Remaniement : le souffle coupé des Républicains

Rare personnalité LR à encore truster le haut des baromètres de popularité, Rachida Dati a quitté une famille politique qu’elle côtoyait depuis plus de vingt ans. Cette défection réduit un peu plus le spectre du parti.
Jules Pecnard
Éric Ciotti, jeudi à Nice, annonce l’exclusion du parti de Rachida Dati après sa nomination au gouvernement.
Éric Ciotti, jeudi à Nice, annonce l’exclusion du parti de Rachida Dati après sa nomination au gouvernement. (Crédits : © SYSPEO/SIPA)

Éric Ciotti s'épanche peu sur ses sentiments. Lorsqu'il évoque, ce jeudi 11 janvier, le départ de Rachida Dati des Républicains (LR) auprès de Roger Karoutchi, il s'en tient à une économie de mots. « Elle est passée de l'autre côté de la ligne... » L'ancienne garde des Sceaux de Nicolas Sarkozy, nommée ministre de la Culture par Emmanuel Macron, est une amie de vingt ans du député des Alpes-Maritimes. Le même jour, à 18 h 30, il doit prononcer ses vœux à la ville de Nice, qu'il veut arracher au macroniste Christian Estrosi en 2026. En politique, quand on est affaibli, on ne choisit pas ses timings.

Lire aussiQui sera la tête de liste de la majorité présidentielle aux élections européennes ?

Quelques heures avant, Éric Ciotti voit enfler la rumeur sur Rachida Dati. La dernière vedette de LR, partante pour un maroquin et un deal à Paris ? Il peine à y croire, lui qui en a fait son numéro trois au parti. Inquiet, le Sudiste envoie un petit mot sur WhatsApp. Elle le laisse sans réponse : la maire du 7e arrondissement de Paris est en discussion avec Nicolas Sarkozy. L'ex-chef de l'État l'encourage à saisir l'offre de son successeur. Dans la foulée, Rachida Dati rappelle Éric Ciotti et le met devant le fait accompli. Le choc est rude, le patron de LR encaisse. Avant de rejoindre son pupitre face à 1 850 militants, il fait part de la nouvelle à Michèle Tabarot, venue assister à son raout local. La présidente de la commission nationale d'investiture du parti éprouve de la peine pour le Niçois mais conserve son amitié pour Rachida Dati.

« C'est d'autant plus un électrochoc qu'on était sur une bonne séquence », constate l'élue du Cannet, faisant référence à l'adoption par le Parlement d'une loi sur l'immigration conforme aux souhaits de LR. L'euphorie passagère a-t-elle fait oublier à Éric Ciotti les signes avant-coureurs du drame qui le percute de plein fouet ? Depuis 2017, la droite ne vit que de déjà-vu. Avant chaque scrutin, elle est à la merci des coups de boutoir de la Macronie. En amont des régionales de 2021, Christian Jacob a subi la défection de Renaud Muselier, son vieux copain chiraquien passé sous bannière La République en marche (devenu Renaissance) en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Cette semaine, Éric Ciotti a vécu un traumatisme analogue en voyant partir une figure qui, avec lui, a porté l'épopée sarkozienne.

« Ça nous ringardise »

Rachida Dati est, aussi, l'une des personnalités les plus imprévisibles - et les plus craintes - encore sur le marché. « Le lundi, elle vous dit blanc ; le mardi, elle peut vous dire noir », peste une figure de la droite francilienne qui la connaît bien. En 2023, l'ex-candidate à la mairie de Paris a adressé son lot de mises en garde à son chef de parti. Sur France Culture, en pleine bataille des retraites, elle a déclaré que son camp devait voir « avec le président Macron comment on a un accord politique ». Le 14 novembre, juste avant l'examen de la loi immigration, elle s'est fait à peine prier par le plateau de l'émission Quotidien pour affirmer qu'Éric Ciotti manquait de poigne face aux fortes têtes de LR. Le surlendemain, elle l'a invité à déjeuner à sa mairie du 7e arrondissement, pour le rassurer. Dans l'entourage du député des Alpes-Maritimes, on relativise : « En politique, tu es obligé de faire confiance. »

À cinq mois des européennes, cette confiance coûte. Après les 8,48 % de François-Xavier Bellamy en 2019, les 4,78 % de Valérie Pécresse en 2022 et les 62 députés repêchés aux législatives, la droite jouera son maintien en Ligue 2 le 9 juin prochain. En deçà de la barre des 5 %, le parti disparaîtra du Parlement européen. Les sondages indiquent une relative stabilité du socle LR - la liste Bellamy est créditée de 8,5 % des intentions de vote dans notre sondage Elabe -, mais cet électorat est fragile, a fortiori lorsque le parti affiche une telle perte d'attractivité. « Le gouvernement Attal penche à droite, s'inquiète un dirigeant du parti. Certes, Rachida est impliquée dans des affaires judiciaires, mais elle a une certaine modernité. Nous, on va arriver avec Brice Hortefeux et une tête de liste anti-IVG. Ça nous ringardise. Elle est là, la mauvaise nouvelle. »

Une autre est que le candidat virtuel de LR pour la prochaine présidentielle, Laurent Wauquiez, n'émerge pas dans les sondages et fait l'objet de deux enquêtes préliminaires du parquet national financier. Mardi, au conseil stratégique que réunira le parti, cette question ne sera probablement pas abordée - ni celle, décisive, des choix que devra faire LR aux prochaines municipales. Les cas comme celui de Rachida Dati à Paris - des élus de droite s'alliant à la Macronie pour conserver leur mairie - sont amenés à se multiplier. Inutile de trop charger la barque.

Jules Pecnard
Commentaires 12
à écrit le 17/01/2024 à 12:46
Signaler
Alliez vous avec Bardella et Zemmour comme ça se fait dans d'autres pays d'Europe. Et vous gagnez haut le main les élections. Arrêtez d'être victimes de la pensée dominante qui nous a conduit au fond du trou. Allez Eric un peu de courage quoi !

à écrit le 15/01/2024 à 11:35
Signaler
Il n'y a pas de secret : la Macronie, Horizons, LR et Reconquête! se partagent le même électorat de cadres partis en retraite au temps des présidences Chirac et Sarkozy, dit autrement un électorat rétrécissant d'année en année...

le 15/01/2024 à 19:53
Signaler
"un électorat rétrécissant d'année en année... " Leurs gosses ont repris le relais ,même engeance.

à écrit le 14/01/2024 à 19:52
Signaler
a vouloir trop faire du Lepen il otiend se resultat . Il faut immediatement voter une lois pour creer un resever comme pour les indiens d'amerique avant qu'il n'y ai plus aucun LR dans la tibu . il y en a telement qui abandonnent le L pour N...

à écrit le 14/01/2024 à 12:40
Signaler
Quand on lit le programme politique des Républicains du type yaquafocon, diviser par deux le temps moyen d’attente moyen pour un rendez-vous médical ou augmenter de 10% en 5 ans le salaire net (hors inflation) de ceux qui touchent moins de 2 800 euro...

à écrit le 14/01/2024 à 10:54
Signaler
L'amitie en politique n'existe pas. Ciotti s'est fait berner par une professionelle de la rouerie. Les europeennes vont faire un carton. Bardella sera elu au grand dame du freluquet de l'elisier. Quel cirque la vie pretenduement politique en France....

à écrit le 14/01/2024 à 10:01
Signaler
Quand il n’existe plus d’alternative politique acceptable pour les marchés (qui bien sûr se méfient des extrêmes), et que l’on veut emprunter 295 milliards en 2024 -personne en France ne peut venir avec de telles sommes..-, cela devient un risque que...

le 14/01/2024 à 15:59
Signaler
C'est tout le peuple Français qui a généré la dette. Et d'ailleurs tout le monde continue à crier "je veux encore, encore !

le 14/01/2024 à 21:16
Signaler
@ BH - Détrompez-vous, les prêteurs vont se bousculer comme d'habitude pour prêter à la France et même se dépêcher si la perspective des taux est à la baisse. La France est riche et sait faire rentrer l'impot. Un Paradis pour les preteurs. Quant au...

à écrit le 14/01/2024 à 8:24
Signaler
Le groupuscule qu'est devenu ce parti de gouvernement a beaucoup de difficultés pour se maintenir à flot. Un présumé chef politique, qui n'est pas le chef du parti. Un chef officiel du parti qui est entravé faite de ligne politique claire, faute de s...

à écrit le 14/01/2024 à 8:11
Signaler
Ah parce qu'ils avaient du souffle !? "Ho la la j'ai trébuché sur un gravier j'en a ile souffle coupé !" ^^

à écrit le 14/01/2024 à 7:39
Signaler
Il faut dire que ce Monsieur à la tête des Républicains vous coupe l'envie de mettre un bulletin de l'urne. Les Républicains sont hors jeu depuis des années. L'esbroufe de celui qui se prenait pour le messie mondial NS a fait tombe ce parti.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.