C'est à nouveau à un véritable exercice d'équilibriste que s'est livré ce vendredi Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse à l'issue d'un sommet européen à Bruxelles.
« Nous reconnaissons totalement le droit et la volonté légitime de lutter contre le terrorisme. Nous sommes prêts à y apporter notre aide. Mais nous considérons que le blocus complet, le bombardement indifférencié et plus encore la perspective d'une opération massive terrestre ne sont pas de nature à protéger comme il se doit les populations civiles », a-t-il déclaré. « Une trêve humanitaire est aujourd'hui utile pour pouvoir protéger ceux qui sont sur le terrain, qui ont subi des bombardements .»
Le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez estime qu'il existe « un doute légitime » sur le respect par Israël du droit international
Il est allé au-delà de la déclaration commune des dirigeants des vingt-sept pays de l'Union européenne, qui après d'âpres tractations sémantiques avaient demandé des « pauses » pour faciliter l'aide humanitaire. Semblant déplorer ce « débat très long », Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité « d'une trêve humanitaire pour protéger les populations », négocier la libération des otages, « régler le problème des hôpitaux qui est très compliqué ». Selon le président français, la riposte israélienne doit « mieux cibler l'action utile contre les terroristes ».
« Il est indispensable que la distinction soit faite dès le début, très clairement, avec les populations civiles. Sinon, le risque est celui de l'embrasement, de la confusion des esprits. Et paradoxalement, je pense que c'est aussi très contreproductif pour la sécurité d'Israël », a-t-il plaidé. De son côté, le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a estimé vendredi qu'il existait « un doute légitime » sur le respect par Israël du droit international dans ses opérations militaires dans la bande de Gaza contre le mouvement palestinien Hamas.
L'ONU a affirmé dans le même temps que « beaucoup plus » de gens allaient « bientôt mourir » dans la bande de Gaza à cause du siège imposé par Israël. Pour la première fois depuis le début de la guerre le 7 octobre, une équipe de médecins du Comité International de la Croix-Rouge est entrée vendredi dans le territoire palestinien depuis l'Egypte, accompagnant un convoi humanitaire.
Le Haut-Commissariat des droits de l'homme de l'ONU évoque des « crimes de guerre »
Gaza a un besoin urgent d'aide humanitaire « significative et continue », a souligné Philippe Lazzarini, le directeur de l'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), confirmant la mort de 57 employés de l'agence depuis le début de la guerre. « Les services de base s'effondrent, les réserves de médicaments, de nourriture et d'eau s'épuisent, les égouts commencent à déborder dans les rues de Gaza », a-t-il décrit. Depuis le 21 octobre, 74 camions d'aide humanitaire sont arrivés depuis l'Egypte dans la bande de Gaza, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) jeudi soir, quand il en faudrait au moins cent par jour, selon l'ONU. « Ces quelques camions ne sont rien d'autre que des miettes qui ne feront aucune différence » pour la population, a lancé Philippe Lazzarini.
Le ministère de la Santé du Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, a affirmé que 7.326 personnes, en majorité des civils dont plus de 3.000 enfants, ont été tuées dans le territoire par les bombardements lancés par Israël en riposte à l'attaque la plus meurtrière de son histoire. Le Haut-Commissariat des droits de l'homme de l'ONU s'est par ailleurs dit vendredi « préoccupé » par le fait que des « crimes de guerre » aient été commis et le soient encore dans cette guerre, ajoutant « qu'aucun endroit n'est sûr à Gaza ».
Pour l'armée israélienne, le Hamas utilise les carburants des hôpitaux pour son infrastructure terroriste
« Il y a du carburant dans les hôpitaux et le Hamas l'utilise pour son infrastructure terroriste », a accusé vendredi le porte-parole de l'armée israélienne, Daniel Hagari. « Les terroristes se déplacent librement dans les hôpitaux du territoire palestinien », a-t-il ajouté, répétant l'accusation israélienne selon laquelle le Hamas utilise la population de Gaza comme « bouclier humain ». L'armée a aussi annoncé vendredi avoir mené contre le Hamas un nouveau « raid ciblé » avec des forces au sol appuyées par des avions de combat et des drones dans le centre de la bande de Gaza. Des images en noir et blanc publiées par l'armée ont montré une colonne de véhicules blindés alors qu'un épais nuage de fumée s'élevait dans le ciel après des frappes.
Elle mène ces incursions dans l'attente d'une probable offensive terrestre contre le Hamas, évoquée à de multiples reprises par les responsables politiques et militaires israéliens. La perspective d'une telle offensive dans ce territoire surpeuplé inquiète la communauté internationale et les appels demandant à Israël d'épargner les civils se multiplient.
(Avec AFP)