TotalEnergies étudie bien une cotation à la Bourse de New York mais pas sur le marché principal (Pouyanné)

En route pour un quatrième mandat, le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné a confirmé jeudi étudier une cotation en actions « à New York, comme à Paris ». Le patron a évoqué une « erreur de traduction » qui a mis le feu aux poudres quand il avait déclaré que son groupe réfléchissait à déplacer sa cotation principale de Paris à New York.
Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné.
Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné. (Crédits : Reuters)

Il avait surpris tout son monde. En révélant, fin avril, que TotalEnergies réfléchissait à déplacer sa cotation principale de Paris à New York, Patrick Pouyanné, le patron du groupe pétrolier avait déclenché l'émoi des politiques, jusqu'au plus haut sommet de l'Etat. Le 22 mai, dans un entretien publié par L'Express, Emmanuel Macron avait appelé la major française à « clarifier » sa position concernant son éventuelle cotation principale à Wall Street, disant « ne pas croire qu'elle s'éloigne de la France ».

Jeudi, à la veille de l'assemblée générale du groupe, le PDG de TotalEnergies a évoqué dans Le Figaro une « erreur de traduction » : il ne voulait pas parler d'une cotation principale à Wall Street mais d'une transformation en actions classiques des titres déjà échangés sous une forme réservée aux entreprises étrangères. « Un 'primary listing' dans notre esprit, ce n'est pas une 'cotation principale', c'est la cotation de l'action TotalEnergies, à New York comme à Paris », a expliqué le PDG. En filigrane, le groupe explique vouloir accéder sur la place new-yorkaise à un format de cotation qui correspond à des actions classiques au lieu de certificats de dépôt qui le limitent en nombre de transactions.

« Aujourd'hui, nous sommes déjà cotés aux États-Unis sous la forme d'un certificat de dépôt (ADR), soumis à la réglementation boursière de la SEC (Securities and Exchange Commission, l'autorité de marché américaine) en tant que +foreign issuer+ (émetteur étranger, NDLR) », a éclairé Patrick Pouyanné  « À New York, cet instrument, (est) moins liquide et moins attirant qu'une véritable action (...) Ce que nous cherchons à faire, c'est juste d'être capable d'offrir les actions TotalEnergies sur les marchés européens et américains en même temps, pour accroître la liquidité. À la réflexion, je dirais qu'il s'agit plutôt de « cross listing » (cotation transversale, NDLR) ».

Le PDG avait expliqué à Bloomberg puis au Sénat que les Américains achètent plus d'actions que les Européens. Patrick Pouyanné pointe notamment du doigt le changement en France du label Investissement socialement responsable (ISR), qui exclut désormais les entreprises exploitant du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels, une mesure décidée par Bercy fin 2023. « Quel est le message que la France a envoyé ce jour-là en arbitrant pour le dogme antifossile ? Que la stratégie de transition de TotalEnergies n'était pas pertinente malgré les 4 à 5 milliards que nous investissons dans la transition énergétique », a souligné le PDG. Près de la moitié de l'actionnariat de TotalEnergies est désormais constituée d'actionnaires institutionnels (fonds de pension, gestionnaires d'actifs, assureurs...) nord-américains.

« Je n'ai jamais dit que TotalEnergies quitterait la France, ni même la Bourse de Paris »

Un tiers des investissements du groupe pétrolier est consacré aux énergies bas carbone, dont 95% d'électricité renouvelable. Mais en septembre, le think tank Carbon Tracker estimait que « seule » la compagnie pétrolière italienne Eni avait des objectifs de réduction d'émissions  «  potentiellement » alignés sur l'accord de Paris. TotalEnergies arrivait deuxième avant Repsol et BP, loin devant le Saoudien Aramco ou l'Américain ExxonMobil.

Lire aussiAG de TotalEnergies : le mandat de Patrick Pouyanné sous la pression d'une partie de ses actionnaires

 « Comment rendre TotalEnergies plus attractif encore sur ce marché américain qui valorise mieux les entreprises que le marché européen ? C'est la question sur laquelle le conseil d'administration a légitimement souhaité une analyse », a-t-il dit. « Je n'ai jamais dit que TotalEnergies quitterait la France, ni même la Bourse de Paris », a-t-il insisté.

Une assemblée générale sous haute tension

Ces déclarations ont été tenues à la veille d'une assemblée générale où les actionnaires doivent se prononcer sur les sujets du climat et la reconduction de Patrick Pouyanné.

Pour la première fois depuis deux décennies, la quatrième major mondiale du pétrole et plus grosse entreprise française par le bénéfice, qui célèbre cette année son centenaire, tiendra sa grand-messe annuelle à domicile, dans sa tour de 48 étages à La Défense, plutôt que dans une salle en plein Paris. Objectif : éviter  « d'immobiliser un quartier de Paris  , explique le groupe, comme cela s'était produit lors d'une édition 2023 tumultueuse, marquée par des échauffourées entre manifestants et policiers aux abords de la salle accueillant l'événement.

Des organisations ont appelé explicitement à bousculer l'AG. Parmi elles, le mouvement Extinction Rébellion qui exige « l'abandon » des projets phare en Ouganda/Tanzanie, au Mozambique et en Papouasie-Nouvelle-Guinée et, préconisation de l'Agence internationale de l'énergie, « l'arrêt de tout investissement dans de nouveaux projets fossiles ». Entre « 300 et 600 » manifestants sont attendus, selon une source policière, qui s'attend comme l'an dernier à des confrontations entre écologistes et actionnaires.

Certains investisseurs réclament une transition énergétique plus ambitieuse

A l'ordre du jour, les actionnaires, présents ou en ligne, seront appelés à voter sur la stratégie de TotalEnergies concernant le climat, certains investisseurs réclamant aussi une transition énergétique plus ambitieuse. Mardi, 22% des actionnaires de Shell ont ainsi rejeté son plan climatique, une proportion relativement élevée. L'an dernier, chez TotalEnergies une résolution purement consultative émanant d'actionnaires militants avait même recueilli 30,4% des votes. Elle demandait à l'entreprise d'aligner ses objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre sur l'accord de Paris de 2015, pour limiter le réchauffement planétaire à +1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle (le monde en étant déjà à environ 1,2°C). Cette fois, aucune résolution consultative ne s'annonce.

Une coalition d'actionnaires revendiquant 0,9% du capital a réclamé en vain, jusque devant la justice, une résolution non contraignante visant « à mettre fin au cumul des fonctions de président et directeur général » occupées par Patrick Pouyanné, pour le maintenir au seul poste de directeur général. Un choix impensable pour le conseil d'administration, attaché à la « stabilité stratégique » de la compagnie qui a engrangé 21,4 milliards de dollars de bénéfices en 2023, après 20,5 milliards en 2022, et proposera aux actionnaires de reconduire le PDG pour un quatrième mandat.

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 24/05/2024 à 11:22
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🧐 Actionnaires Société TotalEnergies SE (FR0000120271) : Amundi Asset Management SA (Investment Management) 155 372 546 actions, 6,510%, 11 395M€ / TOTALENERGIES SE 137 187 667 actions, 5,748 %, 10 061 M€ / Total SA Employee Stock Ownership Plans 11...

le 24/05/2024 à 13:08
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Les actionnaires américains représentent 47% du capital (publication récente). Quand la barre des 50% sera franchie, très bientôt, les choses s'accélèreront et à terme le déménagement du siège vers les USA....quoiqu'en dise Monsieur Pouyanné qui n'es...

à écrit le 24/05/2024 à 9:31
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C'est bien dommage, espérons que TOTAL ne va pas payer ce manque d'ambition trop chèrement. Condamnée à évoluer au sein de la médiocrité de l'UERSS, empire de la corruption prévu pour durer mille ans. Nous sommes vraiment à des années lumières du pri...

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