En pleine crise du pétrole du Guyana, Washington frappe fort en sanctionnant le secteur pétrolier et gazier du Venezuela

Les États-Unis ont déclaré ce mardi réactiver dès avril les sanctions contre le secteur pétrolier et gazier vénézuélien, après avoir annoncé de nouvelles sanctions sur l'or. Ils dénoncent le non-respect par Caracas des engagements pris en vue de la tenue d'une élection présidentielle cette année, dont la date n'est toujours pas fixée.
Les États-Unis avaient ré-autorisé mi-octobre 2023 l'achat de gaz, de pétrole et d’or vénézuéliens pour une durée de six mois, avec prolongation sous condition.
Les États-Unis avaient ré-autorisé mi-octobre 2023 l'achat de gaz, de pétrole et d’or vénézuéliens pour une durée de six mois, avec prolongation sous condition. (Crédits : Carlos Jasso)

Gros coup de pression de Washington. Ce mardi, les États-Unis ont annoncé le rétablissement des sanctions contre le secteur pétrolier et gazier vénézuélien à compter d'avril prochain. Un retour en arrière puisque les autorités américaines les avaient allégées en octobre dernier. Cette décision fait suite à la confirmation par la Cour suprême vénézuélienne de l'inéligibilité pour 15 ans de Maria Corina Machado, qui a remporté haut la main la primaire de l'opposition vénézuélienne cet automne (plus de 2 millions de voix et 92% des suffrages).

« En l'absence de progrès (...), notamment pour permettre à tous les candidats à la présidence de concourir à l'élection de cette année, les États-Unis ne renouvelleront pas la licence (autorisant l'achat de pétrole et de gaz vénézuéliens) lorsqu'elle arrivera à échéance le 18 avril 2024 », a ainsi déclaré le porte-parole du département d'État américain, Matthew Miller, dans un communiqué ce mardi 30 janvier.

La veille déjà, en conséquence de cette même confirmation de la Cour suprême, les États-Unis avaient annoncé qu'ils imposaient à nouveau des sanctions à l'encontre de la compagnie publique Minerven, qui exploite des mines d'or. L'organisme de contrôle financier (Ofac) du département du Trésor américain a indiqué dans une note qu'il donnait jusqu'au 13 février 2024 pour « terminer toute transaction en cours » avec cette structure.

Un accord qui vole déjà en éclats

Pour les États-Unis, cette décision de la Cour suprême vénézuélienne « n'est pas conforme » à l'accord signé en octobre à la Barbade entre les représentants du président Nicolas Maduro, et ceux de l'opposition dans le but d'organiser une élection présidentielle équitable en 2024.

Une feuille de route électorale avait ainsi été fixée pour permettre à tous les partis de sélectionner leurs candidats à l'élection présidentielle. Elle prévoyait aussi la présence d'observateurs internationaux et garantissait que le scrutin se tiendrai au deuxième semestre - la date n'a toujours pas été fixée. Cela représentait une avancée majeure car les négociations entre le pouvoir et l'opposition à ce sujet étaient au point mort depuis novembre 2022.

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La signature de cet accord surprise avait ensuite provoqué une réaction en chaîne positive pour le Venezuela. Les États-Unis avaient en effet ré-autorisé l'achat de gaz, de pétrole et d'or vénézuéliens pour une durée de six mois, avec prolongation à la clé si la situation politique était jugée satisfaisante. Ce qui représentait une bouffée d'air pour le pays, en proie à une crise majeure depuis la réélection contestée de Nicolas Maduro en 2018, qui avait entraîné un durcissement des sanctions américaines.

Pour le département d'État, l'accord de la Barbade « reste le mécanisme le plus viable » pour résoudre la crise au Venezuela. « Mais il faudra pour cela que Maduro et ses représentants respectent la feuille de route et veillent à ce que l'opposition ait le droit de choisir librement ses candidats ».

Pas « d'élections sans moi »

Malgré la décision de la Cour suprême, la candidate de l'opposition ne compte pas baisser les armes. Le président « Nicolas Maduro ne va pas choisir le candidat du peuple, parce que le peuple a déjà choisi son candidat, point final », a affirmé Maria Corina Machado ce lundi. De nombreux observateurs estiment qu'elle peut rallier derrière elle toute l'opposition, traditionnellement très divisée.

« Nous allons gagner (...) J'ai reçu le mandat de près de 3 millions de Vénézuéliens qui ont exercé leur souveraineté populaire le 22 octobre. Je représente cette souveraineté populaire. Vous ne pouvez pas organiser des élections sans moi et sans les millions de Vénézuéliens qui ont voté », a-t-elle ajouté, soulevant les applaudissements de ses partisans.

Samedi dernier, la délégation de l'opposition aux négociations a exigé que la décision soit annulée et a alerté la Norvège, la France, la Colombie et le Brésil, pays impliqués dans les négociations. Dans un communiqué lundi matin, l'Union européenne s'est dite « très préoccupée » par la décision de la Cour suprême.

L'avocat constitutionnaliste Juan Manuel Rafalli estime que Maria Corina Machado pourrait « intenter une action contre la décision ou exiger la nullité de l'acte administratif ». « Mais il s'agit d'un problème politique, pas d'un problème juridique », a-t-il indiqué à l'AFP. « S'il n'y a pas un pouvoir judiciaire indépendant et autonome (...) vous n'obtiendrez jamais une réponse favorable ».

De son côté, le pouvoir estime que la justice a tranché. « Il y avait un mécanisme volontaire : ceux qui voulaient faire appel faisaient appel et s'engageaient aussi à respecter le résultat. C'est du passé », a balayé ce lundi Jorge Rodríguez, président du Parlement et chef de la délégation du pouvoir aux négociations. « Il n'y a plus rien à dire », a-t-il insisté, ajoutant que l'opposition faisait preuve d'une « profonde arrogance ».

« Le Venezuela ne cédera à aucun chantage. Ses institutions continueront à respecter les lois et la Constitution, conformément au mandat reçu par le peuple », a, par ailleurs, réagi le ministère des Affaires étrangères. Le ministre du Pétrole Pedro Tellechea a, quant à lui, assuré que son pays était « préparé à toutes les circonstances. S'ils nous imposent plus de sanctions, nous nous préparerons aux sanctions, aux mesures prises par les États-Unis qui en subiront eux aussi les conséquences ».

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 30/01/2024 à 21:30
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[...sanctions contre le secteur pétrolier et gazier vénézuélien, après avoir annoncé de nouvelles sanctions sur l'or...] Comme ça tombe à pique: une main déjà mise sur la monnaie de réserve mondiale ($); une main non négligeable des USA comme premie...

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