« En 2023, les résultats financiers de la lutte contre le travail dissimulé ont été excellents avec près d'1,2 milliard d'euros de redressement », introduit Damien Ientile, le directeur général de l'Urssaf Caisse nationale, lors d'un déplacement à Nantes (Loire-Atlantique) le 18 mars, moins d'un an après que le gouvernement ait présenté sa feuille de route -en mai 2023- contre les fraudes aux finances publiques. Ce plan a fixé les objectifs de l'Urssaf en matière de fraude sociale pour les cinq années à venir.
Un niveau historique de redressements
1,2 milliard d'euros, c'est l'équivalent de 68 millions de consultations chez le médecin généraliste, compare l'Urssaf. En dix ans, le montant annuel des redressements réalisés a ainsi triplé pour dépasser pour la première année le milliard d'euros contre 321 millions en 2013. « C'est un record ! », lâche Damien Ientile.
« Les montants comptabilisés ont augmenté de 50% par rapport à 2022 (788 millions d'euros de redressement) avec un redressement moyen de 200.000 euros. »
Derrière ces montants, de fortes disparités existent entre les secteurs économiques. Parmi les secteurs majoritairement redressés figure le BTP. « C'est le secteur où le montant des redressements est le plus élevé (61%), à hauteur de 716 millions d'euros. » Viennent ensuite les services aux entreprises (23%) où l'ardoise s'élève à 270 millions d'euros. « Les résultats sont ensuite plus dispersés. » A titre d'exemple, ils atteignent 49,4 millions d'euros dans le commerce (4,2%).
Plus de 36.000 actions contre le travail dissimulé
Damien Ientile explique que ces résultats sont le fruit d'une politique de détection renforcée menée par l'ensemble du corps d'inspection. Ainsi, l'Urssaf a mené plus de 36.037 actions contre le travail dissimulé au niveau national. Les actions de contrôle ciblées, fondées sur la sélection d'entreprises présentant un risque d'erreur, de présomption de fraude ou un profil de risque élevé de dissimulation d'activités/déclaration d'emploi salarié, sont en hausse de 8,5%, au nombre de 6.090. Dans le détail, 3.835 actions ont été engagées sur des employeurs (+2,6% en un an) et 2.255 sur des travailleurs indépendants (+20,3%). 83% d'entre elles ont abouti à un redressement.
« L'Urssaf a également réalisé près de 29.000 actions de prévention, stables sur un an. »
Elles représentent quant à elles 80% des actions globales et ciblent prioritairement les secteurs les plus touchés par la fraude, notamment la construction (24,8%), le commerce (16,9%) et l'hôtellerie/restauration (13,2%).
« Des efforts de moyens »
Le directeur général de l'Urssaf Caisse nationale évoque les « efforts de moyens » mis en œuvre pour aboutir à de tels résultats, à savoir des recrutements supplémentaires d'effectifs dédiés à la lutte contre la fraude qui augmentent de manière « inédite ». Concrètement, ils ont progressé de 7,4% en un an avec 64 nouveaux inspecteurs et contrôleurs spécialisés en 2023. Sur les 1.500 inspecteurs Urssaf, 352 sont aujourd'hui spécialisés dans la lutte contre le travail dissimulé. « Notre objectif est d'affecter 245 personnes supplémentaires à horizon 2027 », indique Damien Ientile.
Selon lui, ces résultats sont également le fruit d'une coopération accrue avec d'autres acteurs, comme la direction des finances publiques ou les Codaf (Comité opérationnels départementaux anti-fraude). L'Urssaf dit avoir également déployé le data mining pour détecter en masse les fraudes permettant « un ciblage de plus en plus pertinent des contrôles » et réalisé un focus sur les fraudes internationales impliquant des travailleurs détachés.
Une évolution de 73% dans les Pays de la Loire
« Cette tendance nationale se retrouve dans les Pays de la Loire », embraye Laure Sanchez-Brkic, la directrice régionale de l'Urssaf. Sur le territoire, le montant des cotisations redressées s'élève à 38,8 millions d'euros en 2023. Soit une évolution de 73% sur un an. 1.127 actions de contrôle de prévention ont été menées. Le montant moyen des redressements toutes actions confondues est de 165.324 euros. Selon elle, cette hausse serait le fruit d'un meilleur ciblage.
« Quand on cible mieux, on arrive à détecter la fraude en réseau. Ce qui peut expliquer ces meilleurs résultats. »
Les effectifs dédiés à la lutte contre le travail dissimulé ont également été renforcés pour atteindre 25 personnes, contre 17 en 2022. « Dans le cadre de la Cog (Convention d'objectifs et de gestion, ndlr), nous tablons sur 12 postes supplémentaires d'ici à 2027 », conclut Laure Sanchez-Brkic.