Le dilemme de Raphaël Glucksmann

Tête de liste du PS en 2019, le philosophe entend rempiler. Très critique envers la Nupes, il est également courtisé par les radicaux de gauche.
Raphaël Glucksmann
au meeting
du parti Place publique pour les européennes, le 8 octobre
à Paris.
Raphaël Glucksmann au meeting du parti Place publique pour les européennes, le 8 octobre à Paris. (Crédits : NICOLAS LIPONNE/HANS LUCAS)

Il voulait laisser aux socialistes « leur propre agenda et leur propre tempo ». Sauf que le tempo s'accélère. Candidat pour être la tête de liste du Parti socialiste (PS) aux élections européennes de 2024, Raphaël Glucksmann va être confronté à un dilemme. Depuis deux semaines, la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) est ébranlée par ses différends idéologiques sur les actes terroristes du Hamas. Procureur obstiné de Jean-Luc Mélenchon, l'eurodéputé a publiquement tancé ce dernier sur X (anciennement Twitter) en lui adressant cette mise en garde : « Nous avons une boussole, nous. Vous n'impressionnez plus personne et rdv aux européennes en effet. »

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Oui, mais avec qui ? Sur le papier, Raphaël Glucksmann a des cartes en main pour être de nouveau sur le bulletin socialiste en juin prochain. Sa constance au sujet de l'alliance avec La France insoumise (LFI), néfaste à ses yeux, plaide en sa faveur vis-à-vis d'un PS affichant désormais son désir de rupture avec les mélenchonistes. Idem pour les sondages : dans l'enquête Ifop pour Le Figaro publiée le 17 octobre, l'intellectuel social-démocrate est crédité de 9 % des suffrages, à égalité avec l'Insoumise Manon Aubry. En 2019, les deux ont péniblement dépassé les 6 %. Autrement dit, pour 2024, le ticket Glucksmann-PS a une meilleure cote.

La situation n'est pas dénouée pour autant. Malgré l'ampleur des réprobations contre Jean-Luc Mélenchon, plusieurs cadres socialistes - y compris dans l'entourage du premier secrétaire, Olivier Faure - ne sont pas enthousiastes à l'idée de reconduire Raphaël Glucksmann. Même si les composantes de la Nupes partent en ordre dispersé aux européennes, les fauristes veulent conserver le vernis de l'union, seule voie de survie d'ici à 2027 selon eux. Or le cofondateur de Place publique, mouvement partenaire du PS en 2019, ne se soucie pas de ces considérations boutiquières.

"Le phénomène naturel, c'est de discuter avec mes partenaires socialistes"

Raphaël Glucksmann

Et puis, il y a un invité surprise : le Parti radical de gauche (PRG) entend présenter sa propre liste, une première depuis trente ans. Pour la chapeauter, le président du PRG, Guillaume Lacroix, sollicite... Raphaël Glucksmann, puisqu'il défend une ligne proeuropéenne, humaniste et universaliste. Interrogé par La Tribune Dimanche, l'essayiste affirme ne pas être au courant de l'offre. Guillaume Lacroix entend la rendre séduisante en évoquant « une liste à la Bernard Tapie », allusion au succès inattendu de l'homme d'affaires aux européennes de 1994. L'intéressé répond : « Le phénomène naturel, c'est de discuter avec mes partenaires socialistes. »

La garde rapprochée d'Olivier Faure, elle, temporise. « Avant que la tête de liste soit désignée, il y a des procédures, un minimum de discussions à avoir », rappelle l'ex-député Laurent Baumel. Aucun calendrier n'est fixé, aucune négociation n'a eu lieu. Le PS se réserve le droit, si d'aventure Glucksmann s'obstine à admonester les membres de la Nupes, de se choisir un autre candidat. Le nom de Pierre Jouvet, secrétaire national du parti chargé des élections, est cité. Et si l'intellectuel file au PRG ? « Je ne vois pas l'espace face à une liste PS, minimise un dirigeant socialiste. Je pense que Raphaël n'a pas envie de ça et qu'il n'a pas vocation à mener une liste de témoignage. »

Par ailleurs, portés par la vague anti-Mélenchon, les socialistes hostiles à la Nupes se comptent. Les partisans de Bernard Cazeneuve, Carole Delga, Nicolas Mayer-Rossignol, Anne Hidalgo... ainsi que l'ancienne garde rapprochée de François Hollande, qui ne manque rien des manœuvres en cours, cherchent un débouché commun au-delà de leur effroi anti-LFI. Pour ces orphelins de la social-démocratie, une candidature Glucksmann sous le label PRG serait la bienvenue. Un rayon de lumière après de longs mois au purgatoire de la politique. ■

Commentaires 3
à écrit le 22/10/2023 à 10:13
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Les intellos ont tué l'idéologie de gauche.

le 22/10/2023 à 11:28
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Ce qu'on appelle au départ la gauche est en fait l'aile gauche de la bourgeoisie, qui s'était déchirée pendant l'affaire Dreyfus et ce n'est qu'à partir de ce moment qu'on a commencé à parler de gauche et de droite... Et au début de l'affaire, le mon...

le 22/10/2023 à 12:01
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Les souris votent pour les chats.

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