Le projet de loi secret d'Emmanuel Macron pour inscrire le droit à l'IVG dans la constitution

Le chef de l’État va déposer dès cette semaine au Conseil d’État un texte qui vise à garantir la liberté des femmes à avoir recours à l’avortement.
Le 2 juillet 2022, dans plusieurs villes de France, quelques milliers de personnes se sont mobilisées pour défendre le droit à l'interruption de grossesse.
Le 2 juillet 2022, dans plusieurs villes de France, quelques milliers de personnes se sont mobilisées pour défendre le droit à l'interruption de grossesse. (Crédits : ⓒ Xose Bouzas / Hans Lucas)

L'alinéa est déjà écrit. Selon nos informations, Emmanuel Macron va déposer un projet de loi constitutionnel au Conseil d'État en début de semaine. Il s'agit d'inscrire l'interruption volontaire de grossesse dans le texte de 1958, comme il l'avait annoncé le 8 mars lors de l'hommage rendu à l'avocate Gisèle Halimi. À l'article 34 de la Constitution, il sera ajouté : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de la femme, qui lui est garantie, d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse. »

Sujet sensible

Une manière de sécuriser un droit qui, s'il n'est pas menacé en France, subit de sérieux coups de boutoir dans de nombreux pays. Le sujet semble à Emmanuel Macron assez mûr alors qu'une proposition de loi en ce sens a été votée à l'Assemblée en novembre 2022 et qu'un autre texte a également été voté au Sénat en février. C'est d'ailleurs cette digestion par les deux chambres, et en particulier par le Palais du Luxembourg, qui l'a convaincu d'avancer sur la question. Mais sans vouloir pour autant prendre le risque de laisser le processus parlementaire de révision constitutionnelle aller à son terme. Car si un tel texte était voté dans les mêmes termes par les deux assemblées, cela déboucherait inéluctablement sur un référendum.

Pour ou contre l'inscription de l'IVG dans la Constitution ? Rien de mieux pour ressusciter un débat type « mariage pour tous » avec l'obligation de laisser, dans la France de 2023, au camp du « non » autant de temps de parole qu'au camp du « oui ». L'hypothèse a été écartée. En revanche, les sénatoriales passées, le champ semble libre. Le chef de l'État avait d'ailleurs annoncé son intention dans son discours de célébration du 65e anniversaire de la Constitution de la Ve République le 4 octobre. Il avait expliqué être favorable à ce que ce chantier aboutisse « dès que possible » en « rapprochant les points de vue » entre Assemblée et Sénat.

Lire aussiRévocation du droit à l'avortement : pour les États-Unis, une décision aux graves conséquences sociales et économiques

Niche parlementaire de LFI

À cela s'est ajouté un caractère d'urgence : la niche parlementaire de La France insoumise à l'Assemblée est programmée le 30 novembre. Mathilde Panot, présidente du groupe LFI, envisageait d'y reprendre le texte du Sénat ; de quoi, en cas de vote conforme à l'Assemblée, ouvrir la porte à un référendum.

« Nous n'accepterons d'enlever le texte de notre niche parlementaire que si le gouvernement a déposé un texte ad hoc, réservé à cette question », a-t-elle fait valoir.

La menace a visiblement été entendue jusqu'au plus haut sommet de l'État. Ce sera bien une révision constitutionnelle spécifique. Des échanges ont déjà eu lieu à ce sujet avec de nombreux parlementaires de la majorité. Après avoir été présenté en Conseil des ministres, d'ici quelques semaines, le projet de loi devrait arriver devant le Congrès au printemps. La rédaction du nouvel alinéa a été soigneusement soupesée. Il met en avant la « liberté » des femmes alors que la gauche revendiquait un « droit ». Mais en ajoutant une « garantie » à l'accès à l'avortement, Emmanuel Macron espère visiblement réunir au moins trois parlementaires sur cinq et réviser la Constitution pour la première fois depuis 2017.

ALINÉA À L'ARTICLE 34 DE LA CONSTITUTION

« La loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de la femme, qui lui est garantie, d'avoir recours à une interruption volontaire de grossesse »

Le droit des femmes à disposer de leur corps en 8 dates

1971 Le « manifeste des 343 salopes », appelant à une législation sur l'avortement, est publié dans « Le Nouvel Observateur ».

1975 Entrée en vigueur de la loi dépénalisant le recours à l'IVG, promise par Valéry Giscard d'Estaing et portée par la ministre de la Santé, Simone Veil.

1982 Adoption de la loi Roudy, qui prévoit le remboursement de l'IVG par l'Assurance maladie.

1993 La loi Neiertz crée le délit d'entrave à l'IVG.

2001 Allongement du délai légal pour avorter, qui passe de dix à douze semaines de grossesse.

2014 La loi Vallaud-Belkacem supprime la condition de détresse avérée qu'exigeait la loi Veil pour ouvrir un droit à l'IVG.

2016 Extension du délit d'entrave à l'IVG aux plateformes numériques.

2022 Le délai légal pour avorter passe de douze à quatorze semaines de grossesse.

Commentaires 15
à écrit le 30/10/2023 à 9:31
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L'homme piégé devrait avoir le droit d'exiger l'IVG lui aussi a son ex compagne d'un seul soir ou séparé. Un enfant désiré vaut mieux qu'un enfant humilié, instrumentalisé comme un jouet, qui grandit dans le conflit et la haine! Se qui conduit a des ...

le 30/10/2023 à 9:36
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Non il faut un permis pour faire des enfants, des mégas riches aux plus pauvres, aucun passe droit sinon cela n'a aucun intérêt comme tout ce qui comporte des passes droits, afin de déceler ceux qui en veulent et ceux qui ne se reproduisent que par m...

le 30/10/2023 à 18:17
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"père involontaire " la bonne blague ! assumez vos responsabilités , prenez vos précautions et pendant que vous y êtes que faites vous avec les mst ?

à écrit le 30/10/2023 à 9:23
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L'IVG doit être un droit garanti certes, surtout au vue des dernières affaires sur les journaux internationaux. Mais il faut arrêter l'hyper-assistanat et ré-apprendre aux citoyens a se moraliser. La contraception existe sous différentes formes. Tant...

à écrit le 30/10/2023 à 7:43
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Le rôle d'une Constitution est d'organiser le fonctionnement du pouvoir politique d'un pays (Assemblées, prérogatives du gouvernement et du Président, vacance ou destitution du Président, motion de censure, ...etc...) . Inscrire l'IVG dans la Consti...

à écrit le 29/10/2023 à 18:26
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« Liberté, Égalité, Fraternité, IVG »

à écrit le 29/10/2023 à 15:06
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C'est une diversion. Quand on est nuls on cherche des symboles. Mais je suis favorable si on met aussi dans la constitution que, si dans une législature on ne baisse pas les coûts administratifs, tous les élus et haut fonctionnaires qui étaient en...

à écrit le 29/10/2023 à 9:19
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Bonjour, je suis pour le maintient de l'IVG pour les femmes dans notre pays .. Mais je refuse que les touche a tous du gouvernement modifier la constitution française... Surtout que je n'ai aucune confiance en Mr macron... Hypocrite, manipulateur,...

à écrit le 29/10/2023 à 9:17
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Nous sommes en France, je ne vois pas l'intérêt c'est exposer une faiblesse tandis que le droit à l'avortement porte bien son nom, nous sommes évolués nous autres français nous savons que c'est d"une logique implacable qu'une femme aie le droit ou no...

à écrit le 29/10/2023 à 9:04
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Et bien sûr, tout cela pour obtenir un "oui" à un référendum ! Et comme toujours, à vouloir travailler sur les conséquences, bien plus rémunératrice !

à écrit le 29/10/2023 à 9:00
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Ca n´a aucun sens de mettre le droit à l´avortement dans la constitution (donc pourquoi pas le droit à l´adoption ? ou le droit de chasser ? ou de porter un chapeau ? etc.), et en cas de changement d´avis de l´opinion publique, ça n´empêchera pas sa ...

à écrit le 29/10/2023 à 0:17
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Ce ne serait que justice pour faire taire DE-FI-NI-TI-VE-MENT tous les intégristes religieux ( enfin...pseudo religieux pour qui l'amour du prochain devrait être en accord avec la compassion prônée par toutes les religions). Les religions le MAL abs...

le 29/10/2023 à 6:58
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Les religions n'ont rien à voir là-dedans; de plus il y en a toujours eu. L'avortement éventuel relève de la responsabilité de chaque femme, dans sa vie privée. La constitution ne doit pas devenir un fourre-tout ni un catalogue du bien et du mal, sou...

le 29/10/2023 à 10:30
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"Les religions n'ont rien à voir là-dedans" Faudra le dire aux femmes polonaises en ce moment. "de plus il y en a toujours eu" Effectivement,il a été retrouvé au fin fond de la Turquie le site de Göbekli Tepe avec un temple vieux de plus de .....

à écrit le 29/10/2023 à 0:11
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Il vaudrait mieux légiférer pour que les femmes soient enfin propriétaires de leur corps et de ce qu'elles enfantent; jusqu'à présent, l'enfant est propriété de la République, après l'avoir été du Pater Familias. Nous sommes au Pays des Droits de l'H...

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