Thierry Bolloré, une main de fer dans un gant de velours ?

Après plusieurs mois d'atermoiements, Carlos Ghosn a fini par proposer le nom de Thierry Bolloré pour devenir numéro deux de Renault, et in fine, lui succéder à la tête du groupe. Ce financier, converti à l'industrie, est passé par Faurecia et Michelin, avant d'atterrir chez Renault en 2012. Affable et travailleur, ce breton espère se démarquer du style, réputé musclé, de son mentor...
Nabil Bourassi
Thierry Bolloré pourrait ramener un vent nouveau de sérénité et de fraîcheur, propice à la créativité et à l'initiative individuelle.
Thierry Bolloré pourrait ramener un vent nouveau de sérénité et de fraîcheur, propice à la créativité et à l'initiative individuelle. (Crédits : Reuters)

"Serez-vous capable de faire de la place à votre numéro deux ?", lance un journaliste au Pdg Carlos Ghosn, au lendemain de la nomination de Thierry Bolloré (le grand favori) au poste de COO ou, en français, directeur général délégué. Loin de le contredire, le puissant patron du groupe français (le CEO) ironise : « Je vais apprendre un nouveau métier », laissant échapper un rire d'approbation.

C'est donc Thierry Bolloré qui aura la rude tâche d'être le numéro deux de Renault, celui qui, en principe, succédera à Carlos Ghosn, âgé de 63 ans. Un choix assez naturel pour ce financier converti à l'industrie, après être passé par les équipementiers Faurecia et Michelin.

Le poste de numéro deux de Renault ? Un siège éjectable qui a déjà eu raison de deux patrons : Patrick Pélata, fusible de la fausse affaire d'espionnage, et Carlos Tavares, soupçonné de vouloir « tuer le père ».

Qui est vraiment Thierry Bolloré ?

Thierry Bolloré, un homme décrit comme affable et doté d'un appréciable et subtil sens de la repartie, maniant les tournures sémantiques avec brio et élégance. Un brin « vieille France » ? Pas vraiment... Ce Quimpérois de 54 ans fait de sa pondération son principal atout de séduction. Son élocution, son sourire et sa prestance passent partout : avec les syndicats pour les accords de compétitivité, en Iran pour de nouveaux accords avec le partenaire local, même avec les journalistes, parfois lassés d'un Carlos Ghosn froid et inaccessible.

Thierry Bolloré, c'est aussi un homme de dossiers au parcours brillant, totalement converti au métissage des cultures industrielles dont l'Alliance Renault-Nissan se veut à la pointe.

« Il faut regarder les résultats économiques de Renault, Thierry Bolloré est évidemment comptable de ce niveau de performance », explique un spécialiste de l'industrie automobile.

En tant que directeur délégué à la compétitivité, n'était-il pas responsable de l'ingénierie, de l'industriel, du design, du produit, de la voiture connectée et autonome, des programmes ? Il a même la confiance des Japonais en vertu de son passage au pays du Soleil-Levant, ce qui lui vaut d'être membre du directoire de l'Alliance.

« Thierry Bolloré est très avancé sur de nombreux sujets, tout en créant une stabilité dans la gouvernance », tranche un analyste.

Un autre observateur du constructeur automobile explique aussi :

« Il y a peu de gens chez Renault qui soient capables d'imposer leurs idées, compte tenu de la personnalité et de la mainmise de Carlos Ghosn. »

Une nomination à l'unanimité

Autrement dit, il est le mieux placé pour composer avec le grand patron, sans rien perdre de l'efficacité opérationnelle. D'ailleurs, Carlos Ghosn, en gage de sa bonne volonté, a bien précisé que le périmètre de compétences dévolu à son nouveau poulain serait plus large que celui de ses prédécesseurs. Ainsi, le directeur financier et les services RH devront également rendre compte au nouveau COO.

Dans une maison où le charisme de Carlos Ghosn règne à tous les échelons de l'entreprise, Thierry Bolloré pourrait ramener un vent nouveau de sérénité et de fraîcheur, propice à la créativité et à l'initiative individuelle. Sa nomination fait l'unanimité, mais l'histoire ne dit pas encore si c'est pour sa capacité à assurer cette rupture dans la continuité, ou s'il incarne le choix du statu quo pour préserver la stature de l'indéboulonnable Carlos Ghosn.

Nabil Bourassi

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Commentaires 3
à écrit le 02/03/2018 à 14:10
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La nomenklatura à l’œuvre.....:)

à écrit le 02/03/2018 à 10:19
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Non une banale stratégie de réseaux, classique mais aléatoire.

le 02/03/2018 à 18:36
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Quand on choisit un PDG (ou futur) PDG à l' extérieur; on dit que c'est du parachutage, quand on le choisit en interne (de loin la meilleure stratégie quand les résultats de l' entreprises sont bons) on dit que que c' 'est la nommenklatura ou "la st...

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