Très attendu, le texte sur le pouvoir d'achat comprend plusieurs mesures pour aider les Français à lutter contre la hausse des prix. Il arrive à l'Assemblée nationale mais, sans majorité absolue, les macronistes doivent chercher des alliances. Ils veulent éviter le revers enregistré la semaine dernière sur le pass sanitaire au sujet des entrées en France, lors de la discussion sur le projet de loi sanitaire. Plusieurs points risquent toutefois de susciter d'importants blocages.
Le prix des carburants
Le premier point de désaccord concerne le litre de carburant bloqué à 1,50 euros, voulu par la Nupes mais aussi par les Républicains. Pour Olivier Marleix, le chef de députés des LR à l'Assemblée nationale, « cette question de la taxation des carburants est la priorité, car c'est la mesure la plus injuste car c'est l'impôt de la France qui se lève tôt pour aller bosser ». Sur ce sujet, les Républicains pourraient obtenir le soutien du Rassemblement national qui milite pour une baisse à 5,5 % de la TVA sur les carburants.
Pour le gouvernement, cette proposition est un casus belli : « Ça fait partie des lignes rouges car ça fait exploser les finances publiques », assure Bruno Le Maire. Le ministre de l'Economie préfère verser des aides aux gros rouleurs qui travaillent à la rentrée. Bercy planche actuellement sur les paramètres de cette indemnité. Quant à la ristourne de 18 centimes d'euros sur le litre de carburant, elle devrait s'arrêter à la fin de l'été.
Autre sujet de tension : l'augmentation du SMIC
La Nupes milite pour un SMIC à 1.500 euros, ainsi qu'« une indexation des salaires sur l'inflation ». Le Rassemblement national prône aussi une hausse des salaires.
Pas question, plaide toutefois la majorité, d'aller aussi loin. Elle rappelle qu'en raison de l'inflation, le SMIC a déjà connu plusieurs revalorisations cette année. Lors de son interview jeudi 14 juillet, Emmanuel Macron soulignait d'ailleurs qu'ajouter la prime d'activité et le SMIC permettaient de verser aux travailleurs presque un SMIC à 1.500 euros. Ces actifs devraient en effet percevoir jusqu' à 1.475 euros nets par mois.
Plus qu'une augmentation calquée sur l'inflation, le gouvernement préfère encourager les chefs d'entreprise à se saisir de dispositifs comme la prime dite Macron défiscalisée. Dans le projet de loi, le montant de cette prime est d'ailleurs porté jusqu'à 6.000 euros pour les salariés touchant jusqu'à trois SMIC, en cas d'accord d'intéressement. Alors que cet article sur « la prime du partage de la valeur » est un des premiers à être débattus ; les députés de la France Insoumise ont déposé un amendement dans le seul but de le rebaptiser « prime enfumage », car elle est laissée au bon vouloir de l'employeur. Le ton est donné et la pression est forte sur la majorité.
La taxe sur les super profits des grands groupes
C'est un sujet qui promet aussi de faire vivement débat. Véronique Louwagie, députée LR et vice -présidente de la commission des Finances assurait la semaine dernière être favorable à ce type de taxation. Une petite révolution pour la droite, qui habituellement intervient plutôt en défense des entreprises.
Emmanuel Macron a évoqué pendant son interview du 14 juillet une « contribution » des grands groupes, mais il a promis qu'elle serait ciblée, et "sans démagogie". On est loin d'une taxe sur les grands groupes comme ont pu instaurer nos voisins européens comme le Royaume Uni ou l'Italie.
Sur ce point, à gauche comme à l'extrême droite, les députés jugeront sans doute que ce n'est pas suffisant. Marine Le Pen a souvent demandé une taxe sur les profiteurs de guerre, pour financer les mesures de soutien au pouvoir d'achat. Alliance pourrait donc se faire sur ce sujet avec la Nupes, les LR et les RN.
Les députés ont trois jours pour trancher sur l'ensemble du texte. Si tout se passe comme le souhaite la majorité, l'adoption définitive du projet de loi est prévue le 7 août, après une navette avec le Sénat.
Entre-temps, ce jeudi 21 juillet, les députés se pencheront également sur le texte jumeau, le projet de loi de finances rectificatives qui vise à financer cet ensemble de mesures. Et la bataille dans l'hémicycle promet d'être toute aussi ardue : le gouvernement prévoit plus de 20 milliards de financement, quand les oppositions prônent une dépense pouvant aller jusqu'à 100 milliards d'euros.