La température monte dans le chaudron de l'Assemblée nationale. En pleine canicule, les députés ont commencé à débattre ce lundi du très attendu projet de loi sur le pouvoir d'achat destiné à amortir le choc de l'inflation sur le porte-monnaie des Français. Faute de majorité absolue, les 250 élus LREM (rebaptisés Renaissance), MoDem et Horizons sont contraints de trouver des terrains d'entente avec les oppositions. Ce qui a déjà donné lieu à d'âpres batailles lors de la première journée de débats entre la majorité et les membres de l'opposition. Résultat, le calendrier parlementaire pourrait être amplement chamboulé d'ici la fin du mois de juillet.
Dans ce contexte brûlant, le gouvernement veut mettre l'accent sur les mesures destinées aux indépendants. « Nous avons prévu une baisse de cotisation pour les indépendants. Ce qui devrait permettre un gain de 550 euros par an », a rappelé la ministre déléguée aux PME, au commerce, au tourisme et à l'artisanat, Olivia Grégoire lors d'un point presse ce mardi 19 juillet.
Bercy espère par ce coup de pouce redonner le moral à ces entrepreneurs devant faire face à l'explosion des prix dans tous les domaines. L'Insee table désormais sur une inflation à 5,5% sur l'ensemble de l'année et les effets de la guerre en Ukraine pourrait encore amplifier ce phénomène. Une coupure du gaz russe en Europe aurait des conséquences particulièrement délétères sur l'économie du Vieux continent et l'indice des prix à la consommation.
2,2 millions d'indépendants et 1,1 million d'auto-entrepreneurs visés
Chauffeurs de taxis, infirmiers, agriculteurs...la catégorie des indépendants regroupe une myriade de professions et de statuts. Lors de la présentation du projet de loi il y a quelques jours, le gouvernement a annoncé que deux millions d'indépendants pourraient potentiellement bénéficier de cette baisse de cotisation. Elle doit concerner les personnes dont le revenu est proche du SMIC. Il faut également ajouter 1,1 million d'auto-entrepreneurs selon l'étude d'impact du texte de loi. Cette mesure représente, selon des calculs de l'exécutif, une dépense fiscale d'environ 500 millions d'euros chaque année.
Cette baisse de cotisation que le gouvernement veut pérenniser vient s'ajouter au plan en faveur des indépendants présenté en grande pompe par Emmanuel Macron en septembre dernier devant l'U2P, l'un des principaux lobby patronal en France. À l'époque, le chef de l'Etat était venu dévoiler un arsenal d'une vingtaine de mesures en faveur de ces travailleurs.
L'une des principales mesures concernait la protection du patrimoine. En cas de défaillance, la justice pouvait auparavant saisir l'ensemble du patrimoine. « Ce qui change est que le patrimoine personnel ne pourra plus être saisi comme les voitures par exemple », avait expliqué l'Elysée. Parmi les autres mesures importantes, figure une baisse de la fiscalité au moment de la transmission du patrimoine.
Un impact macroéconomique flou
Dans l'étude d'impact annexé au projet de loi, le gouvernement n'a apporté aucun chiffrage précis sur les répercussions macroéconomiques de cette mesure en termes d'activité ou de consommation. Interrogé par La Tribune, l'Insee estime que l'impact de cette mesure sur le revenu des indépendants serait relativement «marginal» sur l'ensemble de l'année.
En revanche, les auteurs de l'étude d'impact considèrent que « cette mesure bénéficierait ainsi à 83% des artisans, commerçants et professionnels libéraux non-réglementés, 47% des professionnels libéraux et 79% des exploitants agricoles ». Au final, cette baisse pérenne de cotisation ne devrait pas compenser les effets néfastes de l'inflation sur le pouvoir d'achat des indépendants.
Les indépendants, une population en première ligne face à l'inflation
Les travailleurs indépendants sont en première ligne face à la flambée des prix. En effet, une grande partie de ces travailleurs ont des revenus biens inférieurs au SMIC. Dans l'exposé des motifs du texte de loi, l'exécutif souligne que « pour près d'un quart des travailleurs indépendants non agricoles (22 %), comme pour plus d'un tiers des travailleurs indépendant agricoles, les revenus net d'activité annuels sont en effet inférieurs à la moitié du SMIC annuel. »
Parmi ces travailleurs, figurent également les auto-entrepreneurs. Selon une étude de l'Insee dévoilée à l'été 2021, les micro-entrepreneurs touchaient en moyenne 590 euros par mois de leur activité non salariée, soit un revenu bien inférieur au seuil de pauvreté fixé à 1.102 euros par mois. Ce statut a été particulièrement plébiscité au moment de la pandémie avec l'explosion des livraisons à domicile. L'autre catégorie qui subit de plein fouet les effets de l'inflation concerne les agriculteurs. Là encore, une simulation de l'Insee montre que pour cette profession, l'inflation a été supérieure de 1,1 point à la moyenne de l'indice des prix calculé en avril dernier (4,9%). Avec la sécheresse et le coup de frein économique en cours, les prochaines semaines pourraient être particulièrement difficiles.