Loin d'être révolue, la globalisation change de rythme

Le ralentissement des échanges internationaux et les surprises politiques de 2016 laissaient à penser une fin rapide de la globalisation. Mais celle-ci est seulement en train de se stabiliser après une longue période de forte expansion.
Jean-Christophe Catalon
(Crédits : Reuters)

Entre le Brexit et l'élection de Donald Trump, l'idée que le protectionnisme allait faire son grand retour avait gagné les esprits à l'aube de l'année 2017, poussant des observateurs à annoncer la fin proche de la globalisation. L'éventualité, alors prise beaucoup plus au sérieux, d'une victoire du Front national en France n'arrangeait pas l'affaire.

Il faut dire que, à l'époque, les indicateurs donnaient des arguments à cette crainte. Le commerce mondial, freiné depuis la crise, enregistrait, entre début 2015 et l'automne 2016, l'une de ses plus mauvaises performances, avec des niveaux de croissance inférieurs à ceux du PIB mondial.

De la simple "phase de pause"...

Un an plus tard, force est de constater que la situation est loin d'être aussi alarmante. Les données disponibles pour 2017 montrent que les échanges de marchandises ont repris du poil de la bête en début d'année, le trafic de conteneurs ayant enregistré une croissance record de 5,2% en rythme annualisé pour le mois de février, selon l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Du reste, les projections attestent que 2017 devrait être un bon cru.

Les mauvaises performances enregistrées sur les deux années précédentes étaient en réalité « une phase de pause », résume l'économiste Sébastien Jean, directeur du Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii), dans L'Économie mondiale 2018 (éd. La Découverte).

Sur le plan des échanges financiers, un ralentissement a également été observé depuis la crise, mais il concerne principalement les « flux de capitaux volatils qui se sont considérablement réduits », a pointé Anton Brender, chef économiste de Candriam Investors Group. Depuis 2008, les banques européennes notamment se sont désengagées à l'international, mais les flux de capitaux des autres pays développés et des émergents sont restés stables.

Il ne faut pas s'y tromper : certes, les échanges commerciaux ont reçu un coup de fouet et la croissance mondiale repart, mais la situation d'avant-crise ne reviendra pas. Pendant près de quinze ans jusqu'en 2008, la croissance du commerce mondial était deux fois plus rapide que celle du PIB, un rythme qualifié « d'excessif » par Sébastien Jean, dans une interview pour la revue audiovisuelle Xerfi Canal. Depuis 2011, leurs taux de croissance respectifs progressent au même rythme, signe d'un retour à une situation « normale », selon le directeur du Cepii. Une analyse partagée par Anton Brender, pour qui le commerce international « se stabilise » mais ne chute pas.

... À un cycle de transformation

Ce changement de tempo s'explique par plusieurs facteurs. D'abord, la croissance du commerce mondial était en partie dopée par l'expansion de l'économie chinoise, devenue, en 2009, le premier pays exportateur du monde. Aujourd'hui, le géant asiatique est en transition vers une économie fondée non plus sur les échanges commerciaux, mais sur la consommation intérieure. De 35% en 2007, ses exportations ne représentaient plus que 26% de son PIB en 2015. Lorsque les échanges de « l'atelier du monde » baissent, il est logique que cela se répercute sur le reste du monde.

Par ailleurs, dans les années 1990 et 2000, le développement des échanges commerciaux résultait en grande partie des délocalisations. Des sociétés des pays avancées ont implanté leur chaîne de production en Asie notamment, augmentant les flux d'investissement étrangers, et les produits fabriqués ont été exportés vers les pays développés, dopant les flux de marchandises. Ce processus est désormais arrivé à son terme, et cela explique « la moitié du ralentissement » du commerce mondial, selon Sébastien Jean. Néanmoins, ce coup de frein n'implique pas un retour en arrière, les relocalisations étant encore loin d'être la règle.

Quid de l'impact des mesures protectionnistes que pourraient mettre en place les États-Unis ? Candidat, Donald Trump promettait de taxer à 45% les produits made in China, mais le discours changeant du président laisse planer le doute sur la mise en place d'une telle mesure. En outre, les règles du jeu ont changé, l'Amérique ne veut plus assumer le leadership et les émergents se sont fait une place dans le concert des puissances économiques. L'Inde devrait ainsi devenir la cinquième économie mondiale en 2018, devant la France et le RoyaumeUni. La globalisation se transforme, mais ne semble pas près de se terminer.

Jean-Christophe Catalon
Commentaires 5
à écrit le 20/01/2018 à 9:33
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"l'Amérique ne veut plus assumer le leadership": première nouvelle ! vous devez confondre avec : ne veulent plus qd ca les arrange

à écrit le 19/01/2018 à 8:52
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Non mais comment voulez vous que la globalisation disparaisse ? Cela n'est absolument pas possible, c'est même inenvisageable étant donné que le commerce est fondement de notre civilisation qui à toutes les époques a cherché à s'exporter. Heureus...

le 19/01/2018 à 16:17
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Moi je ne vous qualifierai pas de citoyen blasé mais de citoyen responsable tant vous le méritez en diffusant de telles analyses encourageantes et que je ne peux que cautionner .. Si le Frexit pouvait succéder au Brexit... ...

le 22/01/2018 à 10:29
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JE suis hélas d'accord et pourtant je peux vous garantir que l'europe des peuples j'y ai cru et j'y crois encore, c'est indispensable de nous unir citoyennement. Mais voilà ce sont les possédants qui ont fait cette europe et ils l'ont faite à l'e...

le 22/01/2018 à 10:30
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JE suis hélas d'accord et pourtant je peux vous garantir que l'europe des peuples j'y ai cru et j'y crois encore, c'est indispensable de nous unir citoyennement. Mais voilà ce sont les possédants qui ont fait cette europe et ils l'ont faite à l'e...

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