Joe Biden replace le « America First » de Trump au centre de sa politique

« Les dollars que le gouvernement fédéral dépense (...) sont un outil puissant pour soutenir les travailleurs et les fabricants américains. Les marchés publics à eux seuls représentent près de 600 milliards de dollars de dépenses fédérales », jure-t-on déjà au sein de la nouvelle administration Biden.
(Crédits : JONATHAN ERNST)

Joe Biden va signer un décret lundi pour inciter le gouvernement fédéral à acheter davantage de biens et services auprès d'entreprises américaines, au risque de crisper certains partenaires commerciaux comme le Canada, ont annoncé des responsables de la nouvelle administration.

La loi existante, le "Buy American Act" de 1933, oblige déjà le gouvernement à passer des contrats avec des entreprises américaines lorsque cela est possible, mais il existe de nombreuses exceptions et opportunités de dérogation, ce que dénoncent depuis longtemps nombre de petites et moyennes entreprises.

Certains produits sont ainsi estampillés "Fabriqué aux Etats-Unis" bien qu'une majeure partie de leurs composants viennent d'ailleurs.

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Le protectionnisme reste ancré

Le nouveau décret, ont expliqué de hauts responsables de la Maison Blanche, vise à relancer la production nationale et à préserver les emplois industriels en augmentant "les investissements dans les industries manufacturières et dans les travailleurs afin de reconstruire mieux".

Le nouvel hôte de la Maison Blanche reprend ainsi une thématique chère à Donald Trump.

Cependant, les nouvelles dispositions pourraient irriter des alliés et partenaires stratégiques des Etats-Unis, tels que le Canada et les pays européens, qui estimaient déjà que les dispositions sur le "Buy America" empêchent leurs entreprises d'avoir accès à certains appels d'offre du gouvernement américain.

Joe Biden signale en outre qu'après quatre années d'une politique commerciale protectionniste de Donald Trump, l'heure n'est pas à la libéralisation tous azimuts.

Le ministre des Affaires étrangères canadien a déjà mis en garde Washington contre le "Buy American", selon des médias canadiens.


"Il est évident que si nous constatons que la politique +Buy America+ porte préjudice à notre commerce, nous le ferons savoir", a ainsi déclaré Marc Garneau sur CBC tout en soulignant que "le président Biden a indiqué qu'il était disposé à nous entendre chaque fois que nous aurions des inquiétudes".


Soutenir l'industrie américaine n'est pas une surprise, c'était même une promesse électorale de Joe Biden qui doit séduire l'électorat de base de son prédécesseur.

Moins d'une semaine après son investiture, Joe Biden continue ainsi à dérouler ses priorités avant même que son équipe gouvernementale ne soit en place.

Si Lloyd Austin, le ministre de la Défense, a été confirmé vendredi par le Sénat, les ministères-clés, comme celui des Affaires étrangères, attendent toujours leurs responsables.

Le vote sur la confirmation de Janet Yellen, la future ministre de l'Economie et des Finances qui doit piloter les projets économiques, dont le plan de sauvetage de 1.900 milliards de dollars pour sortir le pays de la crise, est néanmoins prévu ce lundi.

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Eviter une guerre commerciale ?

Le décret fait écho à des mesures que Donald Trump avait lui-même prises pour pousser l'Etat fédéral à acheter davantage de produits américains. Il avait alors fait des droits de douane une arme contre les importations, avec des résultats inégaux.

Au lieu d'une guerre commerciale, Joe Biden privilégie lui un durcissement des règles du "Buy American" et veut utiliser la force de frappe d'achat du gouvernement fédéral.

"Les dollars que le gouvernement fédéral dépense (...) sont un outil puissant pour soutenir les travailleurs et les fabricants américains. Les marchés publics à eux seuls représentent près de 600 milliards de dollars de dépenses fédérales", a détaillé un responsable de l'administration.

Renforcer la chaîne d'approvisionnement

Pendant la campagne électorale, Joe Biden avait promis de durcir le "Buy American" avec un plan à 400 milliards de dollars en faveur de projets utilisant des produits fabriqués aux Etats-Unis, notamment de l'acier ou des équipements de protection pour les personnels de santé luttant contre la pandémie de Covid-19.

Des entreprises ont toutefois déjà averti que des règles trop contraignantes risquaient de provoquer une envolée des coûts, ce qui compliquerait l'achat de pièces fabriquées hors des Etats-Unis.

Le décret doit également "être vu comme une partie seulement d'un engagement global de cette administration (...) à solidifier les chaînes d'approvisionnement", a précisé un des lieutenants de M. Biden.

Washington met en avant les pénuries provoquées par le Covid-19, qui ont montré les faiblesses du système, et explique vouloir éviter d'être "mis dans une position où nous dépendons de pays qui ne partagent pas nos intérêts pour livrer des matériaux essentiels".

Le nouveau président américain "reste déterminé à travailler avec les partenaires et alliés (des Etats-Unis) pour moderniser les règles du commerce international (...) afin que tous les pays puissent utiliser l'argent versé par les contribuables pour encourager les investissements dans leurs propres pays".

Une manière voilée de s'attaquer à la Chine dont les produits inondent le monde.

Lire aussi : Trump "a eu raison" d'être "plus ferme" face à la Chine, admet le secrétaire d'Etat de Biden

Commentaires 4
à écrit le 26/01/2021 à 11:12
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La relance c'est bien. Le nationalisme c'est pas mal, le protectionisme c'est nefaste et les guerres commerciales tuent l'emploi et le développement. L' émission à outrance des dollars va dopper l'économie mais contribuera à sa dévaluation et perte d...

à écrit le 26/01/2021 à 9:26
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Logique, il n'y a que les benêts qui pouvaient penser le contraire, mais des benêts au sein des dirigeants politiques et économiques européens on en a des milliers ! Les états unis ont bien joué d'ailleurs en laissant cette vieille oligarchie eur...

à écrit le 25/01/2021 à 18:47
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BuyZen protectionniste? Certainement pas pour les travailleurs américains en concurrence avec des travailleurs détachés (cf. visa H1B) venus d'Asie exploités dans l'économie pyramidale de la silicon valley où les dirigeants de prétendues startup de l...

à écrit le 25/01/2021 à 18:38
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Comme Obama et ces prédécesseurs. « America First », Trump n'a fait que l'affirmer clairement et l'activer plus fortement, mais souvent maladroitement.

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