Israël : la lutte contre l’oubli du sort des otages

Pessah, la « fête de la liberté », qui débute ce lundi, résonne avec la détresse des proches des captifs.
Gaza.
Gaza. (Crédits : © LTD / REUTERS/Amir Cohen)

Comment marquer en ce lundi Pessah, la Pâque juive, une fête célébrée en famille tant par les laïques que par les religieux, pour commémorer la fin de l'esclavage des Hébreux, quand 133 otages israéliens (dont moins de 100 estimés en vie), restent prisonniers du Hamas depuis près de deux cents jours dans la bande de Gaza ?

Pour les familles des otages, la « fête de la liberté », l'une des plus importantes du calendrier juif, est aussi l'occasion de lancer un énième appel à leur gouvernement et de rappeler au monde le triste sort de leurs proches.

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Deux jours avant que le déluge de drones et de missiles iraniens ne s'abatte sur le pays, le Forum des familles des otages et disparus a organisé une simulation de repas de Pessah autour de grandes tablées vides dans le réfectoire dévasté du kibboutz Nir Oz, l'un des villages martyrs du massacre du 7 octobre perpétré par le Hamas, avec 46 personnes assassinées et 71 kidnappées. Lundi soir, près de 500 membres du kibboutz Be'eri, un autre village frontalier de Gaza meurtri par les attaques terroristes survenues voilà six mois le jour d'une autre grande fête juive (Soukkot), se réuniront sur l'esplanade du musée de Tel-Aviv, rebaptisée « place des otages », au pied du quartier général de Tsahal, pour lire à haute voix le récit symbolique de la sortie d'Égypte des Hébreux.

Ces derniers jours, la menace venue de Téhéran s'est brutalement imposée sur le devant de la scène, au risque d'éclipser le sort des captifs et la guerre à Gaza. Dès le lendemain de l'attaque iranienne, le collectif des familles des otages a réagi. « La plupart des Israéliens viennent de passer une nuit blanche, remplis d'anxiété, indiquait leur communiqué. Cependant, ils étaient chez eux, sachant que l'État d'Israël s'efforçait de les protéger. Les peurs et les émotions que nous avons tous ressenties sont pâles en comparaison de la terreur, de l'effroi, du désespoir [...] que les 133 otages détenus par le Hamas endurent depuis cent quatre-vingt-dix jours et nuits. »

Des négociations au point mort

Pour l'heure, les tractations pour aboutir à une trêve et à la libération des otages sont au point mort, le Hamas ayant rejeté le week-end dernier la proposition d'accord négocié par les trois pays médiateurs (États-Unis, Qatar et Égypte). « Le chef du Hamas, Yahya Sinouar, continue d'exploiter les tensions avec l'Iran pour obtenir une escalade dans la région », a commenté le Mossad.

« L'affaire iranienne n'a pas d'impact direct sur la négociation mais elle mobilise l'attention et ne nous rend pas service », jugeait vendredi à La Tribune Dimanche l'ex-ambassadeur Daniel Shek au sein du Forum des familles d'otages. Commentant la déclaration « cryptique » du Qatar qui serait en train de « réévaluer son rôle » dans la négociation entre Israël et le Hamas, le diplomate estime toutefois peu probable que Doha veuille lâcher sa position de médiateur.

Pour autant, en cette période de vacances parlementaires, et alors que des négociateurs israéliens ont récemment accusé en prime time le Premier ministre, Benyamin Netanyahou, de bloquer toute avancée sur le dossier des otages, la frustration est à son comble. « On aurait pu croire que le retour des kidnappés était la priorité du gouvernement, or cela ne semble pas être le cas », nous confiait pour sa part ce week-end l'écrivain israélien Etgar Keret.

Figure du Forum des familles d'otages, Gil Dickmann, cousin de Carmel Gat, une ergothérapeute de 39 ans enlevée au Kibboutz Be'eri, estime que le pays doit choisir : « Soit on ouvre un nouveau front à Rafah au risque de mettre en danger les captifs, et l'on s'enfonce pendant des mois dans la boue de Gaza, soit on profite du soutien international conféré par l'attaque iranienne pour conclure un cessez-le-feu et récupérer nos proches vivants. C'est la seule chance de les sauver. »

La mobilisation pour éviter l'oubli des otages passe également par d'autres voies. Mercredi, le magazine Time a désigné l'Israélo-Américaine Rachel Goldberg-Polin, mère courage de Hersh, un jeune homme de 23 ans enlevé par le Hamas lors du festival Nova, comme l'une des 100 personnes les plus influentes au monde pour l'année 2024. Plus dramatique, ce même jour, les Israéliens découvraient avec effroi les images inédites et insoutenables du rapt de Yarden Bibas, originaire du kibboutz Nir Oz, montrant le père des plus jeunes otages israéliens, Kfir (1 an) et Ariel (4 ans), à son arrivée dans l'enclave, le visage ensanglanté et frappé par une dizaine de Gazaouis. Comme pour ajouter à la tragédie de cette famille, le 33e anniversaire de leur mère Shiri, également captive, coïncide cette année avec le jour de Pessah, la « fête de la liberté ».

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