L'Opep+ poursuit sa stratégie des petits pas

L'Organisation a décidé ce mercredi d'alimenter le marché mondial de pétrole de 400.000 barils par jour supplémentaires au mois de mars, alors que les cours du brut sont au plus haut depuis plus de 7 ans. Une hausse modeste, identique à celle appliquée ce mois-ci, qui traduit la prudence en attendant l'issue du dossier ukrainien dont l'un des protagonistes, la Russie, est un producteur majeur de brut.
Robert Jules
(Crédits : Reuters)

La réunion des 23 membres de l'Opep+ a été expédiée en un temps record. Moins de 20 minutes ont été suffisantes pour se mettre d'accord sur une hausse de 400.000 barils par jour en mars. Une hausse modeste alors que le prix du baril de Brent a dépassé à plusieurs reprises les 90 dollars ces derniers jours, évoluant à son plus haut niveau depuis 2014. Après la publication du communiqué, le cours du baril de Brent, référence européenne, était quasi stable (-0,15%) à 89,03 dollars tandis que celui de WTI, référence américaine, s'effritait de 0,40%, à 87,40 dollars.

Après l'augmentation de février, elle aussi de 400.000 barils par jour, l'Opep et ses alliés dont la Russie ont choisi la politique des petits pas pour répondre aux besoins d'or noir de la planète. Cet attentisme prudent répond à plusieurs objectifs.

Il y a d'abord l'impossibilité pour certains pays membres, notamment l'Angola et le Nigéria, d'atteindre leurs quotas respectifs actuels. Selon un rapport interne de l'Opep, cité par le Wall Street Journal, l'excédent d'approvisionnement mondial s'élèverait à 1,4 million de barils par jour au premier trimestre, et à 1,7 million de barils par jour au deuxième trimestre si le groupe continuait d'ajouter 400.000 barils par jour et si la consommation mondiale de brut augmente comme prévu. Or, pointe le rapport, l'OPEP+ a manqué de 824.000 barils par jour son objectif de production officiel. Ce manque ne peut cependant être compensé par d'autres pays producteurs au regard de l'accord signé qui stipule la nécessité de respecter strictement son quota.

Eviter un effondrement des cours

Par ailleurs, l'Opep+ veut éviter tout risque d'effondrement des cours à moyen terme, comme ce fut le cas avec le début de la pandémie, obligeant les pays producteurs et exportateurs à réduire leurs extractions et donc leurs revenus pour faire remonter progressivement des cours qui avaient chuté autour des 20 dollars en mars 2020.

Ce n'est qu'à la faveur d'une reprise des activités à travers le monde au printemps 2021 que les cours s'étaient franchement redressés pour répondre à une demande en forte hausse. Cette stratégie des petits pas a été mise sous pression lorsque l'administration Biden a exigé notamment à son allié saoudien, qui a fait la sourd oreille, de fournir un marché tendu qui s'est traduit par la mauvaise humeur des automobilistes américains à l'égard de l'hôte de la Maison-Blanche. Les Etats-Unis avaient dû puiser dans leurs stocks stratégiques pour calmer momentanément la hausse des cours.

Prime géopolitique

Mais les tensions géopolitiques plaident aussi en faveur de l'attentisme. Selon le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, l'invasion de l'Ukraine par les troupes russes est imminente. Dans ce cas, la sanction porterait sur les exportations d'hydrocarbures russes, le gaz naturel qui fournit déjà 40% des besoins européens ainsi que le pétrole dont 700.000 barils par jour alimentent le continent. Mais une telle décision aurait un effet boomerang en faisant flamber les prix du pétrole alors que les pays de l'OCDE subissent une inflation qui atteint un niveau historique.

Outre le dossier ukrainien, qui concerne un producteur majeur comme la Russie, les conséquences du conflit au Yémen à l'extérieur du pays n'est pas sans conséquence pour le marché pétrolier. Comme ce fut le cas pour l'Arabie saoudite, les récentes attaques de missiles aux Emirats arabes unis attribuées aux rebelles Houthis montrent la volonté de perturber la production d'un exportateur majeur d'or noir ayant des capacités de production de réserves.

En attendant de voir l'évolution de ces tensions géopolitiques, les membres de l'Opep+ profitent à la fois de parts de marché maximales et de cours élevés.

Lire aussi 2 mnPétrole : le cours du Brent passe les 90 dollars, au plus haut depuis 7 ans

Robert Jules
Commentaire 1
à écrit le 03/02/2022 à 8:21
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Cette tension diplomatique tombe à pic pour faire grimper le brut qui profite donc autant aux états unis qu'à la Russie. L’avantage c'est qu'on va vite finir par comprendre.

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