Russie : Wagner met fin à sa révolte, quelles conséquences pour la milice privée et son chef ?

Les forces du groupe paramilitaire Wagner ont commencé à quitter leurs positions en Russie sur ordre de leur chef Evguéni Prigojine, qui a fait volte-face après avoir frontalement défié l'autorité du président russe Vladimir Poutine. Si les poursuites contre la milice privée sont officiellement abandonnées, cette crise ne sera pas sans conséquences pour Wagner, très présent au Moyen-Orient et en Afrique, et pour son chef, d'après les analystes.
Evguéni Prigojine, le chef du groupe paramilitaire russe Wagner.
Evguéni Prigojine, le chef du groupe paramilitaire russe Wagner. (Crédits : YULIA MOROZOVA)

[Article mis à jour à 17h36]

Une rébellion spectaculaire, mais de courte durée. Samedi soir, après une journée sidérante qui aura vu Evguéni Prigojine, le chef du groupe paramilitaire Wagner, défier ouvertement la Russie de Vladimir Poutine et promettre de libérer le peuple russe de son oligarchie corrompue, un accord a été trouvé, par l'intermédiaire de la Biélorussie, fidèle allié du Kremlin.

Evguéni Prigojine doit partir pour la Biélorussie et les poursuites contre lui seront abandonnées, a annoncé le Kremlin. On ignore dimanche où se trouve le tempétueux patron de Wagner, mais il a finalement fait machine arrière afin d'éviter de faire couler le « sang russe ». « Il y était de l'intérêt supérieur d'éviter un bain de sang », a déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov dans la soirée, saluant « une résolution sans nouvelles pertes » de la crise.

Les troupes de Wagner s'étaient approchées samedi à moins de 400 km de la capitale, après s'être notamment emparées dans la matinée du quartier général de l'armée russe à Rostov (sud-ouest), centre névralgique des opérations en Ukraine. Après avoir été acclamés par des dizaines d'habitants aux cris de "Wagner, Wagner!", ces combattants, avec leur chef à la tête du convoi, ont finalement quitté les lieux, a indiqué dans la nuit le gouverneur de la région.

Quelles conséquences pour Wagner et son chef ?

Aucun des combattants du groupe Wagner, qui joue un rôle clé aux côtés de l'armée russe en Ukraine, ne sera poursuivi pour le coup de force, selon le Kremlin. « Personne ne persécutera (les combattants), compte tenu de leurs mérites au front » ukrainien, a assuré Dmitri Peskov.

Mais pour un conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak, « Prigojine a humilié Poutine et l'Etat et a montré qu'il n'a plus de monopole de la violence ». Cette crise aussi extraordinaire que de courte durée ne sera pas sans conséquences pour Wagner et pour son chef, prédisent les analystes.

« Il faut qu'il y en ait. Sinon le message est qu'une force militaire peut ouvertement défier l'Etat, et d'autres doivent comprendre que l'Etat russe a effectivement le monopole de la violence à l'intérieur du pays », a tweeté Samuel Bendett, chercheur au Center for Naval Analyses.

« Poutine et les services de sécurité essaieront probablement d'affaiblir Wagner ou d'écarter Prigojine », a tweeté pour sa part Rob Lee, chercheur au Foreign Policy Research Institute aux Etats-Unis. Selon lui, « les effets les plus importants se feront ressentir au Moyen-Orient et en Afrique, où Wagner est très présent ».

La Russie a toutefois pu compter dimanche sur le soutien de Pékin. « En tant que voisin amical et partenaire stratégique, la Chine soutient la Russie dans ses efforts pour protéger la stabilité du pays », a déclaré le ministère chinois des Affaires étrangères, dans sa première réaction après la mutinerie que Pékin a qualifiée « d'affaire intérieure ».

Une folle journée de « guerre civile »

Si les termes de l'accord avec Wagner restent sujet à spéculations, le président Loukachenko, proche allié de M. Poutine, semble avoir joué un rôle-clé. Selon ses services, c'est lui qui a proposé au chef de Wagner de cesser sa progression en Russie.

« Nous sommes reconnaissants envers le président du Bélarus pour ces efforts », a salué le porte-parole du Kremlin. Les événements ont été suivis de près par les gouvernements occidentaux. Selon le Washington Post et le New York Times, les services de renseignement américains avaient prévenu la Maison Blanche de l'imminence d'une révolte de Wagner en Russie un jour avant qu'elle n'éclate.

Confronté à son plus grand défi depuis son arrivée au pouvoir fin 1999, le président Poutine a tenté de garder la main face à cette rébellion inédite, dénonçant une "trahison" et agitant le spectre d'une "guerre civile".

Le Kremlin a parallèlement mis en garde les pays occidentaux contre toute tentative de « profiter de la situation intérieure en Russie pour atteindre leurs objectifs russophobes ». La rébellion avortée de Wagner n'affectera « en aucun cas » l'offensive russe en Ukraine, a clamé son porte-parole dans la soirée.

Certaines mesures de sécurité exceptionnelles prises en Russie face à l'avancée de Wagner ont commencé à être levées, notamment dans la région de Lipetsk, au sud de Moscou, où avaient pénétré des paramilitaires. Le maire de Moscou avait appelé les habitants à limiter les déplacements en ville, qualifiant la situation de "difficile", et décrété lundi jour chômé.

« Coup de poignard »

L'heure semble donc désormais à un relatif apaisement entre M. Poutine et le chef de Wagner, après une journée de samedi ponctuée par de virulentes déclarations des deux hommes. Samedi matin dans une adresse à la nation, Vladimir Poutine, en complet noir, l'air grave et le ton martial, s'en était pris sans le nommer à l'homme qui ose le défier, accusant "les traîtres" et promettant de les "punir".

« C'est un coup de poignard dans le dos de notre pays et de notre peuple », avait déclaré M. Poutine. « Ce à quoi nous faisons face, ce n'est rien d'autre qu'une trahison. Une trahison provoquée par les ambitions démesurées et les intérêts personnels » de M. Prigojine.

Vladimir Poutine « se trompe profondément » et mes combattants ne se « rendront pas », avait rétorqué le chef de Wagner, qui critique depuis plusieurs mois la stratégie militaire russe en Ukraine. « Nous sommes des patriotes. Personne ne va se rendre à la demande du président, des services de sécurité ou de qui que ce soit », avait-il promis en s'en prenant pour la première fois directement au président russe.

Dans plusieurs messages audio vendredi, le patron de Wagner avait affirmé que des frappes russes avaient fait un « très grand nombre de victimes » dans ses rangs et avait accusé le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou d'en être responsable. Ces accusations « ne correspondent pas à la réalité et sont une provocation », a rétorqué le ministère de la Défense.

Commentaires 26
à écrit le 27/06/2023 à 20:19
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Je suis surpris que personne ne pense au fait que Wagner vient de réaliser un mouvement stratégique vers le Nord de l'Ukraine d’où il pourra lancer une offensive cet été, quand les marais seront asséchés, et protégé par le bouclier nucléaire Biélorus...

le 28/06/2023 à 10:09
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@Pator: Se discréditer au niveau mondial pour cacher un simple mouvement de troupes? a). L'état majeur ukrainien veille sur le nord. b). Les troupes russes sont déjà entré une fois par le nord en 2022. Ils sont repartis en laissant des colonnes de vé...

à écrit le 26/06/2023 à 18:03
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F Asselineau "Au total, Poutine semble surmonter cette mutinerie avec autant d'aisance et de rapidité qu'il a surmonté les 7 ou 8 cancers, la paranoïa et les maladies de Parkinson et d'Alzheimer que lui ont diagnostiqués les "experts" médicaux occid...

à écrit le 26/06/2023 à 11:28
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La voie est toute tracée pour le Ukrainiens pour filer à Moscou si quelques centaines de mercenaires peuvent faire 400km en 2 jours, sans rencontrer aucune résistance.🥰

le 26/06/2023 à 12:50
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@Valbel69: Une bonne remarque. La question qui se pose, c'est pourquoi cela n'a pas été encore fait cette année? Peut-être pas aller jusqu'à Moscou, mais une attaque massive sur les territoires russes près de la frontière et surtout le long de la fro...

le 27/06/2023 à 9:26
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L'armée russe n'a même pas tenté d'arrêter Wagner, ce qui ne serait pas le cas si les ukrainiens avait essayés d'en faire autant. La complicité de l'armée russe est évidente.

à écrit le 26/06/2023 à 11:22
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Ne nous laissons pas endormir et jaser sur cet épiphénomène. Pour nous, les démocraties, un seul objectif: Affaiblir au maximum la Russie jusqu'au démantèlement de la Fédération de Russie. Cela me semble en bonne voie, les Républiques fédérées perde...

le 26/06/2023 à 13:45
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En effet, il y bien une offensive en cours depuis 2014 afin d’affaiblir et, in fine, démanteler la Russie. La Russie fait ce qu’elle peut pour se défendre (comme on le voit actuellement en Ukraine) mais que peut-elle contre le rouleau compresseur oc...

le 26/06/2023 à 13:58
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@Julien B.: Donc, l'annexion de la Crimée et la guerre hybride menée par la Russie au Donbass, suivi par une occupation plus tard, c'est une offensive contre la Russie? Ah bon. Si un squatteur occupe une partie de votre maison et frappe vos proches, ...

à écrit le 26/06/2023 à 6:50
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Bonjour, Dans tous ses pays ons connaît la valeurs des engagemrnt politiques officiels.... Tous les leaders du groupe wager sont tres mal partis, beaucoup vons disparaître tres rapidement... Des vacances forcée en Sibérie, ils y a deja beaucoup d...

à écrit le 25/06/2023 à 23:32
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Les stratèges de café du commerce nous donnent leur version de la pantalonnade Prigogine, en étant confortablement installés devant leur clavier et répètent, en moins bien, ce qu'ils ont entendu sur LCI ou BFMTV ! :).

à écrit le 25/06/2023 à 22:50
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Beaucoup de lèche bottes poutinien ici. Profitez du temps qu'il lui reste car il n'en a probablement pas pour très longtemps. Quand un dictateur perd son autorité, tout s'écroule autour de lui.

à écrit le 25/06/2023 à 20:04
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Il n'aura aucune poursuite, il va juste tombér dans les escaliers rapidement ou etre arrête rapidement pour un motif idiot avant d'être extradé, de subir la justice tolérante car stalinienne de ka clé subir, et finir avec navalny, ses hommes iront...

à écrit le 25/06/2023 à 19:42
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Prigo est écarté, ça n' est pas plus compliqué que cela, même les gamelins de plateaux télé commencent à comprendre que le pétard mouillé a foiré!..

à écrit le 25/06/2023 à 18:57
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Et pourquoi pas une fausse mutinerie pour faire parler de la Russie ? Rien n’est à exclure mais que ce soit une fausse ou une vraie mutinerie avortée en tous cas une chose est sûre, l’on parle de la Russie même si l'on ne sait pas vraiment pourquoi p...

à écrit le 25/06/2023 à 18:40
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Si Prigojine est réellement en disgrâce, il sera éliminé rapidement. Si toutefois il y a un énorme jeu de théatre dans ce psychodrame, il pourra toujours "soutenir le moral" de Loukachenko, voir le suppléer, si celui-ci se mettait à avoir des états d...

le 25/06/2023 à 19:20
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Mon analyse personnelles est que les oligarques militaires russes ont monté Wagner contre Poutine, tentant ainsi de faire éliminer leur président encombrant par cet intermédiaire. Il y a certaines similitudes avec la chute de l'union soviétique. Nous...

à écrit le 25/06/2023 à 15:52
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Honnêtement, les conséquences pour Wagner sont moins intéressantes que celles à longue terme pour la Russie et le Kremlin. Il a été prouvé expérimentalement que quelques régiments d'infanterie pouvaient traverser toute la Russie européenne sans renco...

à écrit le 25/06/2023 à 14:45
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Et voilà les médias mensonges continuent dans leur délire ,comme si le mendiant des armes n'est pas de l'Ukraine mais de ses phobies d'oligarchiques et de trafiquants d'armes .

à écrit le 25/06/2023 à 12:59
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Puisque nous descendons dans l'arène politique au lieu de se contenter de considérations économiques, je signale simplement que la Russie, elle au moins, se fait l'économie d'une guerre civile. On n'en respire que mieux.

à écrit le 25/06/2023 à 11:03
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"C'est la fin de Poutine" "Poutine est nul" voilà ce que l'on entend partout et tout le temps dans tous les médias de masse, on se demande comment on peut être payé aussi cher et souvent avec l'argent public pour répéter inlassablement les mêmes truc...

le 25/06/2023 à 15:23
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@Dossier 51: Poutine est nul, c'est un constat. Une fois de plus, il a montré sa lâcheté. Vos reproches aux média sont incompréhensibles. Ils ont dû faire quoi pour éviter vos reproches? Ne pas parlez de la mutinerie et proclamer la gloire au Poutine...

le 26/06/2023 à 7:36
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" Vos reproches aux média sont incompréhensibles" Dis moi ça va c'est pas trop dure de défendre la pensée générale imposée ? "Ne pas parlez de la mutinerie et proclamer la gloire au Poutine ?" "Échelle de mesure pour tous les jours, nous nous tromper...

le 26/06/2023 à 9:14
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@Dossier 51: Dites-moi en quoi un constat des événements (ce que j'ai vu dans les média français à propos de la mutinerie, c''était juste un constat, même pas très différent des média russes) s'appelle la pensée générale imposée et cela svp sans cach...

le 26/06/2023 à 11:03
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Tu défends ton camp, je défends l'esprit et tu veux à tout prix t'imposer alors que tu joues au foot et moi au rugby. Aliénant. Et si je peux pas répondre au gars qui me dit de répondre et-c...

à écrit le 25/06/2023 à 10:13
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Dans ce journal, on ne peut parler que de conséquences économiques, n'est ce pas ? ;-)

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