Tensions autour du pétrole l’Essequibo : le Venezuela envoie des milliers de soldats à la frontière du Guyana

Alors que les tensions s'étaient apaisées depuis le 15 décembre, l'envoi d'un navire militaire britannique en soutien au Guyana a ravivé le conflit. Le président vénézuélien, qui conteste la main mise du Guyana sur la région de l'Essequibo, a annoncé ce vendredi mettre en place des manoeuvres militaires de nature « défensive ».
« J'ai ordonné l'activation d'une action conjointe de toutes les Forces Armées nationales bolivariennes (vénézuéliennes) dans les Caraïbes orientales », a déclaré le président Maduro.
« J'ai ordonné l'activation d'une action conjointe de toutes les Forces Armées nationales bolivariennes (vénézuéliennes) dans les Caraïbes orientales », a déclaré le président Maduro. (Crédits : Manaure Quintero)

La crise entre le Venezuela et le Guyana repart de plus belle. En réponse à la décision de Londres d'envoyer, le 24 décembre, un navire de patrouille militaire en soutien au Guyana, le président vénézuélien Nicolas Maduro a ordonné jeudi à 5.600 de ses soldats de participer à des manoeuvres militaires de nature « défensive ».

« J'ai ordonné l'activation d'une action conjointe de toutes les Forces Armées nationales bolivariennes (vénézuéliennes) dans les Caraïbes orientales, sur la côte Atlantique, une action conjointe de nature défensive, en réponse à la provocation et à la menace du Royaume-Uni contre la paix et la souveraineté de notre pays », a déclaré le président Maduro lors d'une émission de radio et de télévision, dans laquelle il a montré des images de navires de guerre et d'avions de combat patrouillant dans la zone.

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Londres et Georgetown démentent toute offensive à venir

Face à l'accusation de Caracas d'une provocation de Londres, un porte-parole du gouvernement britannique a répondu dans la nuit de jeudi à vendredi. « Les actions entreprises par le Venezuela contre le Guyana sont injustifiées et devraient cesser (...) Nous travaillons avec nos partenaires dans la région pour éviter une escalade et continuons à suivre la situation de près », a-t-il affirmé.

De son côté, Georgetown, la capitale du Guyana, a aussi cherché à calmer le jeu. « Nous n'avons aucun plan pour prendre des mesures offensives contre le Venezuela (...) Nous n'avons pas l'intention d'envahir le Venezuela. Le président Maduro le sait et ne doit pas s'inquiéter », a assuré jeudi soir le vice-président du Guyana, Bharrat Jagdeo. Lors d'une conférence de presse, ce dernier a précisé que l'arrivée d'un patrouilleur britannique dans les eaux du Guyana entrait dans le cadre « d'exercices de routine planifiés depuis longtemps ».

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Querelles autour de la région de l'Essequibo

A l'origine de ce bras de fer géopolitique : le contrôle de l'Essequibo, une région riche en pétrole.

Le géant américain ExxonMobil a en effet découvert d'énormes réserves de pétrole dans l'Essequibo en 2015. Or quelque 125.000 personnes soit un cinquième de la population du Guyana vivent dans l'Essequibo, qui couvre les deux tiers de la superficie du pays. Avec de nouvelles découvertes en octobre, le Guyana, 800.000 habitants, possède désormais les réserves par habitant les plus élevées au monde, estimées à 11 milliards de barils, soit un niveau similaire à celui du Koweit. Mais Caracas estime que l'opération pétrolière se déroule dans des eaux disputées et accuse le président guyanien Irfaan Ali d'être un « esclave » d'ExxonMobil.

Et la tension était montée d'un cran après le référendum vénézuélien du 3 décembre qui a approuvé la création d'une province contrôlée par Caracas dans l'Essequibo. Le pays avait alors revendiqué son droit sur la région, soutenant que le fleuve Essequibo devait être la frontière naturelle, comme en 1777 à l'époque de l'empire espagnol. Le président vénézuélien Nicolas Maduro avait alors ordonné à la compagnie pétrolière publique PDVSA d'octroyer des licences d'exploitation de pétrole, de gaz et de minerais dans la zone contestée. Il a proposé de donner aux entreprises travaillant avec le Guyana un délai de trois mois pour se retirer de la zone et négocier avec le Venezuela

Le Guyana s'était défendu, estimant que la frontière entre les deux pays date de l'époque coloniale anglaise et que celle-ci a été entérinée en 1899 par une Cour d'arbitrage à Paris. Cette frontière, qui est en vigueur, laisse davantage de territoire au Guyana. Pour résoudre le conflit, le différend est porté devant la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction de l'ONU. Problème, le Venezuela ne reconnaît pas cette juridiction.

Apaisement des tensions après une rencontre entre les deux présidents

Le 15 décembre, néanmoins, le président guyanien Irfaan Ali et le président vénézuélien Nicolas Maduro se sont rencontrés lors d'un sommet qui a contribué à faire baisser la pression mais n'a pas résolu le différend, les deux pays campant sur leurs positions. Le Guyana veut ainsi continuer la procédure en cours devant la CIJ. Avant la lecture de la déclaration mi-décembre, le président Irfaan Ali, qui a parlé aux journalistes, a réaffirmé « la défense de notre intégrité territoriale et de notre souveraineté ».

Le Guyana a tout le droit (...) de faciliter tout investissement, tout partenariat (....), de délivrer toute licence, d'octroyer toute concession dans notre espace souverain », a-t-il lancé.

« Le Guyana n'est pas l'agresseur, le Guyana ne cherche pas la guerre, mais le Guyana se réserve le droit de travailler avec tous ses partenaires pour assurer la défense de notre pays », a-t-il aussi revendiqué, alors que Caracas a accusé à maintes reprises le Guyana d'être aux ordres des Etats-Unis, ennemis du Venezuela. Le secrétaire d'État américain Antony Blinken avait, de son côté, réaffirmé mi-décembre la position des Etats-Unis, selon laquelle, « la frontière terrestre entre le Venezuela et le Guyana doit être respectée à moins que - ou jusqu'à ce que - les parties parviennent à un nouvel accord - ou qu'un organe juridique compétent en décide autrement ».

(Avec AFP)

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