Brevets : pourquoi plusieurs laboratoires se mêlent de la guerre entre Sanofi et Amgen

Amgen accuse Sanofi et Regeneron d'enfreindre le brevet du Repatha, un anticholestérol. Eli Lilly et Pfizer ont pris position pour le géant pharmaceutique français, car ils craignent d'être attaqués à leur tour. Abbvie s'est quant à lui rangé du côté d'Eli Lilly, s'inquiétant une décision qui pourrait affaiblir les brevets dédiés aux anticorps en général.
Jean-Yves Paillé
Si Amgen obtient in fine gain de cause contre Sanofi et Regeneron dans cette guerre des brevets, il pourrait opter pour une solution alternative et obtenir des royalties venant des ventes du. Praluent

Sanofi est toujours dans l'incertitude quant au maintien du Praluent, potentiel blockbuster, sur le marché américain. Amgen est en effet engagé une procédure judiciaire, estimant que l'anticholestérol développé par le géant pharmaceutique français et Regeneron viole un brevet utilisé par son médicament, le Repatha, un autre anticholestérol également basé sur des anticorps monoclonaux anti-PCSK9 (il s'agit d'une protéine associée au cholestérol).

Une décision de la court de district du Delaware préconisait de faire retirer de la vente aux Etats-Unis le Praluent de Sanofi pendant 12 ans, alors qu'il avait obtenu un feu vert de l'Agence américaine des médicaments le 24 juillet. Cette décision de justice devait être mise en œuvre le 21 février. Mais Sanofi a obtenu début février une suspension de l'injonction permanente.

Alliés de circonstance

Depuis quelques jours, le géant pharmaceutique français peut compter sur des alliés de circonstance dans cette guerre des brevets. Les géants pharmaceutiques Eli Lilly et Pfizer ne veulent pas qu'Amgen obtienne gain de cause, craignant que la justice tranche pour une protection au sens large des brevets sur les anticorps, et non pour une protection des mécanismes spécifiques d'anticorps.

Les trois laboratoires redoutent qu'avec une décision favorable à Amgen d'autres médicaments de cette classe thérapeutique soient accusés de violer des brevets, et soient donc menacés à l'instar du Praluent. Pfizer, par exemple, a travaillé sur des traitements basés sur des anticorps monoclonaux PCSK9. Eli Lilly développe, quant à lui, un anticorps monoclonal PCSK9 en phase II contre des maladies cardiovasculaires.

Pour tenter de forcer le destin, le laboratoire américain spécialisé dans le diabète a saisi une court d'appel fédérale en espérant que celle-ci rende une décision favorable à Sanofi et Regeneron. Argument massue avancé par Eli Lilly : si la justice donne raison à Amgen, des médicaments pourrait être retirés du marché, et les patients américains pourraient en pâtir.

Abbvie, à la fois ennemi et allié d'Amgen

De son côté, Amgen s'est aussi fait un allié: Abbvie. Les deux laboratoires sont pourtant en guerre sur une autre affaire. Amgen tente de développer un biosimilaire de l'Humira, blockbuster d'Abbvie et médicament le plus vendu au monde -il est destiné à traiter l'arthrite, la maladie de Crohn, le psoriasis ou encore la colite ulcéreuse . Mais dans l'affaire Sanofi-Regeron-Amgen, Abbvie a d'autres intérêts à faire valoir. Il a demandé à une court fédérale de faire respecter la décision de retirer le Praluent du marché américain. Son argument : les anticorps coûtent cher à produire et doivent mériter des protections fortes autour de leurs brevets spécifiques.

Pour Abbvie, une meilleure protection signifie un médicament vendu plus cher, au prix juste par rapport à son coût de développement. Dans son pipeline, le laboratoire américain ne développe pas de médicaments anticholestérol, mais des anticorps concernant d'autres pathologies, et se considère comme un pionnier dans ce domaine thérapeutique. Le laboratoire américain s'est également associé à la biotech Zebra pour développer des thérapies basées sur les anticorps.

Si Amgen obtient in fine gain de cause contre Sanofi et Regeneron, il pourrait opter pour une solution alternative et obtenir des royalties issues des ventes du Praluent. Un choix effectué d'ailleurs par BMS qui recevra 625 millions de dollars et des royalties pour 6,5% du chiffre d'affaires de l'anticancéreux Keytruda de Merck & Co d'ici à 2023..

Jean-Yves Paillé

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Commentaire 1
à écrit le 05/04/2017 à 8:08
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"Amgen accuse Sanofi et Regeneron d'enfreindre le brevet du Repatha, un anticholestérol. Eli Lilly et Pfizer ont pris position pour le géant pharmaceutique." Il faut lire tout l'article pour comprendre la 1ere phrase. C'est qui le geant pharmaceut...

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