Renault à son tour rattrapé par le "dieselgate"

Le constructeur automobile a été mis en examen mardi soir pour "tromperie sur une marchandise entraînant un danger pour la santé de l'homme ou de l'animal". L'enquête préliminaire avait révélé la présence d'un logiciel installé sur ses voitures diesel visant à potentiellement tromper les contrôles anti-pollution. Le groupe Renault, qui nie toute fraude, a fait savoir ce mardi qu'il déposera un cautionnement de 20 millions d'euros et donnera une garantie bancaire d'un montant de 60 millions d'euros pour indemniser les éventuels préjudices.
Pour Gilles Le Borgne, directeur de l'ingénierie du groupe Renault, les écarts d'émission entre les cycles mesurés et l'usage des clients ne sont ni nouveaux ni surprenants et correspondraient à l'ancienne norme de mesures des émissions (NEDC).
Pour Gilles Le Borgne, directeur de l'ingénierie du groupe Renault, les écarts d'émission entre les cycles mesurés et l'usage des clients "ne sont ni nouveaux ni surprenants" et correspondraient à l'ancienne norme de mesures des émissions (NEDC). (Crédits : Stephane Mahe)

L'étau du "dieselgate" se resserre autour du constructeur automobile Renault. Plus de cinq ans après un premier rapport de la Répression des fraudes et quatre après l'ouverture d'une information judiciaire suspectant des fraudes aux contrôles anti-pollution, le géant français a été mis en examen mardi en France "du chef de tromperie sur une marchandise entraînant un danger pour la santé de l'homme ou de l'animal".

Les premières investigations initiées ont relevé la présence d'un logiciel installé sur ses voitures diesel pour potentiellement tromper les contrôles anti-pollution. Une commission d'experts indépendants avait été mise en place en octobre 2015 par la ministre de l'Environnement Ségolène Royal, après le scandale Volkswagen, et était chargée d'effectuer des tests sur une centaine de véhicules vendus en France. Ses travaux avaient révélé d'importants dépassements des seuils de pollution chez certains constructeurs, en particulier Renault. Ses conclusions ont été transmises à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Une pratique qui pourrait remonter aux années 1990

La Répression des fraudes notait des écarts allant jusqu'à 377% entre les performances de certains modèles Renault au moment de leur homologation en laboratoire et lors de leur utilisation en conditions réelles.

Les moteurs concernés sont tous ceux de la génération Euro 5 (2009-2011) et Euro 6B (2013-2017). S'appuyant sur le témoignage d'un ex-salarié, les enquêteurs estimaient que certaines pratiques auraient débuté en 1990. Une information judiciaire avait été ouverte le 12 janvier 2017.

Dans un communiqué publié mardi soir, le groupe Renault, présumé innocent, "conteste avoir commis la moindre infraction et rappelle que ses véhicules ne sont pas équipés de logiciels de fraude aux dispositifs de dépollution".

"Il n'y a pas et il n'y a jamais eu de logiciel truqueur dans les moteurs Renault", a martelé mardi Gilles Le Borgne, directeur de l'ingénierie du groupe Renault et ancien de PSA, mettant en avant "deux expertises indépendantes" qui le démontreraient. Les écarts d'émission entre les cycles mesurés et l'usage des clients "ne sont ni nouveaux ni surprenants" et correspondraient à l'ancienne norme de mesures des émissions (NEDC).

Des millions d'euros déjà provisionnés

Le groupe Renault, qui a vendu 2,9 millions de véhicules en 2020, a fait savoir ce mardi qu'il déposera un cautionnement de 20 millions d'euros, dont 18 millions d'euros pour l'éventuel paiement des dommages et des amendes, et donnera une garantie bancaire d'un montant de 60 millions d'euros pour indemniser les éventuels préjudices. 

Ces provisions financières interviennent dans un contexte morose pour Renault. Le groupe a enregistré en 2020 un chiffre d'affaires en baisse de 22% à 43,5 milliards d'euros (-18% à taux de change constants). Le résultat d'exploitation a basculé en territoire négatif à 2 milliards d'euros de pertes, contre 2 milliards de profit en 2019. Plus spectaculaire, le résultat net ressort au niveau historique de 8 milliards d'euros de pertes.

Le spectre Volkswagen et son amende record

Mais si l'entreprise est condamnée au terme de la procédure judiciaire, les dommages financiers pourraient être plus élevés que ceux provisionnés au regard des amendes et indemnisations faramineuses payées par Volkswagen, dont le logiciel truqueur avait fait exploser le scandale du "dieselgate".

En 2015, le constructeur allemand reconnaissait avoir équipé 11 millions de ses véhicules diesel d'un logiciel capable de dissimuler des émissions dépassant parfois jusqu'à 40 fois les normes autorisées. La procédure a déjà coûté 30 milliards d'euros à Volkswagen, en grande partie aux États-Unis où le groupe allemand a plaidé coupable de fraude en 2017. Et son ex-PDG, Martin Winterkorn, a été sommé de payer 11 millions d'euros à son ancien employeur au titre de "dommages et intérêts pour manquements".

Lire aussi 2 mnDieselgate : l'ex-patron de Volkswagen va payer 11 millions d'euros

 L'ancien patron de l'alliance Renault-Nissan, Carlos Ghosn, qui avait rejoint Renault en 1996 en qualité de vice-président en charge de la recherche avancée, pourrait-il lui aussi être inquiété ? Fin mai, des magistrats français en déplacement au Liban, dans le cadre d'investigations en lien avec de potentiels "abus de biens sociaux" reprochés à l'ancien magnat de l'automobile, l'ont également interrogé sur l'affaire présumée du dieselgate, en qualité de témoin.

Trois autres constructeurs sont susceptibles d'être mis en examen à leur tour en France. Outre Renault, trois informations judiciaires distinctes à Paris visent Volkswagen, mais aussi PSA (Peugeot-Citroën) et Fiat-Chrysler, tous trois désormais mariés dans le groupe Stellantis.

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Commentaires 5
à écrit le 09/06/2021 à 15:48
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Quelle surprise que les chantres du diesel soient épinglés à leur tour. La supercherie du diesel subventionné depuis de trop longues années par l'Etat français ! Tout cela donne raison à tous ceux qui mettaient en garde sur la dangerosité de ces véhi...

à écrit le 09/06/2021 à 15:00
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J'ai bien du mal à croire que Renault seul ait été capable de mettre au point un logiciel truqueur, bien sur c'était banal de voir en côte un loustic ignorant du code de la route avec sa mégane diésel tentant d'empêcher un dépassement fumer tellement...

à écrit le 09/06/2021 à 14:59
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J'ai bien du mal à croire que Renault seul ait été capable de mettre au point un logiciel truqueur, bien sur c'était banal de voir en côte un loustic ignorant du code de la route avec sa mégane diésel tentant d'empêcher un dépassement fumer tellement...

à écrit le 09/06/2021 à 10:05
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Depuis le début, dans cette affaire du diésel, c'est surtout l'état français, qui devrait être poursuivi : En effet, c'est lui qui, en détaxant le gazole, a entrainé cette folie du diésel

à écrit le 09/06/2021 à 9:48
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Eh ben on a l explication du mariage fiat-Peugeot: mutualisation des amendes et pénalités .... à venir Pour protéger ses constructeurs auto lnos politiques français oing interdit en France le recours aux ckass- actions donc pas étonnant que l on tr...

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