Comment Maille Immo construit l'immobilier connecté de demain

Blockchains, transition énergétique, jumeaux numériques, bâtiments intelligents mais aussi sécurisation, pilotage des consommations d'énergie, objets connectés etc. : les expérimentations se multiplient au sein du cluster nordiste dédié à l'immobilier de Maille Immo.
(Crédits : Maille immo)

Dans toute construction, il faut des fondations solides. Innovation, expérimentation et formation ont été, dès le départ, les trois piliers de Maille Immo. Ce cluster, dédié à l'innovation dans l'immobilier, a été initié en 2019 par un trio : le groupe immobilier Sergic (4ème acteur français de la gestion immobilière), le constructeur Rabot Dutilleul et les services énergétiques Dalkia (filiale d'EDF).

« Notre modèle interpelle : je ne lui connais pas d'équivalent en France », explique Corentin Brabant, directeur de Maille Immo. « Nous ne sommes pas qu'un incubateur, nous sommes un cluster de compétences rassemblant autant les grandes entreprises, les jeunes pousses et des institutions comme la mairie de Roubaix ou la Plaine Images (site d'excellence européen consacré aux industries créatives comme l'image ou l'audiovisuel) ».

Bienveillance, simplicité d'échange, partage d'expérience et non concurrence sur la chaîne de valeur sont les maîtres mots d'un fonctionnement qui s'intéresse actuellement au BIM (Building Information Modeling) qui vise non seulement à optimiser les opérations de maintenance, mais aussi à réaliser des économies d'énergie grâce aux réseaux connectés tout en essayant de permettre du bien-vivre ensemble via les nouvelles technologies.

Maintenance et prévention

« Nous avons par exemple lancé deux expérimentations concernant la maintenance et la prévention des dysfonctionnements », poursuit Corentin Brabant. Le premier projet va modéliser une copropriété de trois appartements pour associer les occupants à la gestion d'ensemble de l'immeuble. Le deuxième projet, mené lui au sein d'un bâtiment neuf, s'attèle à suivre le "parfait achèvement" du bâtiment, en fluidifiant la communication entre les multiples acteurs. Le tout utilise bien sûr des innovations en matière de capteurs, d'IoT (internet of things) et de GMAO (gestion de maintenance assistée par ordinateur).

Le cluster a également travaillé sur les sujets de l'énergie et du bien-vivre ensemble. « Nous avons identifié un bâtiment, géré par Vilogia, où nous allons pouvoir expérimenter des animations sur le tri des déchets auprès de 200 occupants, par exemple », indique le directeur de Maille Immo. Le troisième sujet étudié de près par le jeune cluster porte sur l'intelligence artificielle et la blockchain. Comme par exemple le décryptage de documents techniques d'un bâtiment, pour intégrer les désormais très importantes notions de performance énergétique.

Les besoins des partenaires de Maille Immo ont, en parallèle, fait naître des outils communs, par exemple, pour la conduite des entretiens professionnels, l'établissement d'une grille de lecture des risques psychosociaux ou la mutualisation de socles de formations. « Maille Immo s'oriente depuis le début de l'année sur des expérimentations un peu plus larges qu'un bâtiment : nous réfléchissons par exemple à répondre à des besoins de réaménagement à l'échelle d'un quartier. C'est clairement notre ambition pour les années à venir », souligne Corentin Brabant.

Expérimentations concrètes

Depuis le lancement de Maille Immo il y a 18 mois, les expérimentations se sont multipliées, en renforçant les expertises et les liens entre entreprises et startups. Le trio des cofondateurs de départ a été étoffé par d'autres acteurs de l'immobilier, pour atteindre 17 partenaires. « C'est bien la preuve que de plus en plus d'entreprises de la filière ont besoin de réinventer leurs métiers », veut croire Corentin Brabant, directeur de Maille Immo.

Vilogia (bailleur social), Bouvier (sécurité incendie), Decayeux (boîtes aux lettres et colis) ont adhéré à la démarche à travers un premier appel à projets en 2020. Ils ont été rejoints ensuite Moduo (consultant en ingénierie), Projexion (gestion de projets), Otis (ascenseurs), Sada (assurance des professionnels de l'immobilier), Aréli (bailleur social associatif), Ista (comptage individuel d'eau et de chauffage) et Logista (hometech).

 « Nous avons accueilli également des contributeurs, qui apportent d'autres points de vue comme l'association Lazare, qui soutient des SDF et autres actifs en insertion, l'Université des compétences habitat de Lille, Gexpertise (bureau de mesures et de topographie), Cleaning bio (NDLR : société spécialisée en nettoyage présidée par Yann Orpin, par ailleurs président du MEDEF Lille Métropole) et le projet de ville renouvelée à Tourcoing », liste Corentin Brabant.

Binômes start-up/entreprises

Que de chemin parcouru, donc, depuis le premier appel à projets, lancé avec Euratechnologies en 2019. Les huit premiers binômes start-up/partenaires ont permis de tester plusieurs projets grandeur nature.

Avec Cozy Air, Nacarat (qui appartenait au groupe Rabot-Dutilleul jusque début 2020) a par exemple déployé des capteurs connectés pour piloter la qualité de l'air intérieur : les datas récoltées, traitées via un algorithme, sont restituées sur une interface au collaborateur, afin que ce dernier puisse agir. Toujours avec Rabot-Dutilleul, Digiphyse a pu faire évoluer sa solution de visites virtuelles, qui permet de tester un futur bureau, de visualiser les possibilités d'aménagement d'un plateau en 2D et en 3D, en permettant à l'utilisateur de faire évoluer par lui-même les plans et les agencements.

De son côté, le groupe immobilier Sergic a travaillé avec la communauté de propriétaires-bailleurs Les Corsaires, startup incubée à Lyon en 2018 : cette plateforme mise sur l'entraide et le service afin de permettre de gérer son bien immobilier par soi-même. L'administrateur de biens basé à Wasquehal, dans la métropole lilloise, a également noué un partenariat en proposant la mise en place d'une assurance habitation solidaire avec Stirrup, plateforme permettant de trouver une solution transitoire de logement (entre trois et six mois) pour des personnes en difficulté suivies par des associations.

Sergic travaille aussi désormais avec la solution de la startup lilloise Paprwork qui a conçu une solution en ligne de collecte et de documents personnels. Sans qu'il y ait de lien direct avec cette nouvelle collaboration, rappelons qu'en 2019, le gestionnaire de biens avait été condamné par la CNIL à 400.000 euros d'amende pour un défaut de sécurité qui avait laissé en libre-accès des milliers de dossiers de demande de logements.

Economies d'énergies et transition

Autre grand acteur du logement social en France, Vilogia a pu tester dans l'une de ses résidences lilloises le concept d'OGGA et sa solution baptisée Eco-touch pour aider les locataires à maîtriser leurs factures d'énergie : le suivi et les consommations s'affichent, le pilotage pouvant également être fait à distance. Le bailleur a même décidé d'aller plus loin en installant Eco-Platform, outil de surveillance en temps réel des raccordements comme les VMC ou les portes de garage, afin de mieux gérer l'entretien et prévenir les dysfonctionnements.

Toujours dans l'optique de connecter les bâtiments, My Digital Building, incubée à Innovallée près de Grenoble, a permis d'expérimenter la création d'un jumeau numérique de bâtiment, soit avec une maquette numérique type BIM (Building Information Modeling), soit à la manière d'un Google Street View, via des techniques de scan en 3D ou à 360°.

Le spécialiste de la boîte aux lettres Decayeux et Bouvier Sécurité Incendie ont, quant à eux, suivi Keepen, qui a mis au point une solution B2B de télésurveillance pour l'habitat urbain. Le produit combine un système d'alarme, un suivi des entrées et sorties par application mobile et une alerte par SMS ou appel en cas d'intrusion. L'objectif commun affiché étant bien évidemment la digitalisation des services aux résidents et la sécurisation de l'habitat.

2e promo de start-ups

Une deuxième promotion de startups a vu arriver cette année au sein de Maille Immo MyLoby, qui gère les transferts de responsabilité d'objets, comme des clefs par exemple, d'un lieu vers une personne grâce à la blockchain ; Solioty et ses murs végétaux autonomes et connectés pour les professionnels de l'immobilier ; Bioteos qui améliore la qualité de l'air des villes grâce aux microalgues ; LocFindr qui permet la mise en relation de candidats locataires certifiés ; Tylto qui automatise les tâches de gestion locative à faible valeur ajoutée via un service SaaS ; Aux Petits Oignons, plateforme de colocation pour retraités ; Vestack qui construit des bâtiments bas-carbone grâce à des modules préassemblés et fabriqués à partir de matériaux biosourcés.

L'engouement des jeunes pousses pour le secteur est tel qu'Euratechnologies a ouvert en fin d'année dernière Prop3rty, un incubateur dédié aux startups qui œuvrent à l'immobilier du futur. Avec évidemment Maille Immo comme premier partenaire. Il devrait y avoir de la place pour tout le monde : le secteur de la "proptech" a levé plusieurs dizaines de milliards d'euros ces trois dernières années. Les entreprises françaises dans le domaine auraient réussi à lever près de 500 millions en 2019. Et cela ne pourrait être qu'un début.

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