Sanofi accumule les déboires entre procédures en justice et projets abandonnés

Alors que le groupe pharmaceutique français doit faire face à des poursuites judiciaires aux Etats-Unis visant le Zantac, accusé de comporter une substance classée comme cancérogène probable, Sanofi a annoncé, mercredi dernier, l'arrêt du développement de l'amcenestrant, traitement oral de certains cancers du sein qui présentait un fort potentiel commercial. Mais même si ces échecs pèsent sur le cours de l'action de son titre, le groupe veut toutefois rester optimiste au regard des performances de certains de ses médicaments et de ses futurs projets.
Plus de 2.000 plaintes visant le Zantac de Sanofi ont été déposées aux Etats-Unis avec un premier procès prévu pour le 22 août, suivi par une procédure collective en septembre.
Plus de 2.000 plaintes visant le Zantac de Sanofi ont été déposées aux Etats-Unis avec un premier procès prévu pour le 22 août, suivi par une procédure collective en septembre. (Crédits : BENOIT TESSIER)

Les difficultés s'accumulent chez Sanofi. Dernière désillusion en date pour le groupe français, l'arrêt, mercredi dernier, du programme de développement clinique de l'amcenestrant, traitement oral de certains cancers du sein qui présentait un fort potentiel commercial. Le laboratoire n'a, en effet, pas atteint les résultats escomptés dans un essai clinique au cours duquel il était utilisé comme adjuvant, selon une analyse préliminaire. « Un comité indépendant de suivi des données a constaté que, comparativement au groupe témoin, l'amcenestrant en association avec du palbociclib n'avait pas atteint le seuil pré-spécifié justifiant la poursuite du traitement et a donc recommandé l'arrêt de l'essai », a précisé le groupe pharmaceutique dans son communiqué, ajoutant que « toutes les autres études consacrées à l'amcenestrant, en particulier dans le traitement du cancer du sein au stade précoce », seront arrêtées ajoute Sanofi.

2.000 plaintes contre le Zantac déposées aux Etats-Unis

Une décision qui a aggravé les pertes causées quelques jours auparavant par la perspective de poursuites judiciaires visant le Zantac aux États-Unis. Un rapport des autorités de santé canadienne et américaine avait établi en 2019 que certains médicaments contenant de la ranitidine, dont le Zantac, pourraient comporter de faibles concentrations de NDMA, substance classée comme cancérogène probable par l'Organisation mondiale de la Santé, ce qui avait entraîné le rappel du produit aux Etats-Unis et au Canada.

Plus de 2.000 plaintes visant le Zantac ont été déposées aux Etats-Unis avec un premier procès prévu pour le 22 août, suivi par une procédure collective en septembre. « Nous ne pensons pas que les éléments disponibles en fassent un nouveau glyphosate mais il est très possible que l'on arrive à des indemnisations qui se chiffreraient en milliards de dollars », selon des analystes de Deutsche Bank dans une note sur GSK et Sanofi, en référence au scandale sur l'herbicide à base de glyphosate de Monsanto, détenu par Bayer. En effet, d'autres laboratoires, dont GSK et Novartis, ont rappelé ou interrompu dans la foulée la distribution de leurs versions du médicament.

GSK et Sanofi ont toutefois réaffirmé « la sécurité de ce médicament », selon les propos du groupe pharmaceutique français. « GSK, des chercheurs indépendants sur le cancer », mais aussi les autorités américaine et européenne des médicaments se sont penchés sur la question depuis 2019 et « ont tous conclu qu'il n'y a aucune preuve d'un lien de causalité » entre ranitidine et cancer, a, pour sa part, assuré GSK dans un communiqué.

Optimisme affiché

Une défense qui n'a pas empêché le cours de l'action de Sanofi de chuter de 14% depuis le 10 août, au grand dam de son directeur général, Paul Hudson, chargé justement de le relancer et de simplifier les activités du groupe pharmaceutique en les recentrant sur les vaccins, l'immunologie, les maladies rares et l'oncologie. Ces déboires renforcent donc la pression sur celui qui entamera le mois prochain sa quatrième année à la tête de l'entreprise. Car si le titre Sanofi a grimpé de 5% depuis le début de son mandat, il sous-performe l'indice sectoriel européen de la santé, sur fond d'inquiétudes face à l'amenuisement de son portefeuille de médicaments potentiellement porteurs.

Jean-Baptiste de Chatillon, directeur financier de Sanofi, qui emploie 100.000 personnes dans le monde dont 25.000 en France, veut toutefois croire en un futur rebond de l'action en raison de « l'incroyable déconnexion entre les fondamentaux de l'entreprise et sa valorisation », comme il l'a expliqué mercredi dernier à Reuters. Il a notamment cité les candidats-médicaments toujours en cours de développement ainsi que les solides performances financières du Dupixent, le traitement phare de Sanofi de l'eczéma et de l'asthme. Les résultats financiers de Sanofi ont, en effet, été stimulés par ce médicament, dont les ventes ont augmenté de plus de 40% au cours du premier semestre. Pour 2022, le groupe anticipe un chiffre d'affaires du Dupixant pouvant atteindre 13 milliards d'euros. « La croissance sera à nouveau alimentée par des actifs très solides à venir », a assuré Jean-Baptiste de Chatillon, évoquant un projet de médicament contre l'hémophilie et un nouveau traitement potentiel pour les infections respiratoires infantiles.

Mais pour Markus Manns, gestionnaire de portefeuille chez Union Investment, basé en Allemagne, et qui détient des titres Sanofi, cet optimisme apparaît déplacé après l'échec de l'amcenestrant. « C'est un énorme revers et le portefeuille restant est très mince par rapport à des entreprises comme Roche ROG.S ou AstraZeneca AZN.L. C'est malheureux si Sanofi n'accepte pas cela », a-t-il déclaré. Selon lui, le Dupixent permet à Sanofi de gagner du temps, ses brevets clés ne devant probablement pas expirer avant 2032.

Intensifier les efforts

D'autant que le Français, plus que jamais sous pression pour relancer son portefeuille de médicaments, a essuyé de sérieux revers majeurs dans la course au vaccin contre le COVID-19, au profit de ceux de ses concurrents, le BioNTech-Pfizer et le Moderna. Suite à cette déroute, le gouvernement français avait d'ailleurs annoncé « un plan massif de réinvestissement de Sanofi en France, parce qu'il faut repartir de l'avant ». Sans oublier la découverte de plusieurs cas de lésions du foie ayant conduit cette année à l'arrêt du recrutement pour les essais cliniques du tolébrutinib, un traitement expérimental de certaines formes de sclérose en plaques et de la myasthénie grave.

Lire aussiSanofi : l'échec du vaccin anti-Covid n'a assombri ni ses résultats, ni son dividende

Malgré l'arrêt de deux des projets de développement les plus importants de la société, Markus Manns, de Union Investment, estime que des signaux de la direction quant à une intensification des efforts ou à des accords visant à améliorer les perspectives côté médicaments auraient été accueillis favorablement. De leurs côtés, les analystes de SVB Securities, qui ont abaissé leur objectif de cours sur Sanofi mais maintenu leur recommandation à « surperformance », voient ce double coup dur comme « négatif pour le sentiment sur la productivité de la (recherche et du développement) de l'entreprise et pour les perspectives de croissance du chiffre d'affaires ».

(Avec agences)

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Commentaire 1
à écrit le 23/08/2022 à 9:03
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Mais, ne craignez rien, le grand patron de SANOFI se fera quand même attribuer 30 % au moins d'augmentation de salaire et des bonus et autres stock-options dépassant le budget de recherche de "sa" boîte.

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