La crise agricole fait grimper l'euroscepticisme au gouvernement Valls

Dernier épisode en date, lundi 8 février, quand le Premier ministre, Manuel Valls, a pris l’Europe à partie à propos de la crise agricole alors que les manifestations d’éleveurs se multiplient. Un article de notre partenaire Euractiv.
Dans l'entourage du Premier ministre, la ligne politique n'a jamais été très europhile.

«  La Commission doit activer les pouvoirs dont elle dispose en cas de crise, jusqu'à présent, elle a fait trop peu et trop tard », a estimé le Premier ministre français.

Les permanences de plusieurs élus locaux ont été visitées et des cadavres d'animaux y ont été déposés notamment dans le Lot-et-Garonne, tandis que des manifestations d'exaspérations des éleveurs de porcs reprenaient en Bretagne.

Appel de la France à une régulation du marché

En urgence, le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a demandé « des mesures de régulation des marchés » dans un mémorandum préparant le prochain conseil des ministres de l'Agriculture, selon le Premier ministre.

Des déclarations qui ont irrité l'opposition, comme le montre ce tweet de la députée européenne Constance Le Grip

Trop facile de se livrer à du "Brussels bashing" contre la Commission européenne dans la crise agricole, Monsieur @manuelvalls ! 1/3

— constancelegrip (@constancelegrip) 8 Février 2016

De fait, le ministre de l'Agriculture, également porte-parole du gouvernement, a tendance à peu fréquenter les conseils Agriculture de Bruxelles, où il envoie régulièrement des représentants.

Le comportement de la Commission Juncker mal accepté

De l'avis général, l'influence de la France sur les questions agricoles n'est pas au beau fixe depuis l'arrivée de l'Irlandais Phil Hogan aux manettes du portefeuille agriculture à la Commission européenne.

« En fait, la DG Agri est là pour écouter les intérêts anglo-saxons, et se concentre surtout sur l'Irlande », regrette le membre d'une organisation agricole française.

Le comportement de la Commission Juncker est souvent mal accepté à Paris. Dernier épisode en date, l'ouverture d'une enquête pour entente sur les prix dans l'élevage, a particulièrement exacerbé les tensions.

Et à propos du Dieselgate, la ministre de l'Écologie Ségolène Royal s'est aussi laissée aller à critiquer les institutions européennes.

L'euroscepticisme progresse à gauche

L'épisode révèle aussi une tendance de plus en plus claire au sein du gouvernement français : celle d'un euroscepticisme rampant.

Dans l'entourage du Premier ministre, la ligne politique n'a jamais été très europhile. A Davos, déjà, le Premier ministre Manuel Valls avait prévenu que « le projet européen pouvait mourir » si les défis n'étaient pas relevés à très court terme. Il avait aussi prévenu que « l'Europe pouvait sortir de l'Histoire ».

Mais un nouveau cran a été franchi, au point que des conseillers du Premier ministre ne se cachent plus de leur irritation envers Bruxelles.

« Ceux-là mêmes qui nous reprochaient nos critiques sur le fonctionnement de l'UE il y a deux-trois ans ne cessent de dénigrer ce que fait Bruxelles. Les vannes ont lâché, avec la politique sécuritaire, on voit renaître les doutes de la gauche sur l'intégration européenne », affirme un élu français.

Clivages du référendum de 2005

En 2005, la gauche s'était fortement divisée sur la question européenne, à l'occasion du vote sur la constitution européenne. A l'époque, certains membres influents du parti, dont Laurent Fabius mais aussi Manuel Valls, avaient milité pour le « Non ». L'actuel Premier ministre avait fini par appeler à voter pour, et le « Non» l'avait emporté de justesse.

    | Lire : Les Verts dénoncent la duplicité de la France sur l'affaire Volkswagen

Pour tenter de satisfaire les agriculteurs, et notamment les éleveurs de porcs les plus impactés par l'effondrement des prix de la viande, le Premier ministre a par ailleurs promis d'intervenir auprès de la Russie pour rouvrir le marché russe aux exportations françaises.

Bras de fer en vue avec Bruxelles sur l'embargo russe

En effet, après l'embargo décidé par la Russie sur le porc des régions limitrophes comme la Pologne et l'Allemagne, la Commission européenne a décidé de négocier en bloc, pour l'ensemble des 28 pays. L'excuse de la peste porcine mise en avant par Moscou ne concerne en rien les porcs français et surtout pas bretons.

Mais, ce faisant, le Premier ministre entame un bras de fer avec la Commission, qui refuse d'ouvrir des négociations pays par pays.

Depuis le début de l'embargo russe, la France a perdu des débouchés importants. Certes, de nouveaux marchés ont été ouverts, en Asie notamment - en Chine et au Viet-Nam. Mais, vu la faiblesse des prix de la viande sur cette partie du globe, les exportations en Asie se font à bas prix.

« On a retrouvé les exportations en volume, mais les prix sont ridiculement bas », assure un représentant de la filière porcine.

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RÉACTIONS

"La situation de l'agriculture française appelle une véritable prise de responsabilité gouvernementale et des réformes structurelles, notamment par une baisse des charges et la mise en place d'une véritable politique sociale et fiscale adaptée à une économie mondialisée. Si la mise en œuvre de mesures d'intervention sur le marché est nécessaire, force est de constater que la France est isolée au niveau européen, situation renforcée par l'absentéisme chronique du ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll à Bruxelles. Avant de nous aider, nos partenaires attendent principalement que la France fasse des réformes de structure », a déclaré Michel Dantin, eurodéputé "Les Républicains".

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Par Aline Robert, Euractiv.fr

(Publié le mardi 9 février 2016 à 9:10)

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Euractiv

Commentaires 28
à écrit le 15/12/2016 à 6:21
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le pôv Le Fol est la démonstration même de la nuisance de cette idéologie socialo-marxiste que la chute du mur a permis d'éradiquer pour le bonheur de nombreux peuples , mais qui malheureusement perdure chez nous !!

à écrit le 06/03/2016 à 8:00
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Quoi d'étonnant ! il serait temps de reconnaître l'incompétence de l'équipe de bras-cassés piloté par flenbi !!

à écrit le 10/02/2016 à 18:57
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Enfin, le langage de la raison , la commission européenne est une imposture ,elle ne défend pas les européens , elle ouvre en grand les portes et les fenêtres à la mondialisation sauvage anglo saxonne ,le paradis des multinationales et des pays trich...

à écrit le 10/02/2016 à 8:55
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L'Europe n'est et ne doit rester qu'un marché commun avec des normes donc il ne faut rien en attendre de plus. Un sevrage des subventions est nécessaire. Il appartient à la France d'adapter son économie et son système socialo fiscal dans la zone euro...

à écrit le 10/02/2016 à 0:03
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Le Foll voulait etre Sinistre de l'Agriculture, il MEPRISE Clairement les Agriculteurs : " Moi Président Je " ( 17fois ) ne peut bien évidemment rien refuser à l'un de ses meilleurs copains. Bruno Lemaire son prédécesseur était très très très appréci...

à écrit le 09/02/2016 à 19:22
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Curieux, je n'ai pas accès aux 18 commentaires précédents (?) ...Les sanctions contre la Russie coutaient déjà 21 milliards à l'UE l'an dernier (La Tribune 9/2/15). Le coût pour la filière porcine française aujourd’hui : 41 millions. La Russie ayant ...

le 10/02/2016 à 9:36
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On a voulu faire les malins avec la Russie ,on a humilié ce peuple avec nos décisions et la non livraison des bateaux mistral !!!on est des donneurs de leçon à la botte des Américains qui en rient encore !!et bien maintenant dansons !!!et pleurons co...

à écrit le 09/02/2016 à 17:59
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C'est toujours la faute des autres, à Bruxelles, à l'Europe, aux Allemands etc, etc. Que le gouvernement socialiste baisse les charges insupportables et supprime la pléthore de normes, règlements et autres joyeusetés administratives que nos voisins n...

à écrit le 09/02/2016 à 16:38
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Eurosceptisme. ^p Le continent de l'Europe, la Commission Europeene et le dirigeant de la Commission M. Juncker ne sont pas les memes choses.

le 09/02/2016 à 19:31
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Un autre petit européïste infiltré, et c'est moi qui l' ai trouvé, il est à moi, c'est le mien, c'est mon trophée...

à écrit le 09/02/2016 à 15:06
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Avant de s'en prendre à l'Europe Mr Valls aurait mieux fait de réfléchir avant de s'en prendre à la Russie suite à l'affaire d'Ukraine . Nous payons notre aveuglement par un blocus de nos exportations agroalimentaires en ayant annulé la livraison des...

à écrit le 09/02/2016 à 14:17
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C est la faute à l Europe!! ca y est ils ont trouvé le responsable Je me demande comment les agriculteurs des autres pays de L UE et spécialement les Allemands et les pays du nord arrivent à vivre correctement et sont compétitifs ???alors que nos ag...

le 09/02/2016 à 17:17
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Un petit européïste infiltré, et c'est moi qui l' ai trouvé, il est à moi, c'est le mien, c'est mon trophée...

à écrit le 09/02/2016 à 13:57
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Aucun mot sur Christine Lagarde, Michel Barnier ou Bruno Lemaire ? Anciens ministres sous Sarkozy. La responsabilité... connais pas !

à écrit le 09/02/2016 à 13:53
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Cloîtrés dans leurs bureaux de verre, les décideurs bruxellois – au train de vie luxueux, avec 6.500 euros nets par mois en moyenne, soit la moitié de ce que touche un éleveur en un an (http://bfmbusiness.bfmtv.com/monde/un-fonctionnaire-europeen-gag...

le 09/02/2016 à 19:29
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D' une grande perspicacité d' analyse, merci.

à écrit le 09/02/2016 à 13:51
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Il font la tronche les petits européïstes, peur que le peuple les bouscule..?

à écrit le 09/02/2016 à 13:12
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Ben oui en 2005 les français ont voté massivement contre ce traité constitutionnel, ils avaient largement raison donc mais les élus, n'écoutant que les actionnaires milliardaires et les multinationales, ont fait passer le oui en force deux ans plus t...

le 09/02/2016 à 15:38
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"ont fait passer le oui en force deux ans plus tard". Oui, c''était pourtant annoncé dans le programme de Sarkozy en 2007 , ce qui n'a pas empêché l'électorat FN de voter quand même pour lui au deuxieme tour, comme quoi.

le 10/02/2016 à 23:26
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c encore ce petit tordu de sarko qui a pas respecter le vote des français et il voudrais revenir avec sa clic il reve CE PETIT NERVEUX

à écrit le 09/02/2016 à 13:01
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Pour le référendum pour la constitution européenne, le « Non» l'avait emporté de justesse. Avec 55% de non contre l'avis de la plupart des élites, ce n'est pas de justesse.

le 09/02/2016 à 17:14
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Bien vu, c'est juste le contraire !

à écrit le 09/02/2016 à 12:12
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et le « Non» l'avait emporté de justesse. ^^ vous avez de l'humour nombre % des inscrits % des votants % des suffrages exprimés OUI 12 808 270 30,65 44,18 45,33 NON 15 449 5...

le 09/02/2016 à 13:09
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Merci, mon poil s'est hérissé d'un coup quand j'ai lu ceci...

à écrit le 09/02/2016 à 12:05
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Nous constatons tous les jours les méfaits des diktats de Bruxelles sur les politiques des pays européens dont la France... Il n'y a qu'à voir Schengen et compagnie , un désastre ! Rien n'est adapté aux particularités de chaque pays et tout est niv...

le 09/02/2016 à 14:30
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Bruxelles a bon dos. Il faut que notre brillant Président pèse beaucoup plus sur les décisions qui y sont prises dans ce domaine là comme dans d'autres. Il en a tout à fait les moyens mais il faut connaître ses dossiers sur le bout des doigts. Il est...

à écrit le 09/02/2016 à 11:57
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le gouvernement devrait regarder pourquoi un pays serieux comme l'allemagne n'a pas de problème et nous si ! Ils ont mis en place des lois qui permettent le développement de l'agriculture et les allemands sont maintenant les 1er fermiers Européens, p...

le 09/02/2016 à 14:51
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Très juste analyse. Mais quand on lit les réactions , on ne peut qu'être très inquiet pour notre pays qui se complait dans l'anti libéralisme, la chasse aux riches et aux entreprises qui fonctionnent bien pour ne mettre en avant que le repli sur soi ...

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