Macron en Chine, une tournée très lucrative ?

Emmanuel Macron a profité de sa visite officielle en Chine pour annoncer la signature de contrats et accords commerciaux entre les deux pays. Au-delà de l'exercice de communication, cette démarche vise surtout à réduire un déséquilibre commercial de la France qui présente son plus grand déficit chez cette puissance asiatique.
Grégoire Normand
Emmanuel Macron et son homologue chinois Xi Jinping après une conférence de presse ce mardi 9 janvier à Pékin.
Emmanuel Macron et son homologue chinois Xi Jinping après une conférence de presse ce mardi 9 janvier à Pékin. (Crédits : Reuters)

La diplomatie économique tourne à plein régime pour la présidence française. Après avoir défendu une nouvelle alliance entre la France, l'Europe et la Chine, Emmanuel Macron a consacré la deuxième journée de sa visite d'Etat aux dossiers économiques avec la signature de contrats dans plusieurs secteurs. La délégation française est arrivée en Chine avec une cinquantaine de chefs d'entreprises dont les dirigeants d'Areva, Airbus, Safran et d'EDF. Un des objectifs du déplacement est donc de favoriser les relations commerciales entre les deux puissances et réduire le déficit commercial de la France, point faible récurrent de l'économie française. Un but qui a suscité quelques réserves de la part d'ONG notamment, qui veulent rappeler les dérives autoritaires et policières d'un pouvoir adepte de la répression envers les opposants politiques.

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jack ma

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Plusieurs entrepreneurs chinois, dont Jack Ma le célèbre patron du géant du e-commerce Alibaba, sont venus écouter l'allocution du président français lors d'une conférence à Pékin ce mardi 9 janvier. Crédits Jason Lee/Reuters.

Favoriser le commerce de produits français en Chine

Dans un communiqué publié ce mardi, le spécialiste chinois du e-commerce JD.com a annoncé qu'il avait signé "un ambitieux contrat" avec Business France. L'entreprise asiatique a l'intention de vendre pour deux milliards d'euros de produits français dans les deux ans à venir. JD.com, à l'occasion de la visite officielle d'Emmanuel Macron en Chine, a également annoncé avoir signé un protocole d'accord avec Groupe Fives pour l'achat de 100 millions d'euros de machines et d'équipements "made in France" fournis par cette société d'ingénierie industrielle. La plateforme asiatique a précisé que le chef de l'Etat français avait rencontré son PDG Richard Liu pour évoquer d'autres opportunités pour les marques françaises en Chine.

Le luxe veut se placer

Le secteur du luxe veut également se renforcer sur le sol chinois. Saint Laurent, propriété du groupe Kering, a également annoncé lundi avoir signé un partenariat avec le géant chinois du e-commerce JD.Com, à l'heure où la vente en ligne en Chine devient un enjeu majeur pour les griffes de luxe. Saint-Laurent, devenue la seconde marque du groupe mondial de luxe devant Bottega Veneta, va ainsi être commercialisée sur Toplife, la plate-forme de JD.Com dédiée aux produits de luxe. "Toplife offrira aux consommateurs chinois l'ensemble de l'offre et de l'expérience de Saint Laurent", a indiqué la maison de prêt-à-porter dans un communiqué.

L'industrie n'est pas en reste. Paris et Pékin ont signé mardi "un mémorandum pour un accord commercial" sur la construction d'une usine de traitement des combustibles nucléaires usagés, un chantier colossal providentiel pour Areva, ex-fleuron français de l'atome civil rapporte l'AFP. "Cela représente un montant de 10 milliards d'euros immédiats, cela sauvera la filière", s'est félicité le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.

Encourager les investissements chinois en France

Si le gouvernement veut favoriser l'accès des produits français au marché chinois, il veut également inciter les investissements chinois en France,  "dès lors qu'ils sont créateurs d'emplois et de croissance pour nos pays et qu'ils s'inscrivent dans des partenariats équilibrés et de long-terme", selon l'Elysée. Ces investissements continuent d'augmenter (6 milliards d'euros fin 2016, en comptant ceux de Hong Kong) mais restent en deçà des investissements français en Chine (33 milliards d'euros).

Selon une récente note du service économique de l'ambassade de France en Chine, "les investissements chinois à l'étranger ont connu ces dernières années une progression fulgurante". Parmi les opérations récentes, on compte "la prise de participation de Jin Jiang au capital d'Accor, le rachat du groupe SMCP (Maje et Sandro) par Shandong Ruyi, le projet du groupe Wanda avec Auchan dans le parc EuropaCity et la décision de BYD de construire une usine d'assemblage de bus électriques près de Beauvais".

Ces différentes opérations de rachats et de prises de participation s'inscrivent dans une stratégie plus globale de conquête des marchés européens. "L'attrait d'un grand marché très bien connecté au reste de l'Europe reste une motivation essentielle pour de nombreuses entreprises, de même que le souhait d'acquérir des technologies avancées et des marques." rappellent les auteurs du document. Au total, les 700 filiales d'entreprises chinoises et hongkongaises établies en France emploient environ 45.000 personnes.

Des investissements français en baisse

Les entreprises françaises sont implantées en Chine depuis plusieurs décennies. En 2014 selon l'INSEE, plus de 1.800 entreprises françaises, essentiellement des grands groupes, étaient présentes en Chine, générant près de 64 milliards d'euros de chiffre d'affaires et près de 500.000 emplois. Malgré cette présence, les investissements français dans la puissance asiatique ont ralenti ces deux dernières années en raison de plusieurs facteurs. Le service économique de l'ambassade met en avant la perte de compétitivité de la France, la saturation de certains marchés et "la lassitude face aux difficultés du climat des affaires".

Rééquilibrer ses relations commerciales

Au delà de cet exercice de communication, l'exécutif français veut rééquilibrer ses relations commerciales avec la Chine, qui génère son plus gros déficit extérieur évalué à 30 milliards d'euros en 2016. D'après des propos rapportés par l'AFP, Jean-Yves Le Drian a rappelé la semaine dernière que "l'intention de la France n'est pas de barrer la route à la Chine [...] Mais il convient d'établir un partenariat fondé sur la réciprocité en matière d'ouverture des marchés. Nos interlocuteurs chinois préfèrent (la formule) gagnant-gagnant. Pourquoi pas ? A condition que ce ne soit pas le même qui soit deux fois gagnant".

En ce début de semaine, le chef d'Etat français n'a pas oublié de rappeler que la Chine allait complètement lever l'embargo sur la viande bovine française dans les six mois alors qu'elle l'imposait depuis 2001 à la suite de la crise de la vache folle. La délégation espérait également obtenir un meilleur accès aux marchés chinois pour ses autres produits agricoles comme la viande bovine, la volaille et les vins et spiritueux. A  l'heure où le déficit commercial français continue de se creuser d'après les derniers chiffres des douanes, toutes ces annonces vont-elles avoir avoir un réel impact sur les échanges commerciaux entre la France et la Chine ?

> Lire aussi : Climat : Macron joue les éclaireurs d'une alliance sino-européenne

statista exportations chine-france

(Un graphique de notre partenaire Statista)

Grégoire Normand
Commentaire 1
à écrit le 11/01/2018 à 11:18
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le voyage du Président US Trump aurait engagé la Chine à accorder 100 milliards de dollars en faveur des entreprises américaines .( d'après le service com de Trump ) ; celui du Président français se solde par des engagements bien plus modestes , qui...

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