Fraude fiscale : le procès de Seillière et d’autres dirigeants et cadres de Wendel s'ouvrira ce lundi

Ils sont soupçonnés d'avoir sciemment participé à un montage financier visant à tromper le fisc sur des montants gigantesques : les anciens dirigeants de la société d'investissement Wendel, dont l'ex-président du Medef Ernest-Antoine, sont jugés à partir de lundi à Paris. Tous encourent 37.500 euros d'amende et cinq ans d'emprisonnement.
Quinze ans après les faits, quatorze personnes doivent comparaître pendant trois semaines, au premier chef le baron Seillière, 84 ans, héritier de la dynastie Wendel, à l'époque président du conseil de surveillance et patron des patrons européens.

Quinze ans après les faits, c'est un procès pour le moins attendu qui s'ouvrira dès ce lundi 17 janvier 2022 à Paris. Celui d'anciens cadres et dirigeants de la société d'investissement Wendel, réunis dans une affaire frauduleuse visant à tromper le fisc sur des montants colossaux. Et parmi les prévenus se trouve notamment une figure notoire : Ernest-Antoine Seillière, 84 ans, héritier de la dynastie Wendel...et à l'époque président du Medef.

A ses côtés, le « Mozart de la finance », Jean-Bernard Lafonta, 60 ans, au moment des faits à la tête du directoire, ainsi que onze cadres (anciens et actuels) et un ex-avocat fiscaliste, devront s'expliquer à la barre de la 32ème chambre correctionnelle sur un programme ultra-sophistiqué d'intéressement baptisé « Solfur ».

Totale franchise d'imposition

En effet, fin mai 2007, ce savant schéma leur avait permis de récupérer pas moins de 315 millions d'euros en action, soit 4,6% du capital de Wendel (dont 79 millions pour Seillière), pour un investissement de départ d'1,6 million seulement. Soit un facteur multiplicateur de 191% ! Et ce, selon l'accusation, « en totale franchise d'imposition », dont ils se seraient soustraits grâce à un montage complexe. Pour le parquet national financier (PNF), le gain alors généré a été artificiellement placé, via l'interposition de sociétés, sous un régime de « sursis à imposition », dans le but de différer voire, in fine, d'éviter le paiement de l'impôt sur ces considérables plus-values. Résultat : pour cette manoeuvre, tous encourent 37.500 euros d'amende et cinq ans d'emprisonnement.

Mais leurs avocats, qui n'ont pas souhaité s'exprimer en amont du procès, vont plaider la relaxe. Pour cause, l'interprétation du fisc et du PNF est contestée par les prévenus, ces derniers réfutant toute intention de frauder, et assurant que le montage respectait la loi et la jurisprudence administrative de l'époque. De quoi promettre une bataille procédurale autour de questions de droit soulevées par la défense.

Lire aussi 1 mnLafonta, ancien patron de Wendel, condamné à 1,5 million d'amende pour tromperie financière

Transmission des titres à des sociétés individuelles

Pour comprendre le mécanisme complexe mis en place par les prévenus (dont l'un d'eux est décédé depuis), il faut remonter le temps de quelques décennies. A la fin des années 1970, l'entreprise en question, fondée au début du 18ème siècle en Moselle par le maître des forges Jean-Martin Wendel, se transforme en société d'investissement, après la nationalisation de la sidérurgie française en crise. Mais le groupe reste contrôlé par les descendants du fondateur et, dès 2006, la famille souhaite (pour des raisons fiscales) n'avoir plus qu'une seule structure entre elle-même et la société cotée Wendel Investissement. Pour ce faire, il est décidé qu'une structure intermédiaire, la Société lorraine de participations sidérurgiques (SLPS), serait fusionnée en 2007 avec un autre étage du groupe, Wendel-Participations.

Dans le même temps, un autre processus complexe est engagé : celui consistant à solder un programme d'intéressement des managers du groupe, qui détenaient depuis 2004 une option d'achat sur 13,5% du capital de Wendel-Participations, via une société appelée « Solfur », elle-même filiale à 100% de Wendel Investissement - ce qui formait donc une « boucle ».

Pour « déboucler » Solfur, Wendel-Participations rachète en mai 2007 ses propres actions aux cadres, contre remise d'actions Wendel Investissements : ils deviennent alors actionnaire direct de la société cotée à hauteur de 4,6%. Par une série d'opérations, les titres sont ensuite transmis à des sociétés civiles individuelles des cadres - sauf pour Jean-Bernard Lafonta. Certains souscrivent en outre des prêts auprès de la banque JP Morgan.

C'est cette transmission à des sociétés qui leur permet de bénéficier d'un « sursis à imposition », rendu possible par la loi dans le cas d'opérations dite « d'apport-cession », afin de reporter l'acquittement de l'impôt sur les plus-values (27%). Mais pour le fisc comme pour le PNF, il s'agit d'un détournement de ce dispositif, pensé par le législateur pour encourager le réinvestissement dans l'activité économique.

Echanges de mails

Concomitant à une réorganisation globale, l'opération Solfur avait provoqué des remous au sein de Wendel. Dans les mois qui ont suivi, les difficultés de Saint-Gobain, dans lequel Wendel avait investi, mais surtout la crise financière de 2008, avaient entraîné une dégringolade de l'action. S'estimant lésés, certains cadres avaient engagé des actions en justice, dénonçant un montage désastreux au final.

En décembre 2010, quelques jours seulement avant la prescription fiscale, tous s'étaient vu notifier un lourd redressement : 240 millions au total, en incluant les pénalités. Et en 2012, Bercy avait transmis à la justice une volée de plaintes pénales pour fraude fiscale, entraînant l'ouverture d'une information judiciaire.

Les investigations se sont en particulier appuyées sur les échanges de mails sur l'élaboration du montage fin 2006 et début 2007, entre les dirigeants de Wendel, leurs équipes d'avocats et la banque JPMorgan Chase, dans lesquels le « risque fiscal » est minutieusement étudié. La banque américaine, initialement renvoyée en procès en 2016 pour complicité de fraude fiscale aux côtés des prévenus, sera cependant absente du tribunal. En septembre, elle a accepté de payer 25 millions d'euros d'amende via une transaction judiciaire pour clore les poursuites.

(Avec agences)

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Commentaires 9
à écrit le 18/01/2022 à 11:05
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pas du tout content au temps que ca pour juger les INTOUCHABLES, sarkozy,fillon ect toujours le PEUPLE qui paie la NOTE,; que fait la justtice ,a moins que les ordres viennent d'en haut ,Mrs weurs et ces 1700 noms sorti de la banque de suisse A QUAND...

à écrit le 17/01/2022 à 23:08
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le baron se gobergent d' une façon indécente col blanc ...les ouvriers modeste travaillent jamais assez pour eux ....voilà ou est passer notre propre fric ...démunir les gens modestes ..de leurs droit acquis par leurs travail.........finir les fin d...

à écrit le 17/01/2022 à 23:08
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le baron se gobergent d' une façon indécente col blanc ...les ouvriers modeste travaillent jamais assez pour eux ....voilà ou est passer notre propre fric ...démunir les gens modestes ..de leurs droit acquis par leurs travail.........finir les fin d...

à écrit le 17/01/2022 à 23:07
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le baron se gobergent d' une façon indécente col blanc ...les ouvriers modeste travaillent jamais assez pour eux ....voilà ou est passer notre propre fric ...démunir les gens modestes ..de leurs droit acquis par leurs travail.........finir les fin d...

à écrit le 17/01/2022 à 14:36
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C'est étonnant qu'ils aient continué, car sur plusieurs émissions de France Inter, ils avaient déjà évoqué des affaires de ce type et d'achats de syndicats pendant toute la guerre froide. Je sais pas, quand on vous nomme vous et tout votre secteur su...

à écrit le 17/01/2022 à 10:11
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mais, que fait le medef ?

à écrit le 17/01/2022 à 9:36
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Cela se terminera par une peine de prison avec sursis, une amende qui représente une goutte d'eau dans un océan de profit.

à écrit le 16/01/2022 à 21:45
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Merci de cet artricle fort intéressant, à un détail de présentation près : le facteur multiplicateur du montage Solfur est de 191, c'est-à-dire qu'un investissement de 10 rapporte 1910 (soir cent fois plus que 191 %) ...Ce qui, en soi, n'a rien de ré...

à écrit le 16/01/2022 à 18:20
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écrire "facteur 191" ou bien "représente 19100 % de l'initial"

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