Quel avenir pour l'Etat-Providence en Europe ?

La course effrénée des pays européens à l'équilibre des finances publiques signe-t-elle la fin de l'Etat-Providence ? Des économistes européens tentent d'ébaucher des solutions pour tenter de préserver les avantages du modèle actuel. L'un deux s'inquiète notamment de "la montée des inégalités sanitaires (...), capable de faire exploser la légitimité sociale de l'Etat".
Fabien Piliu
Maintien de l'Etat-Providence ou équilbre des finances publiques ? Certains gouvernements doivent choisir.

Les objectifs communautaires dans le domaine des finances publiques feront-elles rendre gorge à l'Etat-Providence ? Réunis au Sénat la semaine passée à l'initiative du Cercle de Belem et de l'Institut Jean Lecanuet, des économistes européens formulent une série d'idées pour conserver l'essentiel de ce modèle de redistribution économique et sociale sur lequel pèse notamment le respect de la règle d'un déficit public inférieur à 3% du PIB que s'imposent les pays de la zone euro.

"Penser que l'on puisse fortifier l'euro en faisant moins de social, en sacrifiant l'Etat-Providence sur l'autel de la rigueur est une grave erreur ", a déclaré en préambule du colloque Yves Pozzo di Borgo, le président de l'Institut Jean Lecanuet et sénateur UDI de Paris. "Il est regrettable que l'Europe s'interroge sur la nécessité d'harmoniser les règles fiscales en Europe, et délaisse la question de l'alignement des règles sociales", a-t-il poursuivi, estimant que certaines dépenses sociales, notamment dans l'éducation et la formation devaient être considérées avant tout comme des investissements d'avenir.

La France n'est pas épargnée

Pourtant, de la France à la Grèce en passant par l'Italie et l'Espagne, cette question est bel et bien au centre des discussions. Dans tous ces pays, l'Etat remet en cause le maintien de certaines de ses fonctions, jusqu'ici intouchables, pour espérer tenir ses engagements budgétaires communautaires. Un exemple : la décision prise en 2014 par le gouvernement de Manuel Valls de moduler les allocations familiales est pour beaucoup un certain coup de canif au contrat social tricolore. En Grèce, la forte diminution du salaire minimum dès 2012 a provoqué l'envolée du taux de pauvreté.

Pour la plupart, les économistes étaient globalement sur la même longueur d'ondes, tout en appelant à une réforme du modèle actuel. Citant le cas de l'Italie, Stefano Adama, professeur à l'université de Banja Luka en Bosnie, estime que l'Etat-Providence est au pied du mur.

"Le malaise social est extrêmement fort. Chez les jeunes, l'exaspération est une réalité. La nostalgie de l'Etat-Providence qui, jusque dans les années 1980, assurait l'essentiel des besoins de la population, est très vive. Elle l'est d'autant plus que cet âge d'or est révolu et que les récentes réformes censées restaurer la compétitivité de l'économie italienne et dynamiser le marché du travail n'ont pas encore produit les effets escomptés", observe l'économiste.

Déléguer certaines missions au secteur privé

"C'est la raison pour laquelle l'Etat Providence doit évoluer", avance Pierre Bentata, professeur à l'ESC Troyes et cofondateur avec Nicolas Bouzou du Cercle de Belem:

"Pour faire face au remboursement de la dette, certaines missions non régaliennes pourraient être déléguées au secteur privé. Sinon, ce remboursement ne sera assumé que par une seule classe de citoyens, mettant en péril la cohésion sociale", poursuit-il.

Alexander Fink, professeur à l'université de Leipzig, est également favorable à ce que l'action de l'Etat se concentre « sur ce qu'il sait faire de mieux », à savoir les fonctions régaliennes : défense, police, justice, éducation. En revanche, la couverture des "petites catastrophes", en particulier dans le domaine de la santé devrait être pris en charge par les individus, via un système d'assurances privées.

"Même chose dans certains domaines de la protection sociale. Ne faudrait-il pas mettre fin à la retraite obligatoire pour laisser les individus gérer eux-mêmes le financement de leur retraite future ?", s'interroge l'économiste.

Relever les défis des inégalités sanitaires

"S'il ne se réforme pas, l'Etat-Providence ne pourra pas faire face aux défis majeurs qui se posent à nous et sur lequel aucune réflexion n'est actuellement menée. Citons notamment la montée en puissance des indépendants, qui remet en cause le salariat et la relation employeurs-employés, et le vieillissement de la population ", explique l'économiste.

Sur ce sujet, Pierre Bentata redoute que le modèle de santé ne puisse assumer le coût financier des prochaines avancées technologiques, participant de ce fait à l'émergence d'une médecine à deux vitesses, les personnes aux revenus les plus élevés ayant seules la capacité financière de recourir aux soins les plus performants.

"La montée des inégalités sanitaires est capable de faire exploser la légitimité sociale de l'Etat", avance Pierre Bentata.

Fabien Piliu
Commentaires 28
à écrit le 08/12/2015 à 16:21
Signaler
C'est l'austérité. Les caisses sont vides.

à écrit le 08/12/2015 à 9:46
Signaler
L'état providence c'est tout le monde qui veut vivre aux dépens de tout le monde. Ce n'est pas de la générosité. Ça conduit à la ruine car c'est de la distribution pure; la production n'est pas prévue dans ce modèle idéologique. L'état providence, c...

à écrit le 08/12/2015 à 7:48
Signaler
On attend des économies dans les dépenses publiques, pas pour faire sauter notre système social mais pour être plus efficace À quand la suppression de multiples agences, du conseil économique et social, du Sénat, de quelques strates territoriales ( ...

à écrit le 08/12/2015 à 0:16
Signaler
L´Eta providence c´est:........."La dégradation manifeste de la situation économique a été systématiquement minimisée, maquillée. Dans la réalité, on décompte aujourd'hui 5,7 millions de chômeurs toutes catégories confondues, dont seulement 3 million...

à écrit le 07/12/2015 à 19:03
Signaler
Vraiment je ne souhaite à aucun des opposants à l'"état providence" d'être frappé par une maladie grave, invalidante et que leur vie soudain soit "mise entre parenthèses". Vos déclarations sont "économiquement concevables" mais humainement intenable...

à écrit le 07/12/2015 à 18:05
Signaler
"redoute que le modèle de santé ne puisse assumer le coût financier des prochaines avancées technologiques"...Les avancées technologiques pourraient aussi participer au financement du modèle de santé et pas seulement en profiter. Les grands groupes p...

à écrit le 07/12/2015 à 16:40
Signaler
Je souhaite que la prime de Noel soit doublée cette année,cela peut etre encore fait avant dimanche

à écrit le 07/12/2015 à 16:25
Signaler
La notion même d'état providence est une monstruosité. Il ne peut y avoir de redistribution que si chacun, à son niveau, travaille dur pour une économie suffisamment prospère pour financer ladite redistribution. Aucune prestation sociale ne devrait ê...

le 07/12/2015 à 19:11
Signaler
Ils vont faire la tronche les patron quand ils vont voir des hordes de mendiants mourant de faim et sale sur eux débarquer pour travailler après qu'ils aient perdue leurs RSA... Vous êtes violent tout de même!

le 07/12/2015 à 21:40
Signaler
Le jour ou vous affronterez des bandes de mendiants, de truands et de coupe-jarrets a chaque coin de rue, vous pleurerez l'état de providence.

à écrit le 07/12/2015 à 15:59
Signaler
Encore un peu de redistribution en plus et un petit impôt en sus et une taxe spéciale migrants et le FN te dira merci pour le boulevard.

le 07/12/2015 à 16:34
Signaler
ce n'est pas faux mais le discours du FN est très ambigü ; ce n'est plus le discours ultra-libéral des années 80 mais un discours qui annonce vouloir remettre une couche, évidemment non financée, d'état providence comme le retour de la retraite à 60 ...

à écrit le 07/12/2015 à 15:14
Signaler
J'aime bien ceux qui conseillent les retraites privées, du genre capitalisation. Comme cela les groupes financiers pourront jouer à la roulette avec des fonds qui ne leurs appartiennent pas, et le perdant sera toujours celui qui aura placé son argent...

le 07/12/2015 à 20:47
Signaler
100 000 euros en banque, j'aimerais être malheureux à ce niveau là. quand à la retraite par capitalisation ça va devenir difficile de faire sans vu que les futurs retraites par répartitions diminuent toujours plus pour financer les retraités actue...

à écrit le 07/12/2015 à 15:02
Signaler
On ne peut plus financer la protection sociale par la dette ni par l'IR payé par un Français sur deux. Le pays souffre d'un manque de compétitivité en raison des prélèvement sociaux. Dans la réalité , la situation est bloquée. Les fonctionnaires qu...

à écrit le 07/12/2015 à 13:40
Signaler
On apprécierait, aussi, que soit rappelée, la part des prestations sociales dans ce pays sur notre PIB, 31%, soit une somme absolument faramineuse, sans que d'ailleurs elle semble suffire aux bénéficiaires; nous sommes champion du monde sur ce ratio....

à écrit le 07/12/2015 à 13:26
Signaler
suite 2. Et on sait depuis la rédaction de cette note que cette mesure serait favorable à la protection du climat.

à écrit le 07/12/2015 à 13:21
Signaler
suite. Tout ça est décrit page 12 de la note n°6 du conseil d'analyse économique. Tout le monde doit être capable de comprendre.

à écrit le 07/12/2015 à 13:17
Signaler
Nos problèmes sont lié au fait de ne pas tenir compte de l'énergie dans notre conception de l'économie. On a le travail, le capital ET l'énergie. Pourquoi éliminer systématiquement cette notion? Il faut répartir les charges sociales sur le travail, s...

le 07/12/2015 à 15:36
Signaler
Les taxations, ou plutôt les transferts de taxations, sur l'énergie sont votre martingale.. Mais vous mettez en avant trois facteurs, travail, capital, et énergie, dont aucun n'est actuellement facteur limitant dans nos économies développées. Seule l...

le 07/12/2015 à 16:42
Signaler
Il serait particulièrement inconséquent de fonder le financement de la protection sociale, indispensable, sur la consommation d'énergie, sur laquelle on peut réaliser de substantielles économies par l'efficacité énergétique à service rendu identique....

à écrit le 07/12/2015 à 12:44
Signaler
Ce sont ce type d'idéologies économiques post reaganiennes insufflées depuis le milieu des années 80 qui ont plus fait pour amener le FN au score actuel que n'importe quelle vague de migrants ou attentats.....mais chut, continuons à célébrer le culte...

le 07/12/2015 à 17:22
Signaler
Bien dit ! Mais chut, à lire certains, le seul problème est que les fonctionnaires, responsables de tous les maux, sont les seuls à ne pas être encore précarisés. Une fois que ceux ci auront rejoints la liquidation des ouvriers, employés et autres ca...

le 07/12/2015 à 18:11
Signaler
Tandis que l'on nous explique à la tv que le parasite c'est le fonctionnaire, Mme Bettencourt, MM Niel, Bolloré, Bouygues , Arnault et Cie se gaussent !

à écrit le 07/12/2015 à 12:37
Signaler
Je trouve que cet article pose les mauvaises questions.le système "dit social Français", est largement payé par les Français. Le système de santé est déficitaire parce que l'état ne paye pas ces charges sociales patronales aux caisses paritaires. Cet...

le 07/12/2015 à 12:53
Signaler
Tout à fait d'accord sur le fait qu'il n'y a pas d'état providence en France actuellement. Si on cumule les charges patronales et syndicales on a est au 3/4 du salaire versé. A la fin de sa vie professionnelle, un smicard a versé près de 500 000 Euro...

à écrit le 07/12/2015 à 12:20
Signaler
Dis moi manu, on a un pied ou deux dedans...................................Je cois qu'on est dedans jusqu'au cou !

le 07/12/2015 à 17:23
Signaler
Il vous faut le demander au coq !!!!!

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.