LA TRIBUNE- En février 2020, juste avant le premier confinement, vous annonciez vouloir réaliser plus d'un milliard d'euros de chiffre d'affaires à horizon 2025. La crise économique et sanitaire vous a-t-elle fait revoir cet objectif à la baisse ?
PAULINE DUVAL- Au contraire, nous y sommes presque. En 2021, nous avons réalisé 820 millions d'euros de chiffre d'affaires dont 300 millions en promotion immobilière en continuant de nous développer à travers nos dix agences en France : Aix, Bordeaux, Fort de France, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Rennes et Strasbourg. De la même façon que notre assistant à la maîtrise d'ouvrage Alamo continue de croître et que notre filiale de gestion d'actifs compte désormais 2,7 milliards d'euros d'actifs. Notre groupe familial a poursuivi sa digitalisation, son internationalisation et sa diversification. Tant est si bien que dès 2023, nous atteindrons le milliard d'euros de chiffre d'affaires.
Comment ?
Nous avons accéléré notre développement international. Nous sommes présents en Afrique sur nos métiers traditionnels. Mon père et mon frère développent aussi fortement notre présence, sur le continent africain, dans les métiers de la microfinance et de l'assurance mais aussi du forage d'eau qui est un enjeu majeur de santé publique. Nous sommes désormais présents au Cameroun, en Côte d'Ivoire, en Guinée, au Rwanda, à Sao Tomé, au Togo, au Sénégal, au Burkina Faso, au Ghana, et au Congo. De la même manière qu'en matière de golf, nous venons d'acquérir notre principal concurrent Blue Green, qui compte 46 spots en France. L'ensemble réalisera plus de 110 millions d'euros de chiffre d'affaires et deviendra le sixième acteur mondial. Nous sommes fiers ainsi de porter haut les couleurs du golf français. Notre volonté est de continuer à démocratiser l'accès au golf.
A l'heure de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs dite « RE2020 » ou du décret tertiaire qui intime aux propriétaires bailleurs et occupants de surfaces de 1.000 m² de réduire drastiquement réduire leurs consommations d'énergie, soutenir le golf est-il vraiment écologique ?
C'est dans notre ADN. Être un groupe familial donne sans doute encore davantage conscience de l'importance que nous devons apporter au contexte environnemental et sociétal dans lequel nous nous inscrivons et que nous voulons transmettre aux générations futures. Notre âme familiale nous conduit à porter une grande attention au monde qui nous entoure et aux enjeux de développement durable qui y sont liés. Ainsi, dans certains golfs, nous n'utilisons déjà plus aucun produit phytosanitaire. Nous sommes par ailleurs labellisés écocert. Nous engageons enfin des programmes de biodiversité. Nous introduisons par exemple des ruches et des carpes. Nous permettons par ailleurs à des porteurs d'innovation positive de les tester chez nous, comme l'engrais à base de sang animal.
Et la gestion de l'eau ?
Nous faisons hyper attention ! Ces engrais permettent de nourrir la terre et de consommer moins d'eau. Plus généralement, cela fait cinq ans que nous publions des rapports RSE et que chaque patron de filiale est engagé personnellement sur ces sujets. Notre comité RSE est constitué d'opérationnels pour gérer au plus près et apporter des réponses durables pragmatiques. Sur la promotion immobilière comme sur l'assistance à la maîtrise d'ouvrage, nous étudions des innovations qui nous permettraient de construire avec du ciment plus vert par exemple.
C'est-à-dire ?
Nous analysons en ce moment différents sujets. A chaque fois que nous avons une innovation, nous essayons de la confronter à des solutions internes. Si l'innovation ne peut être menée à l'échelle, cela ne fonctionnera pas. Dans un autre registre que le ciment, le bois a une empreinte carbone telle que s'il est importé du Canada, cela n'a plus de sens de construire ainsi. En tant que dirigeante, je me refuse à ces choix qui n'ont pas un véritable sens écologique. En revanche, nous aménageons des mini-forêts urbaines sur nos centres commerciaux (avant même que cela soit à la mode) et essayons de développer des panneaux photovoltaïques sur nos bâtiments et parkings. Déjà 60.000 m² ont été installés. Nous avons également en la matière une croissance externe à venir.
De quel ordre ?
Nous avons deux gros projets dans les tuyaux. Ce n'est qu'une question de semaines avant de pouvoir l'annoncer.
De quoi s'agit-il ?
Il s'agit de poursuivre les synergies avec nos métiers actuels et d'intégrer toute la chaîne de valeur des métiers de l'immobilier.
Le soin des personnes âgées dans les maisons de retraite fait actuellement débat. Faut-il interdire les EHPAD à but lucratif, comme le propose le candidat écologiste Yannick Jadot ? Avant la Covid, votre groupe voulait passer de 3 à 35 résidences « Bien vieillir » d'ici à 2025.
Il ne faut idéaliser ni la gestion publique ni la gestion privée. Il faut regarder les enjeux lucidement sans prisme politique. Toujours est-il que nous sommes sortis de ce métier depuis longtemps et que nos résidences seniors ne sont pas médicalisées et s'adressent à des personnes autonomes. Ce n'est pas du tout le même métier. Je peux vous dire que j'ai à cœur qu'il ne se passe jamais chez nous ce qui est décrit dans certains EHPAD. Sans généralité, je n'aurais jamais accepté que mes grands-parents soient ainsi traités. Je n'accepterai donc jamais que nos clients le soient ainsi.
En revanche, nous avons toujours autant de projets de nouvelles résidences seniors dans les tuyaux, mais la Covid fait que cela prendra un peu plus de temps que prévu. Comme vous le savez, tous les chantiers de promotion immobilière se sont arrêtés pendant le premier confinement. Sans parler des sujets d'approvisionnement et de coûts des matières premières. C'est pourquoi pour en faciliter la gestion, nous avons créé une direction commune à Happy Seniors et à Odalys.
Justement, qu'en est-il pour votre filiale Odalys qui gère et commercialise au moins 400 résidences de tourisme en France et en Europe du Sud ? Vous aviez le projet d'en ouvrir une de plus tous les mois dans les cinq ans.
L'hiver 2020-21 a été difficile à cause de la fermeture des remontées mécaniques mais l'hiver 2021-2022 est une excellente saison pour notre groupe grâce à l'engagement de nos équipes. Nous n'hésiterons pas d'ailleurs à nous positionner sur des opérations de croissance externe.
Sans transition, que vous inspire le fait qu'il n'y ait pas plus qu'une licorne française dans l'immobilier, vous qui avez investi très tôt dans la proptech ?
D'abord, l'immobilier, c'est une question de temps long. Ensuite, c'est un secteur très très large. De nombreux acteurs tentent de faire bouger la filière. Certains essaient de révolutionner des métiers comme la transaction. D'autres s'appuient sur la blockchain. Les lignes bougent. Cela va dans le bon sens.
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