Quand Emmanuel Macron tente une échappée estivale

POLITISCOPE. Dans sa guerre prochaine qui sera celle de la campagne présidentielle, le président sait qu'il ne peut gagner qu'en maintenant un tempo de mouvement. L'immobilisme serait synonyme d'échec et mat, peu importe ses adversaires. C'est pour cette raison qu'il a profité du 14 juillet pour tenter une échappée estivale et reprendre la main après les difficultés de son mouvement en marche aux dernières élections locales.
(Crédits : GONZALO FUENTES)

Il y a cinq ans, le ministre Macron avait déclamé son grand discours de la Mutualité un 12 juillet, grillant la politesse à son patron d'alors, le président François Hollande. À l'époque, le futur candidat, qui ne l'était pas encore officiellement, se demandait quand démissionner du gouvernement. Tous les regards étaient déjà portés sur lui. Dans la salle mythique de la Mutualité, les spectateurs criaient des « Macron, président ! » sous le regard amusé des journalistes. Encore ministre, pas encore candidat, mais déjà président.

Cinq ans plus tard, c'est donc également un 12 juillet qu'Emmanuel Macron décida de présenter aux Français ses nouvelles décisions quant à l'épidémie de Covid-19. Durant une demi heure, le président déclama sur un ton martial les différentes dispositions contraignantes : obligation vaccinale pour les soignants, pass sanitaire généralisé, évocation d'une troisième dose à l'automne... Emmanuel Macron pouvait avoir le sourire : immédiatement après sa déclaration, des centaines de milliers de Français se sont connectés au site Doctolib pour pouvoir réserver un créneau de vaccination.

Pour les soutiens du chef de l'État, c'est la preuve que la dureté peut payer. Si l'on met de côté le droit et les libertés publiques, les bénéfices apparaissaient donc pour le chef de l'État dès le soir même : il n'y avait qu'à écouter les commentateurs sur les chaines d'info qui s'extasiaient du ton présidentiel. C'est en tout cas une manière pour Emmanuel Macron de continuer à faire croire qu'il reste le « maitre des horloges », coûte que coûte.

C'est qu'à dix mois à peine de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron est plus que jamais en campagne. Rien que cette semaine, il multiplie les interventions et déplacements. Discours du 12 juillet, défilé du 14 juillet, et visite sur une étape du tour de France. Derrière sa fermeté contre la Covid-19, Emmanuel Macron veut imprimer un autre message : je tiens bon la barre, et je continuerai les réformes si je suis réélu. C'est dans cette perspective qu'il faut lire son annonce de maintenir la transformation de l'assurance chômage pour le mois d'octobre prochain, et qu'il a prévenu, une nouvelle fois, que le système des retraites ne peut se satisfaire du statu quo actuel.

Car Emmanuel Macron, qui bénéficiait il y a cinq ans d'une image de grand réformateur, doit aujourd'hui gérer le passif de son quinquennat. Et pour éviter de se transformer définitivement en l'homme du passif dans les prochains mois, Emmanuel Macron a décidé de multiplier les initiatives. Dans sa guerre prochaine qui sera celle de la campagne présidentielle, le président sait qu'il ne peut gagner qu'en maintenant un tempo de mouvement. L'immobilisme serait synonyme d'échec et mat, peu importe ses adversaires. C'est pour cette raison qu'il a profité du 14 juillet pour tenter une échappée estivale et reprendre la main après les difficultés de son mouvement en marche aux dernières élections locales.

Dans ce contexte, le caractère imprévisible de l'épidémie pourrait finalement être le meilleur allié d'Emmanuel Macron. Car celle-ci lui donne maintes occasions de jouer à fond cette partition du père de la nation qu'il affectionne tant. Nous en avons un exemple cette semaine où les Français semblent, encore, comme suspendus à ses décisions face à la Covid-19. Au point que ses adversaires n'arrivent pas à « imprimer », à imposer leur propre tempo, également empêchés par des médias obnubilés par l'épidémie. Emmanuel Macron multiplie ainsi les cartes postales à travers la France, manière de préparer le sillon de sa future campagne.

Les élections régionales ont pourtant démontré qu'il ne pouvait se reposer sur un discours de concorde nationale, à la manière d'un François Mitterrand et de sa France unie en 1988. Car, à la différence notable de son illustre prédécesseur, qui devait gérer une cohabitation avec son adversaire Jacques Chirac, Emmanuel Macron gouverne pleinement la France d'aujourd'hui. Le retour des gilets jaunes cette semaine, en réaction aux dernières décisions sanitaires, montre d'ailleurs que le président n'a pas fini de cliver la société française. Si cela lui permet de reconstituer autour de lui un bloc élitaire, il ne doit pas oublier qu'une élection se joue également au second tour. Surtout, si l'extrême droite, parfait épouvantail, n'arrive pas à se qualifier.

Commentaires 2
à écrit le 19/07/2021 à 6:59
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Alors qu’il ne s’est même pas encore candidat, Emmanuel Macron, à neuf mois de la présidentielle, en décidant de l’extension du pass sanitaire, vient sans doute de perdre toute chance d’être réélu. En effet, les conseillers de l’Élysée ou lui-même n’...

à écrit le 17/07/2021 à 9:48
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Son échappée estivale se fera dans la piscine qu'il s'est fait construire à Brégançon.

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