François-Xavier Bellamy défend « une droite paisible qui s’assume »

En meeting à Aubervilliers, la tête de liste LR a renvoyé dos à dos la Macronie et le RN, dans une tentative de desserrer l’étau qui bloque son camp autour des 7 % d’intentions de vote.
Jules Pecnard
François-Xavier Bellamy, quelques minutes avant d’entrer en scène, hier à Aubervilliers.
François-Xavier Bellamy, quelques minutes avant d’entrer en scène, hier à Aubervilliers. (Crédits : © LTD / Raphael Lafargue/ABACAPRESS.COM)

Ce fut bref, mais l'idée a traversé l'esprit de François-Xavier Bellamy. Fallait-il s'inspirer du célèbre discours prononcé par Philippe Séguin à Bondy durant la campagne présidentielle de 1995 ? Celui où le tempétueux gaulliste, moquant la domination médiatique d'Édouard Balladur sur Jacques Chirac, a fustigé une élection « finie avant même d'avoir commencé » ? La tête de liste Les Républicains (LR) pour les européennes du 9 juin a beau admirer Philippe Séguin, il sait que cette saillie est devenue la ritournelle des candidats en mauvaise posture, menacés d'insignifiance.

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Pour son premier meeting de campagne, qui s'est tenu hier aux Docks de Paris, François-Xavier Bellamy a dû trouver autre chose. La situation critique de LR condamne la droite, sinon à innover, du moins à se démarquer. Bloqué autour des 7% dans les sondages, le mouvement d'Éric Ciotti a moins de quatre-vingts jours pour trouver du souffle, distancer Reconquête et séduire suffisamment de Français pour ne pas disparaître du Parlement européen.

Objectif : réintroduire du clivage gauche-droite

Après avoir zigzagué dans ses choix stratégiques, s'adressant tantôt aux électeurs macronistes déçus, tantôt à ceux qui ont voté pour Éric Zemmour en 2022, il s'est assigné un nouvel objectif : réintroduire du clivage gauche-droite pour desserrer l'étau qui l'asphyxie. Avec, toujours, cet attachement au label « parti de gouvernement », pourtant de plus en plus décalé par rapport au réel.

La désignation comme troisième de liste du général Christophe Gomart, ex-directeur du renseignement militaire, s'inscrit dans cette logique. Lui et François-Xavier Bellamy se connaissent depuis plus de dix ans, mais son nom - qui circulait déjà chez LR pour les dernières législatives - n'a émergé dans les discussions internes qu'à partir de février. « J'ai un ou deux profils originaux en tête », disait alors le Versaillais en privé. Le gradé s'ajoute à l'agricultrice Céline Imart qui, comme son colistier, a pris le pupitre quelques minutes à Aubervilliers. Mettre en avant les deux recrues, encore en rodage, était un des enjeux de l'événement.

Les jours précédant le raout, plusieurs cadres LR soulignaient - sous couvert d'anonymat, certains craignant le faux pas qui les priverait d'une place éligible sur la liste - le besoin de leur tête d'affiche de dégainer une proposition ou un « angle » nouveau. « Il faut qu'on prenne des risques sans négliger le facteur "bon élève" de Bellamy », indiquait récemment un pilier de la campagne. Dans son discours, l'eurodéputé a joué la carte de « la droite paisible qui s'assume » et qui dénonce le « spectacle » du duel Macron-Le Pen, reproduit ad nauseam depuis 2017.

« Non-régression économique »

Pour parler à la droite libérale, François-Xavier Bellamy - et, dans un registre plus classique, Éric Ciotti avant lui - a raillé l'incapacité du gouvernement à maîtriser la dette publique. Pour parler à la droite réactionnaire, l'intellectuel a évoqué la lutte antidrogue et la protection des frontières contre le terrorisme islamiste. De vieux tubes auxquels s'est ajouté le concept productiviste de « non-régression économique », sorte de miroir du principe qui prévaut dans notre droit en matière environnementale.

Ce nouveau cheval de bataille ressemble furieusement à celui du Rassemblement national contre l'« écologie punitive ». Suffira-t-il à faire renaître un duel avec la gauche non mélenchoniste ? Les LR le savent, Jordan Bardella est trop haut dans les intentions de vote pour que la donne change au cours du printemps. François-Xavier Bellamy se réjouit donc d'avoir pu caler, le 14 avril, un débat sur BFMTV avec Raphaël Glucksmann, son concurrent soutenu par le Parti socialiste. « Il faut revenir à la réalité des enjeux, confiait l'élu conservateur à La Tribune Dimanche juste avant le meeting. On ne va pas passer la campagne à parler de Daladier et Chamberlain. » La pique vise le discours de lancement de Valérie Hayer, tête de liste Renaissance, et la stratégie macroniste consistant à polariser autour du conflit russo-ukrainien.

Xavier Bertrand « veut assister au discours de Bellamy mais pas à celui de Ciotti », raillait un poids lourd samedi matin

Un autre enjeu du meeting d'Aubervilliers, où la droite a trimé pour rassembler 3 500 militants, relevait de la pure tambouille interne : réunir dans un même lieu les principaux ténors des Républicains. Il y avait là les habitués, comme Gérard Larcher, président du Sénat, ou Olivier Marleix, patron des députés LR à l'Assemblée nationale, mais aussi Laurent Wauquiez, candidat virtuel du parti à la prochaine présidentielle, ainsi que ses potentiels rivaux David Lisnard et Xavier Bertrand. Ce dernier a confirmé sa présence assez tardivement aux équipes de François-Xavier Bellamy, allant jusqu'à demander des précisions sur l'heure de passage du candidat sur l'estrade. « Il veut assister au discours de Bellamy mais pas à celui de Ciotti », raillait un poids lourd samedi matin. À droite, l'entente cordiale a toujours ses limites.

Jules Pecnard
Commentaire 1
à écrit le 24/03/2024 à 10:15
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La droite a tué la notion travail, elle s'est suicidée à cause d'intérêts bassement financiers. Honte sur vous, on attend beaucoup trop de vous qui visiblement pouvez tellement peu. Nos dirigeants et leurs opposants sont faibles.

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