L'Allemagne veut combattre le "tourisme social" venant de l'UE

Le gouvernement allemand a annoncé une restriction drastique de l'accès des ressortissants européens aux aides sociales. Une stratégie politique avant tout.
L'Allemagne ne veut plus verser d'aides sociales aux ressortissants de l'UE qui ne travaillent pas.

Depuis ses lourdes défaites lors des élections régionales de septembre à Berlin et dans le Mecklembourg, Angela Merkel a clairement changé de ton sur la question de l'immigration. Son « mea culpa » le 19 septembre dernier, où elle reconnaissait avoir « commis des erreurs » dans la gestion de la crise migratoire annonçait un tournant politique pour regagner la confiance des électeurs conservateurs tentés par le vote en faveur du parti eurosceptique et xénophobe Alternative für Deutschland (AfD). Désormais, elle semble passer aux actes et envoyer des signaux clairs sur ce terrain.

Loi restrictive

Ainsi, ce mercredi 12 octobre, sa ministre social-démocrate du travail, Andreas Nahles, a ainsi proposé une mesure de restriction de l'accès des ressortissants de l'Union européenne aux aides sociales allemandes. Désormais, les citoyens de l'UE qui n'ont pas pu trouver un emploi en Allemagne ne pourront demander une assistance financière que s'ils résident légalement sur le territoire de la République fédérale depuis au moins cinq ans. Entretemps, ils pourront bénéficier d'une aide pour assurer leur subsistance pendant seulement un mois. Les autorités allemandes pourront, en revanche, leur proposer un prêt pour leur permettre de rentrer dans leur pays d'origine. Une décision de 2015 du tribunal social fédéral avait autorisé les citoyens européens à demander des aides après six mois de résidence, ce qui avait fortement inquiété les communes, responsables du financement de ce type d'aides sociales outre-Rhin.

Décision soutenue par une décision de la justice européenne

Le gouvernement allemand avait alors décidé de légiférer sur le sujet pour rendre quasiment impossible ce type de demandes. Désormais, un citoyen de l'UE qui s'installe en Allemagne, mais ne peut trouver un emploi ne pourra pas compter sur l'aide. L'exécutif peut s'appuyer sur une décision de la Cour de Justice de l'UE qui a considéré que le refus de verser des aides sociales à un citoyen européen qui « n'a pas de perspectives de trouver un emploi » était légal et n'entravait pas la liberté de circulation dans l'Union.

Il n'empêche, cette législation semble largement répondre à un non-problème. Selon le ministère du travail, 34.000 ressortissants de l'UE reçoivent aujourd'hui en Allemagne une aide sociale, sur les 4.013.179 citoyens européens vivant outre-Rhin, soit un total de 0,85% de cette population.

Surcoût intenable ?

Ceci coûterait, selon les communes, 800 millions d'euros aux finances municipales, mais notons que les finances publiques allemandes sont saines. Les difficultés financières des communes sont surtout liées aux règles de financement de ces administrations. L'application de la « règle d'or » budgétaire et le refus de l'Etat fédéral et des Länder de renforcer le financement des communes alors même que ces dernières ont vu leurs responsabilités augmenter, expliquent davantage les difficultés de certaines municipalités allemandes que le poids de l'aide sociale induite par les ressortissants européens. Rien, du reste, ne laissait indiquer un afflux de ressortissants de l'UE désireux de toucher en Allemagne des aides sociales sans travailler.

Volonté politique

En réalité, cette décision de légiférer est politique. Andrea Nahles a, selon la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), pu compter sur le soutien sans faille de la chancelière sur ce dossier. La ministre du travail ne s'est d'ailleurs pas privée d'adopter une rhétorique qui n'était pas sans rappeler celle de David Cameron voici quelques mois, parlant de mettre fin au « tourisme social ». De façon assez significative, le gouvernement a décidé de légiférer sur ce dossier en prenant le risque de voir le texte rejeté pour inconstitutionnalité par la Cour de Karlsruhe. Un tribunal social de Mayence a ainsi jugé que le refus de verser une aide sociale aux étrangers était contraire aux « droits fondamentaux » reconnus par la Loi Fondamentale. Il y a donc eu une volonté du gouvernement de faire monter ce dossier pour faire la démonstration d'une fermeté affichée.

Stratégie gagnante ?

Alors que le ministre fédéral Thomas de Maizière souhaite accélérer les expulsions des étrangers condamnés en Allemagne, ce projet de loi est une nouvelle preuve de l'évolution de la stratégie politique d'Angela Merkel. Désormais, la chancelière recherche l'accord avec les Bavarois de la CSU et veut prendre au mot la demande de certains dirigeants de la CDU de « montrer davantage » que sa politique migratoire a changé. Ce changement a porté ses fruits politiquement. Dans le baromètre politique d'ARD publié le 6 octobre, la chancelière a ainsi gagné neuf points en un mois avec 54 % d'opinions favorables.

Commentaires 11
à écrit le 16/10/2016 à 13:25
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La dame Merkel réagit, mais il me semble qu'elle le fait à contretemps. Après avoir eu la réaction (soi-disant humanitaire) la plus débile qui soit : ouvrir toutes grandes les portes de l'Europe à des populations qui n'ont rien à y faire, et qui vont...

à écrit le 14/10/2016 à 21:49
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Si cette mesure ne concerne que des ressortissants de l'UE, il n'y a pas de rapport avec le "mea culpa" de Mme. Merkel qui se référait à l'arrivé des refugiés en masse en 2015 surtout de Syrie, de l'Irak, d'Afghanistan etc.

à écrit le 14/10/2016 à 11:48
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Ces mesures sont une reaction visant tout spécialement les colonies de migrans venant du sud est de l Europe et bien spécialisés dans ce genre de "boulot". Ceci concerne avant tout quelques villes bien connues de la Ruhr.

à écrit le 13/10/2016 à 9:50
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Une nouvelle qui devrait plaire à nos trolls intolérants prônant le rejet de l'autre, c'est mauvais signe. On sait ce que le rejet de l'autre peut engendrer comme conséquences dramatiques dans ce pays mais le niveau intellectuel de nos dirigeants...

le 13/10/2016 à 11:23
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@citoyen blasé: est-ce être intolérant que travailler pour améliorer son sort et celui de sa famille ? Je suis pour l'aide ponctuelle, car on a tous des mauvais moments à passer, mais pas pour l'assistance permanente. Et ce n'est pas rejeter l'autre ...

le 14/10/2016 à 10:16
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"est-ce être intolérant que travailler pour améliorer son sort et celui de sa famille ? " Vous parlez de quoi là ? Vous travaillez vous ? Alors que vous êtes sans arrêt à commenter avec vos multiples pseudonymes sur ce site et ailleurs je suppose...

le 30/10/2016 à 8:53
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@Citoyen blasé Et vous vous travaillez? Toujours à poster des messages, peu intéressants au passage, on est obligé de vous supporter, et en plus vous êtes donneur de leçon. Le ridicule ne tue pas. En tout cas, ça se voit qu'à part la société françai...

à écrit le 13/10/2016 à 9:45
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meme si c est 0.85 % des immigres, c est des gens qui donnent une image detestable, comme Leonarda chez nous (patent refusant de travailler, fille allant a l ecole 1 jour sur 2). Et il y a evidement le risques que les enfants ayant vecu dans un tel m...

à écrit le 12/10/2016 à 20:42
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C'est un peu tard, Madame... Et tellement partiel !

à écrit le 12/10/2016 à 18:32
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C'est la logique même, on ne peut pas demander toujours de payer pour les autres. Les gens travaillent et se saignent pour améliorer leur sort et celui de leur pays. Alors ceux dont la devise est "viens chez moi, j'habite chez une copine" doivent tro...

le 16/10/2016 à 13:35
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plutôt d'accord avec patrick b ; quant à "citoyen blasé" il semblerait qu'il adopte les opinions bien cadrantes avec le politiquement correct en vigueur dans les sphères de gauche, pour des raisons idéologiques, rejointes par les sphères libéro-affai...

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