisante. Cet amendement prévoit qu'un licenciement économique pourra avoir lieu seulement dans le cas d'une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires, en comparaison avec la même période de l'année précédente. Il faudra que cette baisse soit au moins égale à un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés, deux trimestres consécutifs pour une société de onze à moins de cinquante salariés, trois trimestres consécutifs pour une entreprise de cinquante à moins de trois cents salariés, et quatre trimestres consécutifs pour une société d'au moins trois cents salariés.

Des cadeaux pour tout le monde

" Ces dernières semaines, le gouvernement a fait des cadeaux à tout le monde, sauf aux chefs d'entreprises. C'est à se demander si la lutte contre le chômage est sa priorité. On ne peut pas s'essuyer les pieds sur trois millions de chefs d'entreprises, simplement pour faire plaisir à quelques milliers d'étudiants qui n'ont pas compris que ce texte devait initialement leur assurer un avenir meilleur. En surtaxant les CDD, on renchérit le coût de la première embauche, c'est absurde ! ", a poursuivi François Asselin.

En creux, à la Confédération, on regrette que le patronat ait raté sa stratégie de communication dans ce dossier, en ne présentant pas un front uni dès la présentation du projet de texte. " Même dans la version initiale, il y a avait des points à améliorer. Ce fut une erreur d'applaudir des deux mains lorsque le texte a été dévoilé. En procédant ainsi, le patronat a donné l'impression que ce texte était le sien, braquant les syndicats des salariés et une partie des étudiants ", explique François Asselin.

Fabien Piliu
Commentaires 5
à écrit le 14/05/2016 à 7:50
Signaler
Pourquoi la loi el khomri ne marchera pas.. Objectif: légère baisse du cout du travail visée. Pas le bon moment: ca va encore faire baisser la fragile demande. Ca va mettre un souk pas possible avec tous les accords d'entreprise qui prévalent désorm...

à écrit le 21/04/2016 à 8:52
Signaler
La surtaxation des CDD est absurde. Ce qui n'est pas absurde par contre c'est de faire comprendre qu'il doit y avoir un écart de coût significatif entre une modalité d'achat de travail non flexible (CDI) et les modalités d'achat de travail flexible (...

à écrit le 20/04/2016 à 21:57
Signaler
Un patronat intelligent aurait essayé de faire de la pédagogie en expliquant la nécessité de la réforme du travail. Ils auraient pu essayer d'argumenter, de présenter leurs contraintes dans les médias. Au lieu de ça, ils choisissent direct d'aller...

à écrit le 20/04/2016 à 21:48
Signaler
Pour une fois qu'un gouvernement était prêt à passer une réforme un tant soit peu impopulaire, le patronat n'avait qu'à se taire, se faire discret, et à récolter le peu qui en ressortirait. Au lieu de ça, ils ont choisi de l'ouvrir et de faire du ch...

à écrit le 20/04/2016 à 14:54
Signaler
Encore une fois, c'est au final le salarié ou le chômeur qui risquent de se trouver "otage" de ces pantomimes. Quand ceux qui font partie du système et le maîtrisent, le contrôlent afin d'en tirer un maximum de profits, ce sont les autres qui paient ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.