Le nouveau président élu de l'Argentine, Javier Milei, veut appliquer son programme de réformes au pas de course. Mais la principale centrale syndicale d'Argentine, la CGT, n'entend pas laisser le champ libre à ce président anti Etat, ouvertement déclaré « anarcho-capitaliste » et « libertarien ». Les syndicats ont ainsi appelé à une grève générale le 24 janvier pour protester contre ses premiers décrets et projets de loi. Javier Milei a, depuis son investiture le 10 décembre, publié un décret de dérégulation de l'économie à travers l'abrogation de quelque 300 normes.
L'objectif immédiat pour le gouvernement est la réduction drastique du déficit budgétaire chronique de l'Argentine, engluée dans une inflation à 160% sur un an.
Gouverné par le péronisme inspiré du socialisme depuis des décennies, le pays va ainsi faire face à sa première grève générale en 40 ans.
Des projets de loi pour déréguler l'économie
Pour le président Milei, élu à la grande surprise à 56% par des électeurs argentins exaspérés par la crise économique, la corruption de la classe politique et l'inflation, les oppositions vont être fortes. D'autant qu'il ne dispose pas de majorité absolue au parlement.
Le combat des idées va donc se jouer dans la rue. Hector Daer, secrétaire général de la CGT qui revendique 7 millions d'affiliés, a annoncé en conférence de presse la grève et une mobilisation prévue devant le parlement qui examinera alors les projets de loi dérégulateurs « qui vont à l'encontre de toute la société » et concentrent « tous les pouvoirs publics » sur le président.
La mobilisation, a poursuivi le dirigeant syndical, vise en particulier un « décret de nécessité et d'urgence » publié le 20 décembre par le gouvernement, ouvrant la voie à une dérégulation massive de l'économie, mais au « caractère illégal et inconstitutionnel ».
« Les droits individuels des travailleurs »
« Ce décret s'en prend aux droits individuels des travailleurs, aux droits collectifs, à un système de santé universel et solidaire, et à un nombre incalculable de sujets qui constituent notre pays », a insisté M. Daer.
« En moins d'une semaine, ils transforment l'Argentine et nous ramènent à l'Argentine pastorale », a-t-il dénoncé.
Un décret techniquement en vigueur à partir de vendredi, mais sous réserve d'approbation ultérieure par le parlement.
Il a aussi poursuivi son élan libéral en déposant mercredi au parlement un ensemble détaillé de projets ou modifications de lois, affectant une multitude de domaines de la sphère publique et privée : du fiscal à l'électoral, à la journée de travail, au calcul des retraites, au contrôle et sanctions de manifestations, ou à l'instauration d'un « divorce express ».
Ce vaste train de réformes, dit « loi-omnibus » doit lui aussi être examiné par le parlement, et les avis juridiques divergent sur le temps effectif -des mois, voire des années selon certains- qu'il faudrait pour examiner les quelque 600 articles.
Un parlement sans majorité
Une autre interrogation porte sur l'issue elle-même du processus parlementaire sur certaines dispositions polémiques, avec un parlement sans majorité absolue dans aucune des deux chambres. Et où le parti de Milei, la Libertad Avanza, n'est que la troisième force --même s'il peut compter avec l'appui du bloc de centre-droit, le deuxième en importance.
La mobilisation n'a toutefois pas attendu, avec trois manifestations en un peu plus d'une semaine à Buenos Aires, et plusieurs recours en justice déposés contre le décret d'urgence du 20 décembre. Dont certains par la CGT elle-même mercredi.
Sont d'ores et déjà effectives, et avec un effet immédiat sur le porte-monnaie des Argentins, une première série de mesures d'austérité annoncée aux premiers jours de la présidence Milei.
Ainsi la dévaluation de plus de 50% du peso, la devise nationale, et la baisse dès début janvier de subventions aux transports et à l'énergie, se traduisant en une hausse immédiate de tarifs vouée à affecter le quotidien de plusieurs millions d'Argentins.
(Avec AFP)