Robert Badinter, le père de l'abolition de la peine de mort, est décédé

Garde des Sceaux sous la présidence de François Mitterrand, l'ancien professeur de droit et avocat à la Cour d'appel avait prononcé, le 17 septembre 1981, un vibrant discours en faveur de l'abolition de la peine de mort, conduisant à la promulgation du texte peu de temps après. Il s'est éteint à l'âge de 95 ans.
Robert Badinter, le père de l'abolition de la peine de mort, est décédé.
Robert Badinter, le père de l'abolition de la peine de mort, est décédé. (Crédits : Reuters)

[Article publié le vendredi 9 février 2024 à 12H02 et mis à jour à 13H43].Le monde de la justice est en deuil : Robert Badinter est décédé à l'âge de 95 ans dans la nuit de jeudi à vendredi, a-t-on appris auprès de sa collaboratrice, Aude Napoli.

Ancien président du Conseil constitutionnel, il avait occupé la fonction de ministre de la Justice sous François Mitterrand et avait porté l'abolition de la peine de mort dans une France alors majoritairement en faveur de ce châtiment suprême permettant ainsi à la loi d'être promulguée le 9 octobre 1981.

Un vibrant discours devant l'Assemblée nationale

Un combat qu'il avait mené aux côtés du président de la République et défendu lors d'un vibrant discours, le 17 septembre 1981.

« Demain, grâce à vous, la justice française ne sera plus une justice qui tue. Demain, grâce à vous, il n'y aura plus, pour notre honte commune, d'exécutions furtives, à l'aube, sous le dais noir, dans les prisons françaises. Demain, les pages sanglantes de notre justice seront tournées », avait ainsi déclaré le garde des Sceaux au sein du Gouvernement de Pierre Mauroy en s'exprimant devant l'Assemblée nationale.

Celui qui a d'abord été professeur de droit et avocat à la Cour d'appel de 1951 à 1981 était en effet un abolitionniste de longue date. Il s'était d'ailleurs par la suite, jusqu'à son « dernier souffle de vie », battu pour l'abolition universelle de la peine capitale.

Malgré l'opposition de nombreux députés de droite, le texte a finalement été accepté par 363 députés dont des gaullistes comme l'ancien président de la République Jacques Chirac, mais aussi François Fillon ou encore Jacques Toubon. 113 députés avaient voté contre et 117 s'étaient abstenus. En 2007, l'abolition de la peine capitale a finalement été inscrite dans la Constitution.

« Une figure du siècle »

« Un hommage national sera rendu » à Robert Badinter, a annoncé Emmanuel Macron vendredi, qui a salué « une figure du siècle, une conscience républicaine, l'esprit français ». « Avocat, garde des Sceaux, homme de l'abolition de la peine de mort. Robert Badinter ne cessa jamais de plaider pour les Lumières », a-t-il déclaré.

« En siégeant à ses côtés au Sénat, j'ai tellement admiré Robert Badinter ! C'était un orateur qui faisait vivre ses mots comme des poésies. Il raisonnait en parlant et sa force de conviction était alors sans pareille. Peu importe les désaccords. Je n'ai jamais croisé un autre être de cette nature. Il était tout simplement lumineux », a réagi Jean-Luc Mélenchon, le leader de La France Insoumise.

De son côté, l'ancien conseiller de François Mitterrand à l'Elysée, Jacques Attali, a regretté qu'« avec Robert Badinter, la France perd[e] un géant, immense juriste, avocat et homme d'Etat». « Je perds un ami intime, un compagnon de luttes, de victoires, de conversations littéraires et de moments intenses », a-t-il déclaré.

« La mort de Robert Badinter, qui fut mon ami depuis près de 50 ans et mon prédécesseur à la présidence du Conseil constitutionnel, est une immense perte pour la justice et pour la France », a déploré, quant à lui, Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel. Avant d'ajouter : « Robert Badinter était non seulement un juriste hors pair mais un juste entre les justes ».

Avocat, président du Conseil constitutionnel et sénateur...

Né à Paris le 30 mars 1928 dans une famille juive émigrée de Bessarabie (l'actuelle Moldavie), Robert Badinter est devenu avocat au barreau de Paris après des études de lettres et de droit menées en parallèle d'une carrière d'enseignant universitaire.

Cofondateur avec Jean-Denis Bredin d'un prestigieux cabinet d'avocats, il a ainsi défendu des personnalités, des grands noms de la presse ou de l'entreprise, et plaidé occasionnellement aux assises. En 1977, il a évité la peine capitale au meurtrier d'enfant Patrick Henry, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

Après son départ du gouvernement, celui qui était marié depuis 1996 à la philosophe Elisabeth Badinter, a présidé pendant neuf ans le Conseil constitutionnel (1986-95). Sénateur socialiste de 1995 à 2011, il a travaillé à une réforme de l'ONU dans les années 2000 et sur la réforme du Code du travail pendant le quinquennat de François Hollande.

(Avec AFP)

Commentaires 35
à écrit le 10/02/2024 à 18:17
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la plus grosse erreur de sa vie est celle de supprimer la peine de mort ,on voit le resultat de la criminalité qui a explosé!

le 10/02/2024 à 20:57
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La criminalité est forte parce que nos dirigeants politiques ne se concentrent que sur la délinquance parce que c'est plus facile tandis que de grands criminels sont tout simplement intouchables. Madame Taubira a déclaré qu'elle arrêtait la surveilla...

à écrit le 10/02/2024 à 12:46
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"“Il est à peu près évident que ceux qui soutiennent la peine de mort ont plus d'affinités avec les assassins que ceux qui la combattent.”" Rémy de Gourmont

à écrit le 10/02/2024 à 12:45
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"“Ceux qui sont contre l'avortement, sont ceux-là mêmes qui sont pour la peine de mort.”" Guy Bedos

à écrit le 10/02/2024 à 12:43
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"Il faut se méfier de tout ceux en qui l'instinct de punir est puissant" Nietzsche

à écrit le 10/02/2024 à 11:33
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Il aurait du, il me semble, terminer son travail par une réflexion sur les peines ..

le 10/02/2024 à 12:42
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C'est un dirigeant politique qui a pris une décision d'une importance majeure, cites en moi rien qu'un autre...

à écrit le 10/02/2024 à 11:05
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Une cérémonie d’hommage de plus, il n’y a plus que des grands hommes en France, alors que nos voisins enterrent en silence leurs nains. Notre président en est réduit à enchaîner les homélies à défaut de résoudre les problèmes de ce pays.

le 10/02/2024 à 18:20
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en fait sa devient son passe temps favori avec les voyages a l'etranger qui vont nous couter pendant trois de vacance une fortune aux français.

à écrit le 10/02/2024 à 9:29
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La gauche bien pensante… les assassins sont remis en liberté, 200 0000 bébés et bientôt 100 000 vieux seront éliminés chaque année. Il est pas beau le progrès? Comme la vie est douce, n’est-ce pas? Je ne sais pas comment on peut tenir une ligne aus...

à écrit le 10/02/2024 à 9:24
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Bonjour, tous le monde doit mourir, même lui... Personnellement, la suppression de la peine de mort aurai dû se faire après une consultation nationale.... ( Référendum) Tous le reste est sans importance...

à écrit le 10/02/2024 à 9:23
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En dehors de la suppression de la peine de mort, quel bénéfice a-t-il apporté au justiciable? L'actuel Garde des Sceaux aurait, parait-il, fait augmenter notablement le budget de son ministère; souhaitons que cela profite aux magistrats, etc... et...

le 10/02/2024 à 11:48
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"En dehors de la suppression de la peine de mort, quel bénéfice a-t-il apporté au justiciable? " Si ça te suffit pas ça se passe de commentaire.

le 10/02/2024 à 20:09
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@Dossier51: Vous remplacez la peine de mort par de la prison mais même la perpétuité n'est plus effectuée, comme la majorité des autres peines. En dehors des suicides et des meurtres, plus personne ne meurt en prison.

le 10/02/2024 à 20:53
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"Vous remplacez la peine de mort par de la prison" Tu ne saisis pas toute l'ampleur du problème. Banaliser la peine de mort c'est finir comme les américains par exécuter des innocents automatiquement. La prison c'est un autre sujet dont on peut aussi...

à écrit le 10/02/2024 à 7:09
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Un grand monsieur qui a supprimé en effet l'horreur de la peine de mort au détriment de tous les bouchers potentiels existants au sein de la populace, populace friquée ou pas car comme disait Nietzsche, populace en haut, populace en bas, populace par...

le 10/02/2024 à 12:01
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cette belle ame aurait du egalement faire abolir la peine capitale dans son "deuxieme pays".

à écrit le 09/02/2024 à 22:59
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Le panthéon l'attend.

à écrit le 09/02/2024 à 17:57
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Se pause la question des erreurs judiciaires, comme en France l'affaire d'Outreau et aux Etats Unis, un Etat avait suspendu les exécutions après que les progrès en matières de tests ADN aie innocenté plus de la moitié des condamnés à mort attendant l...

le 09/02/2024 à 20:18
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Que viennent faire les États-Unis ici ?

le 09/02/2024 à 21:11
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@Art. Ben les États-Unis se sont autoproclamés fer de lance (sur la planète) des valeurs rattachées à une démocratie et parallèlement agissent toujours comme des sauvages en exécutant des individus sur décision de justice. Entre les extrêmes de la pe...

le 10/02/2024 à 7:05
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"Que viennent faire les États-Unis ici ? " Amnesty international estime qu'un exécuté noir sur quatre aux états unis est innocent. Alors c'est vrai on peut parler de la Chine mais notre système est bien lus proche de celui des américains qui la expos...

à écrit le 09/02/2024 à 15:50
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Sa réforme n'est simplement plus dans l'air du temps et n'a plus la faveur des citoyens. A la façon de Jacques Delors, se serait-il tant fourvoyé ?

le 09/02/2024 à 16:02
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Au temps de l'abolition de la peine de mort, la majorité des Français était aussi contre. Mais si elle doit être réintroduite, je propose que les chauffards qui tuent sur la route y passent les premiers. ça fera réfléchir plus d'un... Curieusement, b...

à écrit le 09/02/2024 à 15:14
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Un "géant de la conscience française", je reformule : un géant de la bonne conscience française (et des salons bien pensants de la Rive Gauche, vraisemblablement).

à écrit le 09/02/2024 à 14:05
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Un grand homme n’est plus. En prenant du recul, on notera que ce combat contre la peine de mort, si important à une époque, parait un peu futile aujourd’hui, devant les 230 000 avortements par an en France, ou les milliers de décès dans des accidents...

à écrit le 09/02/2024 à 12:55
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Le freluquet en place va, à nouveau, vouloir s'accaparer l'Auras d'un si grand homme !

à écrit le 09/02/2024 à 12:50
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Une humble pensée à tous les parents ayant eu un enfant assassiné et bien souvent dans des conditions adipeuses, Deuil indélébile que M BADINTER n'a pas vécu dans de telles conditions.

le 09/02/2024 à 13:42
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@espoir- La justice, le deuil ne passent pas obligatoirement par la barbarie.

à écrit le 09/02/2024 à 12:49
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Nous perdons là un grand homme d'état qui a marqué à jamais la république française.

à écrit le 09/02/2024 à 12:38
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Sur le glissement des valeurs philosophiques, aujourd'hui, force est de constater qu'après quarante ans la justice française est passée d'une justice qui tue à une justice qui "récompense" par sa mansuétude. Comme y a quarante ans, l'hôpital public é...

le 09/02/2024 à 14:17
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Il faut choisir entre d'une part payer pour la justice ou les hôpitaux et d'autre part entretenir la gérontocratie embourgeoisée à crédit dans les années 70 et constituant le socle électoral des Présidents se succédant depuis VGE...

le 09/02/2024 à 14:48
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@Raymond - "D'une justice qui tue à une justice de récompense"! Ce genre de propos justifie la peine de mort. Des regrets donc...Raymond?

le 09/02/2024 à 21:01
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@Valbel89. [la justice française est passée d'une justice qui tue à une justice qui "récompense" par sa mansuétude] Des regrets? Mais en quoi en aurai-je à la vue de la légèreté excessive des décisions de justice rendues en France. Une légèreté exces...

à écrit le 09/02/2024 à 12:38
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R.I.P monsieur ! d'une génération ou le respect pour la vie humaine a laissé place au sordide ! Ce que nous pouvons nous souvenir, est l'éloquence, la connaissance et le respect de l'état ! Pour cela effectivement, ses combats dans un ensemble de ...

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