L'aérien en Bretagne suspendu au sort de la ligne Brest-Orly

Quelles solutions pour désenclaver la Bretagne et maintenir l’accessibilité de la pointe Finistère, alors que la liaison Brest-Paris-Orly est en sursis après la décision d'Air France d'arrêter les vols effectués par sa filiale low-cost Transavia? Deux ans après le rapport critique de la Cour des Comptes sur la stratégie aéroportuaire de la Bretagne, la Région doit fixer en 2023 les grandes orientations pour les huit plateformes aéroportuaires qui maillent son territoire. Un réseau dense mais au sein duquel seuls les aéroports de Rennes et Brest sont en capacité de voler de leurs propres ailes.
Le secteur aérien en Bretagne est notamment suspendu à l'issue qui sera trouvée pour assurer une ligne aérienne pérenne entre Brest et Paris-Orly alors qu'Air France avait annoncé la suspension des vols après le 30 octobre. Face au tollé, la compagnie a fait machine arrière et prolongé sa ligne Transavia pendant cinq mois.
Le secteur aérien en Bretagne est notamment suspendu à l'issue qui sera trouvée pour assurer une ligne aérienne pérenne entre Brest et Paris-Orly alors qu'Air France avait annoncé la suspension des vols après le 30 octobre. Face au tollé, la compagnie a fait machine arrière et prolongé sa ligne Transavia pendant cinq mois. (Crédits : BENOIT TESSIER)

La nouvelle compagnie aérienne Céleste fera-t-elle partie des solutions qui émergeront dans le ciel breton pour maintenir l'accessibilité et l'attractivité de la pointe finistérienne ? Fondée il y a un an à Morlaix par Bruno Besnehard et Arnaud de Noray, afin de faciliter la mobilité inter-régionale et développer les vols moyens courriers, elle est candidate, tout comme la compagnie normande Chalair, à la reprise de la ligne Brest-Paris-Orly dès janvier 2023 qu'Air France envisage de stopper.

Le secteur aérien en Bretagne est notamment suspendu à l'issue qui sera trouvée pour assurer une ligne aérienne pérenne entre la pointe Finistère et Paris-Orly. Discuté avec l'État, ce dossier est suivi de très près par les instances régionales et les élus bretons. Air France avait annoncé début septembre la suspension des vols opérés par sa filiale Transavia après le 30 octobre, en raison du faible taux de remplissage des avions.

Suscitant une volée de bois vert, la compagnie a fait machine arrière et prolongé sa liaison pendant cinq mois. Le sujet est d'autant plus sensible qu'avant la crise Covid, la liaison Brest-Orly faisait de Brest un des aéroports les plus dynamiques (1,1 million de passagers). En 2021 au sortir de la crise, sa fréquentation avait retrouvé le chemin de la progression (+ 42%) avec 654.900 passagers.

Transavia critiqué pour son service et ses horaires

Pour faire décoller Céleste, l'écosystème brestois se mobilise. La CCIMBO, le Medef, Cpme29, l'UIMM Finistère et BTP Finistère ont lancé une souscription de 3 millions d'euros auprès des entreprises du territoire. C'est le montant nécessaire à l'inscription de cette compagnie auprès des autorités administratives aéronautiques.

Le résultat de cette démarche n'est pas encore connu, mais en cas de réussite, Céleste a prévu de baser à Brest deux avions, des CRJ 1000 d'une centaine de places. Son objectif : permettre « des départs tôt le matin et retour le soir à destination de Paris-Orly, ainsi que dans la journée vers des destinations régionales et européennes » explique la compagnie. Dans un second temps, elle envisage aussi de baser un troisième CRJ 1000 sur le tarmac de Rennes.

Si les discussions se poursuivent avec la direction d'Air France et le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune, la question de la survie d'une ligne entre Brest et Paris se télescope avec celle du désenclavement de la Bretagne, de la desserte aérienne et de la ligne à grande vitesse. Le délai de cinq mois doit permettre de trouver une alternative y compris auprès d'autres compagnies aériennes.

Coup de canif dans le Pacte d'accessibilité

« Les arguments apportés par la compagnie pour stopper cette liaison historique sont pour la plupart discutables ou non fondés, la mauvaise qualité de service assurée par la filiale Transavia d'Air France étant inadaptée à la demande en termes d'horaires » soutient Michaël Quernez, vice-président (PS) du Conseil régional de Bretagne, chargé du climat et des mobilités.

Selon les élus bretons, la décision unilatérale d'Air France, va « priver les acteurs économiques de l'unique solution de mobilité pour se rendre à Paris en aller-retour dans la journée (Brest-Orly/Orly-Brest), dans un contexte où l'offre ferroviaire alternative n'est toujours pas suffisamment performante. »

Surtout, ils estiment qu'elle va à l'encontre du Pacte d'accessibilité et de mobilité pour la Bretagne, signé en février 2019 par le Premier ministre et la Région. Ce pacte avait consacré l'aéroport de Brest comme ayant « un rôle fondamental dans l'accessibilité du Finistère nord et au-delà vers la Cornouaille et le Trégor ». En TGV, Brest reste pour le moment à 3h40.

La stratégie régionale à l'épreuve de la chute de fréquentation

Brest n'est pas le seul aéroport d'où Air France se désengage sur la liaison vers Paris ou d'autres villes. C'est le cas aussi à Lorient, où la compagnie a cessé au printemps 2021 ses liaisons vers Lyon et Roissy, et même à Rennes, où elle a arrêté de desservir Nice, liaison anciennement opérée par Hop, au profit d'Easyjet. À Lorient, la société Edeis a repris la gestion de l'aéroport civil en janvier 2022 mais les vols commerciaux sont plus rares. L'opérateur table pourtant sur un objectif de 114.000 passagers en 2026.

La période post-Covid laisse planer des incertitudes sur la capacité des aéroports bretons à redresser le manche, alors qu'avec le télétravail, les passagers ont adopté de nouvelles habitudes. « Cela ne reprend pas » concède Michaël Quernez.

« Globalement, l'aérien est à 80% de son activité d'avant-Covid, en Bretagne on frôle juste les 60%. Les résultats ne sont clairement pas au niveau. La Région, qui est propriétaire des aéroports de Brest, Rennes-Saint-Jacques, Dinard-Pleurtuit et Quimper décidera de sa stratégie aéroportuaire pour Rennes (possible agrandissement), Dinard, Brest et Quimper en juin 2023. En Décembre 2023, nous adopterons celle concernant l'offre des huit plateformes, avec Saint-Brieuc et Lannion » avance l'élu.

Le Conseil régional, qui établira aussi un bilan global de sa mobilité, n'exclut ainsi pas une non-reconduction de la délégation de service public (DSP) de l'aéroport de Quimper : la liaison avec Paris-Orly, opérée par la compagnie Chalair et défendue par la CCIMBO Quimper, attire moins de 8.000 passagers par an.

La Région cherche aussi la parade (aviation électrique ou d'affaire, lignes low cost, formation et maintenance...) pour maintenir l'activité de sites comme ceux de Morlaix, après le rachat de Hop ! Training par Greenfield Business Resources, et de Dinard, orientés vers la formation de pilotes et la maintenance. « Huit plateformes en Bretagne rendent possible une complémentarité et de la diversification. Nous réfléchissons aussi sur le développement de l'énergie photovoltaïque sur certains de nos aéroports, où du foncier à vocation industrielle peut en outre se libérer  » ajoute Michaël Quernez.

La question du coût, du développement économique et de l'attractivité des petits aéroports bretons avait déjà été abordée en 2020, par un rapport de la Cour des comptes : trop nombreux, trop dépendants des aides publiques, à l'exception de Rennes et Brest. L'instance recommandait de reconfigurer la politique de la Bretagne en matière de transport aérien. On y est : la crise de la Covid-19 a accéléré le tempo.

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Commentaires 3
à écrit le 29/10/2022 à 14:25
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Le problème est que cette ligne est révélatrice d'une lecture parisienne des territoires. Il faut pouvoir partir de Paris le matin et y revenir le soir ou partir en week-end... Non les déplacements se font dans les deux sens, avec des temporalités...

à écrit le 29/10/2022 à 5:26
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A mon avis il faudrait moins dependre de la france, ce n est pas à Paris de decider du sort de la bretagne, plutôt envisager des liaisons vers l angleterre ou via l angleterre?

à écrit le 28/10/2022 à 14:08
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Ecrire qu'Air France se désengage de la liaison entre Paris et Brest n'est pas exact. L'article oublie d'indiquer que si la desserte d'Orly diminue, celle de Roissy, par Air France, augmente. On parle donc en réalité de volonté de desservir les 2 aér...

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