Inflation ou emploi, le casse-tête du virage monétaire de la Fed

La Fed est confrontée à une difficile équation : comment calmer l'inflation qui réduit le pouvoir d'achat des salariés et pèse sur le marché du travail, alors qu'une remontée des taux pourrait fragiliser la croissance et l'emploi ?
Robert Jules
Lael Brainard, la nouvelle vice-présidente de la Fed, lors de son audition de confirmation par le Sénat.
Lael Brainard, la nouvelle vice-présidente de la Fed, lors de son audition de confirmation par le Sénat. (Crédits : Reuters)

"L'inflation est trop élevée et les travailleurs de tout le pays s'inquiètent de savoir ce qu'ils pourront payer avec leur salaire", alertait le 13 janvier Lael Brainard, la nouvelle vice-présidente de la Fed, lors de son oral de confirmation au Sénat la semaine dernière. "Nous prenons des mesures sur le front de la politique monétaire qui, j'en suis convaincue, réduiront l'inflation tout en continuant à permettre au marché du travail de retrouver sa pleine solidité au fil du temps", a-t-elle assuré.

Cette économiste, démocrate, qui siège au Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale depuis 2014, avait en tête les données du rapport mensuel sur l'emploi publié une semaine plus tôt par le Bureau américain des statistiques sur le travail. Il indiquait que le salaire horaire moyen a augmenté de 4,7% en 2021, mais comme l'inflation a atteint en même temps 7% (5,5% hors énergie et alimentation, au plus haut depuis 1991) - le plus haut niveau atteint depuis 40 ans -, les salaires réels ont en réalité perdu du pouvoir d'achat.

Le taux du chômage au plus bas depuis mars 2020

Dans ces conditions, le taux de chômage à 3,9% affiché en décembre, son plus bas niveau depuis mars 2020, est à relativiser.

D'autant que la machine américaine à produire des jobs marque le pas : le nombre d'emplois créés ne s'élevait qu'à 199.000 emplois le mois dernier, alors que le consensus des experts tablait plutôt sur 450.000. Si la propagation du variant Omicron a pu jouer, l'écart reste néanmoins important.

En outre, le nombre de personnes sans activité qui veulent un emploi s'élevait à 5,7 millions en décembre, soit 1,6 million de moins qu'il y a un an, mais 717.000 au-dessus du niveau de février 2020 (avant le début de la pandémie). Or ces personnes ne sont pas comptabili​​sées comme étant au chômage.

Quant au nombre de chômeurs de longue durée (qui n'ont pas occupé d'emploi depuis 27 semaines ou plus), il étaient 2 millions en décembre, soit 887.000 de plus qu'en février 2020. Ils représentent, à eux seuls, 31,7 % des chômeurs, selon le Bureau.

Le taux d'activité reste, lui, à 61,9% en décembre et stagne depuis près de douze mois. La participation au marché du travail reste inférieure de 1,5 point de pourcentage à celle de février 2020. Enfin, le ratio emploi-population n'est que de 59,5 %, soit 1,7 point de pourcentage en dessous du niveau de février 2020.

Une vague inédite de démissions

Ces chiffres sur l'emploi s'expliquent aussi par une vague inédite de démissions qui a atteint 3% en novembre (ce taux évolue habituellement entre 2% et 2,2%), alors que le nombre de propositions d'emplois a atteint un niveau record en 2021 (10,6 millions en novembre dernier). Les secteurs les plus touchés par ces démissions se trouvent dans les activités de service : commerce de détail, loisirs, restauration et hôtellerie, et la santé, dont une partie des professionnels épuisés par la pandémie préfèrent chercher ailleurs.

Le phénomène s'explique par les conditions sanitaires, l'attractivité de meilleurs salaires qui pousse à la mobilité ou, dans le cas de la santé, un épuisement des personnels qui jettent l'éponge.

Les Etats-Unis sont donc encore loin de la situation de "plein emploi". Pour la Fed, l'équation est compliquée, elle doit calmer l'inflation en augmentant les taux tout en continuant à soutenir la croissance pour renforcer un marché de l'emploi qui reste fragile, ce qui passe par une politique monétaire accommodante. Cela relève d'un difficile numéro d'équilibriste, qui n'a plus rien à voir avec les perspectives économiques très optimistes entrevues l'année dernière avec la forte reprise.

Ainsi, la Banque mondiale a révisé sa projection de croissance pour les Etats-Unis de 5,6% à 3,7% en 2022.

Le déficit public se creuse

C'est un problème pour le président Joe Biden, qui, après un an à la Maison Blanche, voit ses projets patiner. Il peine à convaincre une majorité d'élus au Congrès de voter son colossal plan d'investissement de 3.000 milliards de dollars - seuls 1.900 milliards ont été approuvés - qui a pour ambition de moderniser l'économie américaine en mettant l'accent sur les infrastructures et un "Green Deal".

Force est de constater que malgré le plan de relance pour soutenir l'activité durant la pandémie, qui a creusé le déficit public à 214,8 milliards de dollars au troisième trimestre 2021, soit 3,7 % du PIB, les Etats-Unis n'on pas encore récupéré de la crise du Covid-19.

Robert Jules
Commentaires 3
à écrit le 17/01/2022 à 20:07
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n'importe quoi, le pb ne se pose pas comme ca.......le pb de la fed est de savoir s'ils vont diminuer l'effet richesse qu'ils ont cree sur l'immobilier et les actions, sachant que si ca pete ca fait tres mal; l'emploi n'a rien a voir avec ce que vous...

à écrit le 17/01/2022 à 17:53
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Il n'y a aucun casse-tête, et la FED le sait très bien, ainsi que les gens bien informés. Tôt ou tard, la FED sera obligée de relever ses taux d'intérêts, et il vaudrait mieux tôt, que tard. Maintenant, apparemment, certains préfèrent laisser pourrir...

à écrit le 17/01/2022 à 17:51
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"Il indiquait que le salaire horaire moyen a augmenté de 4,7% en 2021, mais comme l'inflation a atteint en même temps 7% " C'est en effet très inquiétant, tandis qu'un début d'augmentation des salaires pointait enfin son nez les prix sont venus annul...

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