Chute en vue des récoltes de céréales ukrainiennes : les prix risquent de repartir à la hausse

En Ukraine, les surfaces semées ont diminué et la récolte de céréales et d'oléagineux devrait encore baisser en 2023, pour atteindre « 53 millions de tonnes », contre 65 millions en 2022 et 106 millions en 2021. Si le pays ne peut les exporter, les prix pourraient augmenter et entraîner de lourdes difficultés pour les pays en voie de développement. Pour le moment, le mouvement de repli entamé en novembre se poursuit sur le marché des céréales, favorisé par l'abondance de blé russe et le retour des pluies en Amérique.
En Ukraine, la campagne de semis 2022 a été entravée, du fait des combats, du manque de carburant et de la destruction d'une partie des machines agricoles.
En Ukraine, la campagne de semis 2022 a été entravée, du fait des combats, du manque de carburant et de la destruction d'une partie des machines agricoles. (Crédits : Reuters)

Quatrième exportateur de maïs et en passe de devenir le troisième exportateur de blé avant l'attaque de la Russie, l'Ukraine n'a plus les moyens de récolter autant de céréales. « Nous sommes en guerre. Nous continuons à produire des céréales mais les récoltes vont baisser. Pour les agriculteurs, ce n'est plus rentable de produire des céréales », a déclaré jeudi Nikolay Gorbachov, président de l'Ukrainian Grain association (UGA) lors d'une conférence sur les céréales organisée par Argus Media à Paris.

Il a souligné que les agriculteurs ukrainiens ne retiraient en bout de chaîne que 80 dollars par tonne de maïs, alors que le grain jaune s'échange autour de 300 dollars sur les marchés, essentiellement du fait de la hausse considérable du coût du transport.

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Après les 106 millions de tonnes récoltées en 2021, un record historique, et une récolte estimée à environ 65 millions de tonnes pour 2022, il évalue à « 53 millions de tonnes » la production en 2023. La campagne de semis 2022 a été entravée, du fait des combats, du manque de carburant et de la destruction d'une partie des machines agricoles et des infrastructures de stockage. Cela a conduit à la réduction d'environ un quart de la surface cultivée par rapport à l'année précédente, selon l'UGA.

Inquiédude autour des prochaines campagnes d'exportation

Si l'ouverture d'un corridor maritime pour les exportations ukrainiennes, après un accord signé fin juillet par Kiev et Moscou sous l'égide de l'ONU et de la Turquie, a permis de sortir près de 20 millions de tonnes de produits agricoles, cela n'est pas suffisant pour Nikolay Gorbatchov. Le président de l'UGA a déploré la lenteur des inspections des navires dans le Bosphore, accusant les inspecteurs russes « de fouiller jusqu'à l'eau des ballasts ».

Il s'est dit inquiet quant aux exportations de la prochaine campagne : « Pour la sécurité alimentaire nationale ukrainienne, ça ira. Mais si l'Ukraine ne peut pas exporter ces 40 ou 50 millions ? Les prix vont augmenter. L'Europe peut se le permettre, mais pas les pays en développement ».

Dans la salle, un importateur jordanien a plaidé pour un renouvellement du corridor en mars, estimant que la situation des importateurs de blé du bassin sud de la Méditerranée serait « catastrophique » sans l'apport des céréales de mer Noire, du fait de la hausse « insoutenable » des prix.

« C'est la Russie qui fixe le prix du blé dans le monde »

Le mouvement de repli entamé en novembre se poursuit sur le marché des céréales, favorisé par l'abondance de blé russe et le retour des pluies en Amérique. Lundi, le contrat de référence du blé d'hiver de catégorie SRW (Soft Red Winter Wheat) est tombé à son plus bas niveau depuis 16 mois à Chicago, à 7,125 dollars le boisseau ou 261 dollars la tonne. « Le marché s'est un peu calmé, avec des incertitudes plutôt sur le long terme liées à la production ukrainienne de blé ou à la météo », abonde Damien Vercambre, courtier au cabinet Inter-Courtage.

Bien que le président russe Vladimir Poutine ait dit la semaine dernière que le pays ne pouvait « pas permettre que tout soit emporté à l'étranger », la Russie continue de vendre tous azimuts sa récolte massive de blé. D'après son ministre de l'Agriculture, 55 à 60 millions de tonnes de grains devraient être exportées sur cette campagne, indique Agritel.  « C'est la Russie qui fixe le prix du blé dans le monde », souligne Arlan Suderman, de la plateforme de courtage StoneX.

La hausse des cours a profité aux céréaliers français, les coûts de production inquiètent

 Après une année 2022 « hors norme » liée à la guerre en Ukraine, les céréaliers français s'inquiètent de leurs coûts de production, qui ont grimpé mais étaient jusque-là largement compensés par la flambée du prix du blé sur les marchés mondiaux. « Ce que l'on craignait arrive : ce fameux « effet ciseaux », c'est-à-dire la chute des cours (du blé) et l'explosion des charges qu'on a vécues en 2022, mais qu'on va subir de plein fouet en 2023 », a averti mercredi lors d'une conférence de presse le secrétaire général de l'Association générale des producteurs de blé (AGPB), Philippe Heusèle. Avec l'invasion russe de l'Ukraine, les prix de vente du blé ont connu en 2022 une « embellie » inédite, dessinant une « année hors norme » pour les producteurs de blé français, « malgré de  fortes hétérogénéités suivant les régions dans une année climatiquement pas facile. »

Mais ce cours qui est « monté très haut » est désormais « redescendu au niveau où il était il y a un an », souligne-t-il, alors que le secteur, comme beaucoup d'autres, a connu une explosion des charges en 2022, qui elles ne semblent pas vouloir diminuer. « Les produits vendus, les céréales, l'engrais, le gaz, les phytosanitaires, le carburant, l'électricité pour l'irrigation : tous les prix ont augmenté », a détaillé Eric Thirouin, président de l'AGPB. « Depuis décembre, le prix des céréales chute et le prix des engrais est aussi en baisse, mais pas le reste ». Les cours du blé, qui étaient montés sur le marché européen jusqu'à 438 euros la tonne le 16 mai, étaient redescendus mardi soir sous les 282 euros pour une livraison en mars.

(Avec AFP)

Commentaires 2
à écrit le 27/01/2023 à 11:47
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Lemaire va pas etre content. Le russe emporte encore une fois ka mise, et c'est loin d'etre fini. D'ici la fin du conflit tout va etre encheri en europe surtout pour les prx belligerants. France en tete suivie de la Germanie, puis l'anglois, toujours...

à écrit le 27/01/2023 à 10:49
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resumons la situation : le covid ukrainien a encore frappe, donc le prix de la moutarde faite avec des graines canadiennes va exploser, tout comme le prix des autoroutes en france , et les cotisations des mutuelles des francais..... j'ai bien resume ...

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