Qui veut sauver le soldat Biden ?

CHRONIQUE LE MONDE À L'ENDROIT — Dans son discours sur l’Etat de l’Union jeudi soir Joe Biden est enfin entré en campagne. Avec une énergie qu’il avait sans doute bien fait d’économiser car les six mois de combat qui s’annoncent face à Trump et Poutine seront des plus périlleux.
François Clemenceau
(Crédits : © DR)

Dès les premières secondes de son discours sur l'état de l'Union, jeudi soir, le dernier de son mandat, on s'y serait cru. 1941, Hitler en marche, la guerre qui fait rage en Europe, la référence à Roosevelt qui appelle le Congrès et le peuple américain à se réveiller, la liberté et la démocratie en péril à travers le monde. Oui, Joe Biden est octogénaire, mais encore plein d'énergie.

Allocution préparée pendant des journées entières

Suffisamment en tout cas pour avoir préparé cette allocution pendant des journées entières dans sa retraite de Camp David. Avec à ses côtés ses plumes habituelles, un coach pour son élocution - son bégaiement d'adolescent n'a jamais disparu -, mais surtout Jon Meacham, l'historien des présidences américaines. Joe Biden a 81 ans, il est né en 1942. À cette époque, le démocrate Franklin Roosevelt avait déjà été élu et deux fois réélu. Il prononça le premier discours sur l'état de l'Union de son quatrième mandat le 1er mars 1945 mais mourut le mois suivant d'une hémorragie cérébrale. Trois de ses quatre fils, qui servaient sous les drapeaux car les canons tonnaient encore en Europe et dans le Pacifique, ne purent assister à ses funérailles. Pour Biden, cette histoire est familière. Il sait en s'adressant aux chahuteurs du Freedom Caucus, les élus du bataillon trumpiste à la Chambre, qu'il mène son dernier combat.

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Trump comparé à Poutine

Quand il compare - sans le nommer - Donald Trump et sa relation indulgente avec Vladimir Poutine aux dirigeants qui tentèrent de calmer les appétits du Führer, il pèse ses mots : « C'est un outrage, c'est dangereux, c'est inacceptable. » Il lève les yeux vers les tribunes d'honneur où il a invité le Premier ministre de Suède, dont le pays, la veille, venait enfin d'entrer dans l'Otan après deux ans de chantage turc et hongrois. Trente-six ans au Sénat, dont dix à la Commission des affaires étrangères, ont fait de Joe Biden l'un des rares vétérans de la politique étrangère américaine. « L'Histoire nous juge », martèle-t-il face aux élus. Est-ce qu'inconsciemment Joe Biden se compare à Roosevelt ? N'est-il pas lui aussi, mais à sa façon, à l'aube de son quatrième mandat ? Ses huit ans  à la Maison-Blanche au côté de Barack Obama et les trois ans et demi qu'il vient d'y passer après avoir battu Donald Trump en 2020 font de lui (à l'instar du républicain George H.W. Bush, vice-président puis successeur de Ronald Reagan) l'un des très rares présidents américains à avoir tutoyé la grande histoire contemporaine sur la durée. La guerre froide, la détente, le 11-Septembre, les printemps arabes, l'ascension de Poutine et de Xi... Biden l'octogénaire porte en lui cette mémoire du chemin américain. Est-ce suffisant pour battre Donald Trump, surtout quand on sait qu'à peine 20 % des Américains regardent la grand- messe du discours sur l'état de l'Union à la télévision ?

Il est l'un des très rares présidents américains à avoir tutoyé la grande histoire contemporaine

Comme l'écrit pourtant Peter Baker, le chef du bureau du New York Times à la Maison-Blanche, « nous avons assisté à un spectacle extraordinaire, de ceux qui nous montrent comment Washington peut ciseler des discours destinés à rester dans les annales de l'Histoire ». Où est passé Sleepy Joe - Joe le Dormeur - comme le surnomme Trump ? « Non, ce n'était pas un vieux Joe mais un Joe vigoureux, en colère, capable de haus- ser le ton et de rentrer dans le match », ajoute Peter Baker.

L'anti-Trump par excellence

 « On m'a dit depuis le début de ma carrière politique que j'étais soit trop jeune soit trop vieux », a ironisé jeudi soir le président, en parvenant même à faire sourire de vieux routiers républicains du Sénat, tel Lindsey Graham, qui se verrait bien sur le ticket de Trump d'ici à la convention de Milwaukee, en juillet. Avec les mots-cartouches de son fusil de campagne, Joe Biden a visé treize fois son « prédécesseur » pour bien faire comprendre qu'il est l'anti-Trump par excellence. « En tentant de calmer la gauche de son parti, de séduire les électeurs de Nikki Haley et les indépendants, ces Américains fatigués par la violence de la polarité en politique, le tout sans paraître sénile, Biden a fait le job », analyse Laurence Nardon, la directrice du programme Amérique de l'Institut français des relations internationales (Ifri).

À Philadelphie (Pennsylvanie) dès vendredi, puis à Atlanta (Géorgie) hier, le président sortant s'est déjà mis en route dans ces swing states où il a arraché la victoire il y a quatre ans. Sur ce front-là, le soldat Biden, contrairement à son adversaire, ne cherche ni revanche ni vengeance mais veut maintenir le cap face au vent mauvais, qu'il vienne du camp adverse ou de Moscou, comme s'il s'agissait de la même colline où planter son drapeau.

François Clemenceau
Commentaires 5
à écrit le 10/03/2024 à 22:42
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Gros problème de taille pour Biden, la réserve d'électeurs Haley est essentiellement composée de démocrates radicalisés prêts à tout pour saboter la nomination de Trump à la tête du parti républicain. Par ailleurs, la candidature même de Haley i...

à écrit le 10/03/2024 à 11:02
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Biden est une marionnette bien usée, les ficelles peuvent lâchées à tout moment sans que l'on puisse connaitre le scénario que l'on imposera au public... le genre 911 par exemple !

à écrit le 10/03/2024 à 9:02
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Biden a fait un bon taf mais le monde a besoin encore une fois de Trump et de ses décisions tonitruantes qu'aucun analyste financier international n'a anticipé. "Pour gouverner il faut savoir cacher ses intentions" Nicolas Machiavel

le 10/03/2024 à 16:01
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si il faut changer ceux qui change de parole a chaque fois que le jour se leve il faut changer celui qui est en fonction en france si m biden est une reference d'autre son bien plus inquiétant pour le monde entier et de sur crois ceux qui se consi...

le 11/03/2024 à 8:27
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"si il faut changer ceux qui change de parole a chaque fois que le jour se leve il faut changer celui qui est en fonction en france" Sujet de cet article:"Qui veut sauver le soldat Biden ?" Ou aurais tu vu aperçu nuance !? ^^

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