Les Français leaders de la décarbonation automobile ? D'après le dernier pointage de l'institut JATO, arrêté à fin octobre, PSA et Renault sont sur les deux premières marches du podium des groupes automobiles les plus vertueux en termes d'émissions carbone.
L'effet des super-crédits
Le groupe PSA consolide sa position de numéro un européen avec moins de 94 grammes de CO2 par kilomètre par voiture vendue cette année. L'Alliance Renault Nissan Mitsubishi arrive juste derrière avec à 95 grammes, suivie de Hyundai-Kia puis Toyota (96,8). Mais l'institut Jato a volontairement modifié ce classement pour montrer le rôle déterminant des "supercrédits" dans la performance de chaque constructeur. L'Union européenne accorde en effet aux constructeurs des bonus aux ventes de voitures 100% électrique mais également aux voitures émettant moins de 50 grammes de CO2 par kilomètre.
Ces supers bonus ont ainsi permis à PSA de basculer en dessous de son objectif assigné de 93 grammes au-dessus duquel une amende de 95 euros par gramme supplémentaire par voiture vendue lui aurait été appliquée.
C'est encore plus frappant pour l'Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi qui évite d'afficher 105,5 grammes de CO2, et gagne ainsi quasiment 11 grammes de moins. Sans ces supercrédits, Toyota serait sur la deuxième place du podium et Hyundai-Kia en quatrième place derrière l'Alliance.
Plus grave, ce sont les marques les plus polluantes qui même avec de conséquents superbonus, sont très loin d'être dans les clous. Ainsi, le groupe Daimler (Mercedes, Smart) économise 13,3 grammes de CO2 grâce aux ventes de voitures plus vertueuses. Pour autant, le constructeur allemand a vendu en moyenne 122,6 grammes de CO2 en 2019. L'objectif assigné au groupe Daimler a toutefois pris en compte la typologie de sa gamme et a été fixé à 100 grammes. Même problématique pour Jaguar Land Rover qui affiche 160 grammes, le record européen, malgré ses 13 grammes économisés.
Des amendes qui se comptent en milliards
En 2019, l'institut JATO avait appliqué cette règle de calcul sur les ventes enregistrées en 2018 pour donner une idée du chemin à parcourir. Le groupe PSA était alors à 114 grammes, un niveau correspondant à une amende de 5,39 milliards d'euros. Le groupe Volkswagen avait, lui, 26 grammes à récupérer... Soit une amende de 9,2 milliards d'euros. Un chiffre qui n'est pas seulement proportionnel à l'écart avec l'objectif mais qui aussi fonction du nombre de voitures vendues. Sur le dernier pointage, le groupe qui rassemble les marques Skoda, Seat et Audi (entre autres) a affiché une moyenne d'émission de 103 grammes, là aussi grâce aux supercrédits qui lui font économiser 11,6 grammes.
Ces supercrédits pourraient ainsi limiter les dégâts pour les groupes automobiles déjà largement ébranlés par la crise sanitaire qui a fait plonger les ventes et les profits. Certains groupes ont réclamé un moratoire sur ces objectifs CO2 pour prendre en compte la situation particulière de la crise du coronaviru. Mais il a été finalement rejeté par la commission et diversement soutenu par les groupes automobiles.
Le business des rachats de quotas
Certains avaient argué avoir engagé de lourds investissements pour être dans les clous, tandis que d'autres avaient déjà signé des rachats de crédits. Fiat Chrysler Automobiles avait été le premier à acheter des crédits à Tesla pour 1,8 milliard d'euros sur trois ans. D'ailleurs, le commerce de quotas constitue la principale source de profits de Tesla depuis le début de l'année.
Même Volkswagen a dû recourir à ce mécanisme pour limiter son exposition aux amendes en passant un accord avec la marque MG. Pourtant le groupe aux dix marques avait lancé une foule de modèles électrifiés. Il semblerait toutefois que le produit-phare de cette stratégie, l'ID3, a rencontré d'importants retards de commercialisation (quasiment un an sur le calendrier initial). Depuis septembre, Volkswagen tente de rattraper le retard en poussant les ventes, tant est si bien que l'ID3 est devenue la voiture électrique la plus vendue en Europe en octobre. Il est encore possible que le groupe accélère en novembre et décembre.
Zoé, numéro Une en Europe
En attendant, avec sa Zoé et ses 84.000 ventes, c'est Renault qui garde la tête du palmarès des voitures électriques les plus vendues en Europe depuis le début de l'année. Le groupe mutualisera néanmoins ses quotas d'émissions avec Nissan et Mitsubishi. Nissan assure pourtant être dans les clous grâce à sa Leaf, numéro un mondial des ventes avec 500.000 voitures vendue en 10 ans.
Il reste encore deux semaines pour immatriculer un maximum de voitures vertueuses et limiter les amendes. Certains évoquent déjà des immatriculations fictives de voitures électriques (voitures de démonstration...), ou d'importantes remises. Cela coûtera toujours moins cher que de payer des amendes. Il semble désormais acquis que les Français y échappent...
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