C'est une Première ministre en sursis qui s'est exprimée mercredi soir, sur fond de sapin de Noël, sur le perron du 10, Downing Street. Theresa May a, certes, remporté le vote de défiance organisé par l'aile droite de son Parti conservateur - elle a obtenu le soutien de 200 députés conservateurs, contre 117 souhaitant la voir partir. Mais avec plus d'un tiers des députés l'ayant désavouée, le combat s'annonce acharné pour faire passer le texte entérinant l'accord sur le Brexit.
Elle a également dû mettre son propre avenir politique dans la balance, promettant qu'elle quitterait ses fonctions avant les prochaines élections législatives, en 2022. Le temps de lancer le processus de sortie de l'UE.
« J'aurais aimé de tout mon cœur mener le parti aux prochaines élections (...). Mais je me rends compte que le parti aimerait qu'un autre chef s'en charge », a-t-elle déclaré avec émotion, selon le conseiller juridique du gouvernement, Robert Buckland.
Cette victoire, qui a fait monter la livre sterling, signifie que les Tories ne pourront plus chercher à déloger Theresa May pendant un an. Mais sa courte majorité constitue aussi un camouflet.
La prochaine étape pour Theresa May passe par le sommet des Vingt-Sept
Tout reste à faire pour la cheffe du gouvernement qui va tenter, une nouvelle fois, d'arracher des concessions aux leaders européens, jeudi et vendredi, lors d'un sommet à Bruxelles. Des concessions nécessaires si elle souhaite avoir une chance de faire approuver par le Parlement l'accord sur le Brexit passé entre les deux parties, le 27 novembre dernier.
Car en réalité, elle n'a toujours pas la majorité nécessaire à la Chambre des communes pour faire voter ce texte. L'accord est vilipendé tant par les "Brexiters" craignant un arrimage permanent du Royaume-Uni à l'UE que par les europhiles espérant encore pouvoir faire marche arrière.
L'aile-droite du parti Conservateur, comme l'allié nord-irlandais de Theresa May, le petit parti unioniste DUP, contestent la solution dite de "backstop" qui droit créer, de façon provisoire, un "territoire douanier unique", englobant l'UE et le Royaume-Uni, pour éviter une frontière physique entre l'Irlande et l'Irlande du Nord après le Brexit.
L'UE "prête à étudier" de nouvelles garanties pour Londres
Les discussions sont jusqu'ici bloquées - l'Allemagne, notamment, s'étant publiquement prononcé contre toute renégociation de la clause de sauvegarde. Pour le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas, le texte n'est pas une base de discussion, mais une base de décisions. Une position partagée par Jean-Yves Le Drian qui a souligné mardi, lors de la séance des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, « qu'il n'y aura pas de renégociations, peut-être des observations » lors du sommet européen.
Mais il y a peut-être une toute petite porte de sortie pour Theresa May... Pour l'aider à convaincre le Parlement d'entériner l'accord de Brexit, l'UE a mis au point, selon Reuters, un texte en six points dans lequel elle se dit "prête à étudier si de nouvelles garanties peuvent être apportées" aux Britanniques sur cette question du "backstop". Mais en l'attente, l'UE "s'en tient" à l'accord trouvé avec Londres et "entend procéder à sa ratification, l'accord ne pouvant être renégocié".
« Nous pouvons expliquer telle ou telle chose (...); des clarifications oui, mais de nouvelles négociations non », a dit le commissaire européen au Budget et aux Ressources humaines Günther Oettinger, à la radio-télévision allemande SWR ce mercredi.
À la question de savoir si la Commission européenne était ouverte à une limitation de la durée du backstop, il a répondu par la négative.
« Non, ça ne marche pas. Il nous faut des règles claires, que ce soit pour les populations, les produits et les marchandises à la frontière irlandaise, en Irlande du Nord, à Belfast et Dublin. »
(avec AFP et Reuters)