
Les soldes d'hiver débutent ce mercredi avec l'espoir pour les commerçants de rattraper, au moins partiellement, un chiffre d'affaires de novembre-décembre catastrophique en raison des manifestations des "Gilets jaunes". Mais de l'aveu même de la secrétaire d'État à l'Économie Agnès Pannier-Runacher, qui a réuni les représentants de fédérations de commerçants et d'artisans, ainsi que les représentants du secteur financier des banques et assurances à Bercy, le manque à gagner sera plus ou moins difficile à rattraper selon les secteurs. D'autant plus que ce rendez-vous tend à s'essouffler à l'heure des promotions à outrance tout au long de l'année.
« Il y a eu un phénomène de rattrapage lié aux fêtes de fin d'année, notamment la semaine de Noël a été une bonne semaine, mais ce qui est certain c'est que (ça) ne suffira pas à compenser les pertes de chiffre d'affaires des commerçants (...) Pour certains secteurs comme les commerces alimentaires ou encore l'hôtellerie et la restauration, le manque à gagner sera encore plus difficile à compenser », a-t-elle rappelé.
Ce mercredi à 8h, la secrétaire d'État a donné le coup d'envoi des soldes aux Galeries Lafayette, à Paris. Ce rendez-vous va durer jusqu'au 19 février.
Un climat social et économique peu propice aux soldes
Si Yohann Petiot, directeur général de l'Alliance du commerce, prévoit « qu'il y aura des belles offres en magasin, du stock et des taux de démarque qui seront certainement importants », cela ne garantit pas selon lui le succès des soldes d'hiver 2019, dans un climat de consommation morose.
Sans compter que cette période de rabais « s'ouvre quand même dans un climat d'incertitude, avec un mouvement des "Gilets jaunes" qui repart et dont on ne sait pas ce qu'il va donner ». Par crainte de nouveaux débordements, les Français pourraient encore privilégier les achats sur Internet. Bordeaux a notamment été l'une des villes les plus bloquées par les manifestations.
« Le mouvement des "Gilets jaunes" a créé un état d'esprit de morosité et il y a beaucoup de stock invendu : dans toute crise de consommation, le consommateur achète moins et uniquement en fonction de ses moyens », estime Christian Baulme, président de la Ronde des quartiers, principale association de commerçants à Bordeaux. Il a constaté une baisse de 20% des ventes, grandes et petites enseignes confondues, sur la période novembre-décembre.
Mais « il n'y a pas que les 'Gilets jaunes' », renchérit Colas Michard, à la tête du chausseur bordelais Michard & Ardillier. Selon lui, c'est toute l'année qui a été très compliquée.
« Rappelez-vous qu'on a eu un printemps pourri, avec de la pluie jusque fin juin. Et fin septembre, on avait 34 degrés quand on devait écouler nos bottes et chaussures fourrées... »
Début décembre, l'Institut français de la mode (IFM) prévoyait que la consommation de textile et d'habillement en France terminerait l'année 2018 en recul de 2,9%, soit l'une des pires depuis 10 ans. Et la confiance des ménages en décembre, annoncée par l'Insee ce mercredi, est là aussi en chute libre : l'indice a perdu 4 points à 87, à son plus bas niveau depuis novembre 2014.
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Soutien prolongé de l'État pour rétablir les trésoreries des entreprises pénalisées
D'après Agnès Pannier-Runacher, deux tiers des entreprises françaises ont été touchées par les répercussions du mouvement des "Gilets jaunes" entamé mi-novembre, mais dans des proportions très différentes et la situation globale est "extrêmement hétérogène".
« Certaines (entreprises ont été) massivement touchées, on a des cas de blocages de dépôts cinq semaines consécutives », d'autres ont plutôt connu une perte de chiffre d'affaires « plutôt lié à une baisse du panier moyen parce qu'il y a une morosité de la consommation ou une désaffection pour les commerçants de proximité », a-t-elle précisé.
À l'heure actuelle, les dispositifs de soutien mis en place par l'intermédiaire des banques (comme l'étalement des échéances de paiement, facilités de caisse, offres de prêts travaux) n'ont été que peu sollicités, selon la secrétaire d'Etat, qui a également évoqué un nombre "relativement faible" de sinistres déclarés aux assurances. « Ce n'est pas illogique, parce que les gens sont concentrés sur terminer l'année et s'occuper de vendre leurs marchandises », a-t-elle souligné. Les demandes devraient être plus nombreuses en ce début d'année.
« C'est pour ça qu'on (...) va poursuivre l'accompagnement » pour favoriser le rétablissement des trésoreries des entreprises pénalisées, a-t-elle assuré.
Au-delà du maintien de la cellule de continuité économique réactivée fin novembre et des dispositifs de soutien passant par les banques et les assurances, les services de l'État vont notamment prolonger pour trois mois les possibilités d'étalement des échéances sociales et fiscales et vont également accélérer le paiement des crédits d'impôts.
(avec AFP et Reuters)
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