Après avoir lutté ensemble pendant près de six mois contre la réforme des retraites, ils s'étaient donné rendez-vous à la fin de l'été pour faire point sur la rentrée sociale.
Les huit organisations - CFDT, CGT, FO, CFTC, CFE-CGC, Unsa, Solidaires et FSU- se sont ainsi retrouvées en visioconférence, ce vendredi matin. Histoire d'afficher leur union, de retrouver une dynamique commune, et de se mettre d'accord sur les priorités à défendre. Un communiqué commun détaillant leurs revendications sera d'ailleurs publié ce lundi, à midi. Soit un peu avant que la Première ministre ne s'exprime devant les patrons à la Rencontre des entrepreneurs de France (Ref), la traditionnelle université d'été du Medef.
La priorité, les hausses de salaire
« Le pouvoir d'achat est la priorité des travailleurs, l'inflation ralentit mais ne baisse pas, nous allons donc remonter au créneau pour demander des augmentations salariales et les revalorisations des minima de grille », assure un des chefs de file.
Dans un contexte de forte inflation, notamment sur les produits alimentaires, et alors que les boucliers tarifaires sur l'énergie s'arrêtent, l'idée est donc de lancer un appel aux employeurs pour qu'ils ouvrent, sans tarder, des négociations dans les entreprises et les branches professionnelles. Là encore, la date de publication du communiqué, lundi, juste avant l'ouverture de la Ref du MEDEF, qui réunit les patrons, n'est pas fortuite.
Les retraites, encore et encore
Certes, les centrales ont perdu la bataille contre la réforme des retraites, qui entrera officiellement en vigueur ce 1er septembre, mais elles ont aussi convenu de rappeler à l'exécutif combien cette réforme est injuste à leurs yeux. Les syndicats prévoient de le faire à l'occasion de la publication des décrets d'application de la loi qui vont s'étaler tout au long de l'automne.
Les grandes organisations représentatives doivent aussi se retrouver en septembre avec le patronat, pour négocier la convention des retraites complémentaires Agirc-Arrco. A charge pour eux, en effet, « d'adapter » ce régime, dont ils sont gestionnaires, aux nouvelles règles du système général - et notamment le départ à 64 ans contre 62 dans le privé.
A ce titre, leur préoccupation - partagée avec les organisations d'employeurs - est de garder la main face au gouvernement. Leur crainte : que l'exécutif, qui cherche des ressources budgétaires, ne soit tenté de piocher dans les importantes réserves - plus de 60 milliards d'euros - de l'Agirc-Arrco.
Préserver le modèle social
Plus largement, les propos d'Emmanuel Macron sur le modèle social, publiés dans le Point, cette semaine nourrissent leurs inquiétudes. Dans son interview, le président cible des dépenses sociales trop élevées. « A l'approche de la discussion budgétaire, il faut que nous soyons vigilants à préserver nos acquis sociaux, en matière d'éducation, de santé... », lance un membre de FO. Et d'ajouter : « le doublement du montant des franchises médicales sur les médicaments à la charge des patients est par exemple un très mauvais signal... »
Autre sujet de tension à venir pour les syndicats : la future réforme de l'assurance chômage. Alors qu'il s'est fixé d'atteindre le plein emploi - soit un taux de chômage à 5 % - à la fin de son quinquennat, Emmanuel Macron plaide dans le Point, pour un « système d'assurance chômage véritablement contra-cyclique - d'autant plus protecteur que le taux de chômage est élevé et inversement - , en allant chercher ceux qui sont en chômage de longue durée ».
Les syndicats sont vent debout contre ce projet de modulation des allocations chômage en fonction de la situation du marché du travail. Ils sont tout aussi hostiles aux dispositions de la Loi Plein emploi - qui va bientôt être discutée au Parlement-, concernant l'obligation des bénéficiaires du RSA de s'acquitter d'heures de formation, de travail etc...
Vers une mobilisation unitaire ?
Pour le moment, les centrales n'ont pas prévu de défiler ensemble pour défendre leurs positions sur ces différents sujets. « Nos adhérents ont déjà beaucoup donné au printemps, nous ne pouvons pas leur demander d'enchainer les grèves et les pertes de salaires », juge un des leaders de la CFTC. Tous savent aussi que, contrairement aux retraites, l'opinion est plutôt favorable à une réforme de l'assurance chômage, comme au durcissement des règles du RSA ...
Seule mobilisation unitaire inscrite, pour l'heure, à l'agenda : le 13 octobre, mais dans le cadre de la CES, la confédération européenne des syndicats. Il s'agit de porter au niveau européen, avec leurs homologues, des revendications globales contre toute forme d'austérité, pour l'égalité homme/femme, la transition écologique, la non-discrimination ...etc etc
La CGT - associée à la FSU et Solidaires- organise, toutefois de son côté, une manifestation contre les violences policières, le 23 septembre. Mais, cette initiative est passée sous silence lors de la réunion de l'intersyndicale de ce vendredi, tant elle ne fait pas l'unanimité dans le clan syndical. Les centrales réformistes estiment que ce sujet très politique, ne relève pas de la défense des intérêts des travailleurs.
Emmanuel Macron recevra les nouveaux leaders
Comme le veut la tradition républicaine, Emmanuel Macron a proposé aux trois nouveaux élus - Sophie Binet à la CGT, Marylise Léon à la CFDT, et Patrick Martin au Medef- de les rencontrer en tête à tête. Ces rendez-vous doivent se tenir en septembre, à l'Elysée.
Reste que les leaders syndicaux sont plusieurs à s'étonner de ne pas avoir eu d'échanges, cet été, avec le nouveau directeur de cabinet d'Olivier Dussopt, ou même les équipes de la Première Ministre.