Automobile : Stellantis se dote d'une stratégie "software", mais l'essentiel est ailleurs

Après les annonces spectaculaires de Volkswagen en janvier, et dans une moindre mesure de Renault, Stellantis se lance à son tour dans la course du Software. Cette activité pourrait devenir le principal gisement de profits dans les dix prochaines années dans l'industrie automobile. Des questions se posent néanmoins sur le modèle adopté par le groupe automobile emmené par Carlos Tavares, notamment autour de l'Operating System...Explications
Nabil Bourassi
(Crédits : DENIS BALIBOUSE)

Né en janvier dernier de la fusion entre PSA et Fiat, Stellantis continue d'égrainer des éléments d'un plan stratégique qui tarde à arriver. Après la stratégie d'électrification annoncée en juillet dernier, c'est au tour du plan Software d'être divulgué. Pour rappel, le software va, dans les prochaines années, refonder l'architecture automobile pour lui permettre d'accueillir de nouvelles technologies comme la connectivité ou l'autonomie. C'est d'ailleurs l'un des fondements du succès de Tesla qui est capable de créer une nouvelle expérience à bord. D'après le cabinet PwC, le Software va constituer jusqu'à 60% de la chaîne de valeur de l'automobile en 2030. Une nouvelle brique technologique pour Stellantis, qui devrait lui rapporter jusqu'à 20 milliards d'euros de chiffres d'affaires à l'horizon 2030 (le groupe pèse 134 milliards d'euros de chiffre d'affaires) et enregistrer une marge opérationnelle dans les standards des "techs companies", autrement dit, une rentabilité à deux chiffres.

Devenir une "tech company"

Mais Stellantis ne précise pas l'ampleur de la profitabilité attendue. D'ailleurs, le groupe ne divulgue pas non plus le montant de l'investissement prévu dans cette activité puisqu'il estime qu'il est indissociable de celui de l'électrification, dont le montant prévu d'ici à 2035 s'élève à 30 milliards d'euros. Seule indiscrétion, le groupe automobile annonce qu'il disposera de 4.500 ingénieurs software d'ici à 2025. Même ce chiffre ne dit pas combien seront recrutés par rapport aux effectifs actuels.

Pour autant, Carlos Tavares juge que le software est un virage stratégique majeur pour Stellantis. "Nos stratégies d'électrification et software accélèreront notre transformation pour devenir une "tech company" leader de la mobilité durable", a-t-il déclaré. Expérience client personnalisée, monétisation des datas sur les cinq premières années de cycle de vie de la voiture, abonnements, services à la demande, marketing clientèle..., les gisements de chiffre d'affaires sont nombreux, selon Stellantis.

Du cloud à la voiture autonome...

Trois plateformes électroniques vont être lancées en 2024. Elles auront trois niveaux de compétences. La première, STLA Brain, va totalement repenser l'architecture électronique des voitures en centralisant la gestion des données autour d'un ordinateur central haute performance, qui sera lui-même connecté au cloud pour non seulement compléter sa puissance de calcul, mais aussi accéder à des mises à jour. Ce premier concept refonde ainsi l'articulation entre tous les équipements de la voiture dont les commandes seront désormais pilotées par un seul élément.

Baptisée STLA SmartCockpit, la seconde plateforme augmentera d'un cran le niveau puisqu'elle permettra d'adopter un "un espace de vie personnalisable". Elle va permettre de mieux gérer les interfaces de connectivité digitales. Enfin, la dernière plateforme, STLA AutoDrive, en collaboration avec BMW, doit permettre d'accueillir des fonctionnalités d'autonomie de niveau 2, jusqu'au 3 ème niveau (sur une échelle de 1 à 5).

Preuve que Stellantis a acquis une envergure planétaire avec ses huit millions de ventes potentielles (c'est-à-dire hors période Covid), le groupe a signé des partenariats avec des partenaires majeurs. Outre BMW, il va concevoir des microcontrôleurs avec Foxconn (le fabricant sous-traitant de l'iPhone), et développer de l'intelligence artificielle avec Waymo (la filiale voiture autonome de Google).

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Avec ces annonces, Carlos Tavares se met au diapason d'un secteur de plus en plus tourné vers le software. D'après PwC, le logiciel contribuera à 60% de la chaîne de valeur de l'industrie automobile à l'horizon 2030. Cette brique technologique aura d'ailleurs été l'un des grands tournants structurels de l'automobile cette année avec l'annonce en janvier dernier du plan Volkswagen, lequel doit faire du logiciel l'un des fers de lance de la lutte contre Tesla pour les 10 prochaines années. Le groupe allemand a créé une structure dédiée avec un objectif de 11.000 ingénieurs software avant 2025. De son côté, Renault a répliqué en lançant la Software République. Le groupe automobile français préfère ainsi mutualiser les frais de recherche avec d'autres sociétés expertes.

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Volkswagen s'est lancé

Ici, Stellantis choisit une voie médiane entre une recherche 100% intégrée et un  écosystème (Carlos Tavares veut compléter son équipe d'ingénieurs d'une Software Académie). Mais le groupe n'a pas communiqué sur l'essentiel : l'operating system. Il s'agit du système qui permet de contrôler l'ensemble des applications et équipements, une sorte de Windows pour automobile. Pour les experts, l'enjeu de la guerre logicielle qui va sévir dans l'industrie automobile se jouera essentiellement autour de la possession d'un OS ou de son partage, à la manière d'un Apple et de son iOS ou d'un Samsung qui utilise le même OS (Android) que les autres fabricants de téléphone. Un OS "propriétaire" garantit la possibilité de créer un univers différenciant, mais il coûte extrêmement cher à développer.

Seul Tesla dispose d'une telle solution en propre et lui permet d'améliorer considérablement l'expérience de conduite et de vie à bord. De ce point de vue, l'entreprise d'Elon Musk est positionné à des années des constructeurs traditionnels. C'est pour suivre ce modèle que Volkswagen a annoncé qu'il développera son propre OS. Stellantis promet une réponse pour plus tard... Peut-être à l'occasion de son plan stratégique ?

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Nabil Bourassi

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Commentaires 4
à écrit le 08/12/2021 à 11:54
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c'est comme les darty et consors, ils ne voulaient plus vendre des frigos a faible marge qui consomment de la tresorerie, ils preferaient vendre des contrats d'assurance a tres forte marge, vu les taux de panne dans les delais couverts........je croi...

à écrit le 08/12/2021 à 9:34
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Quand j’achète une voiture,je m’intéresse à sa carrosserie ,son moteur ,son confort,sa consommation mais pas à son « informatique ». Longtemps amateur d’Alfa Roméo,j’y trouvais mon bonheur mais actuellement trop gros et cher pour moi.

à écrit le 08/12/2021 à 9:15
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Quand on voit l historique du Puretech Peugeot, une calamité en terme de distribution, passé sous silence si vous n êtes pas au plus près des infos, la nouvelle donne ou , méthode, endiguera la connaissance sur la fiabilité....

à écrit le 07/12/2021 à 20:23
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Naguère, le 1er point que tu vérifiais avant d'acheter une bagnole, c'était la mécanique du bolide! Maintenant si tu demandes à voir ce qu'il y a sous le capot, le vendeur ne sait plus l'ouvrir et te sort son smartphone pour te montrer l'App maison ...

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