C3S, CFE, CVAE... Ces acronymes barbares, tous les entrepreneurs et chefs d'entreprises les connaissent par cœur. Ils appartiennent à la grande famille des impôts de production: des versements obligatoires, quel que soit le montant des bénéfices obtenus, "sur la production et l'importation de biens et services, l'emploi de main-d'œuvre ou l'utilisation de terrains, bâtiments et autres actifs utilisés à des fins de production", selon la définition de l'Insee.
Après la taxe d'habitation, Macron veut supprimer la CVAE
Après les avoir baissés de 10 milliards d'euros fin 2020 puis fin 2021, le président-candidat Emmanuel Macron veut encore réduire les impôts de production. Comment ? En supprimant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour toutes les sociétés concernées. La CVAE est due par toute personne physique ou morale qui réalise plus de 500.000 euros de chiffre d'affaires hors taxe. Tout associé d'une société civile professionnelle et de moyens ou tout membre d'un groupement de professions libérales dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152.500 euros est également redevable.
Et ce, alors que la CVAE rapporte 7 milliards d'euros aux blocs local - communes et intercommunalités - et départemental. "Ils seront compensés à l'euro près", promet, à La Tribune, Laurent Saint-Martin, député (LREM) du Val-de-Marne, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale et "relais" fiscalité locale de l'équipe de campagne.
D'autant que le débat fait encore rage entre les associations d'élus et l'exécutif sur la compensation de la taxe d'habitation, supprimée en 2018 pour 80% des foyers fiscaux avant de l'être définitivement en 2023. Selon l'Association des maires de France, 6.000 des 35.000 communes n'ont pas reçu et "ne recevront pas" de compensation intégrale, alors que, d'après Emmanuel Macron, "elle a été compensée conformément aux engagements à l'euro près", avait-il martelé en novembre 2021 au congrès des maires.
"La suppression de la taxe d'habitation, bénéfique pour les Français, a pu en effet déstabiliser le paysage politique local au départ", reconnaît aujourd'hui Laurent Saint-Martin. "La priorité n'est pas de relancer un chantier, mais de clarifier les compétences et de stabiliser le reste de la fiscalité locale", ajoute le porte-parole du président-candidat.
Le mot "contractualisation" est devenu tabou
A défaut d'une grande loi sur la refonte de la fiscalité locale, telle que l'avait annoncée le gouvernement Philippe au début du quinquennat, "le chantier de la contractualisation sera rouvert par le prochain gouvernement si le président de la République est réélu", a fait savoir, début mars, à La Gazette des Communes, Olivier Dussopt, ministre des Comptes publics et soutien d'Emmanuel Macron.
Aussitôt prononcée, cette déclaration a fait l'effet d'une bombe auprès des élus locaux. Ces derniers se souviennent des annonces du Premier ministre Édouard Philippe à Cahors en décembre 2017 sur la contractualisation entre l'Etat et les 322 collectivités les plus riches - régions, départements, intercommunalités et communes - sur leurs dépenses de fonctionnement. Jusqu'à la Covid-19, ces territoires avaient pris l'engagement de limiter la hausse de ces dernières, en échange d'une stabilité de leur dotation globale de fonctionnement.
Aujourd'hui, même quand le chiffre de 10 milliards d'euros est avancé ici et là, l'équipe du président-candidat se refuse à parler de contractualisation ou d'économies sur le dos des collectivités locales.
"Ce ne sont pas des baisses de dépenses, ni des baisses de dotation, mais la maîtrise du rythme de leurs dépenses de fonctionnement. Il faut que l'État et les collectivités territoriales se mettent autour de la table pour accompagner au mieux cette trajectoire", explique Laurent Saint-Martin.
"Nous sommes la première majorité à ne pas avoir baissé la dotation globale de fonctionnement (DGF) aux collectivités locales. Nous l'avons maintenue et même augmentée", poursuit le porte-parole d'Emmanuel Macron.
Le Pen veut en finir avec la CFE et un peu avec la C3S
De son côté, la candidate du Rassemblement national (RN) veut jouer sur les impôts locaux pour favoriser les TPE-PME, "le gisement des emplois de demain, le meilleur levier de l'enracinement territorial, le cœur de [sa] politique économique". Marine Le Pen entend ainsi supprimer la cotisation foncière des entreprises (CFE). Due dans chaque commune où une entreprise dispose de locaux et de terrains, la CFE concerne les sociétés et les particuliers exerçant une activité professionnelle non-salariée et dont le chiffre d'affaires ou les recettes sont supérieures ou égales à 5.000 euros.
Deuxième chantier: la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) qui sera, écrit-elle dans son programme, "réservée aux zones de relocalisation". La C3S participe au financement de l'assurance vieillesse et toute entreprise, privée ou publique, réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 19 millions d'euros est concernée.
Le hic: la candidate du RN ne dit pas encore comment seront compensées ces suppressions, ni par quoi elles seront remplacées.