Coup de frein sur la demande d'électricité dans le monde. Selon les dernières prévisions de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la demande mondiale d'électricité devrait seulement augmenter de 2,4% en 2022. C'est moins que les 3% de croissance sur lesquels l'agence tablait en début d'année. Surtout, ce chiffre rompt avec la hausse de la demande de 6% de 2021, alors tirée par la reprise économique post-Covid.
Ce fléchissement de la demande résulte du ralentissement économique mondial, de l'accentuation de la flambée des prix de l'énergie depuis l'invasion russe de l'Ukraine et des nouvelles restrictions sanitaires mises en place en Chine, explique le rapport. La courbe de la demande d'électricité renoue ainsi avec le rythme de croissance annuel moyen observé sur la période 2015-2019 et un rythme similaire devrait s'observer en 2023.
Record pour la production d'énergies renouvelables...
En parallèle, les capacités de production d'énergies renouvelables devraient augmenter de 10% en 2022. C'est la croissance la plus élevée jamais enregistrée, souligne le rapport de l'AIE. Cette hausse devrait ainsi porter la part des énergies renouvelables à 30% du mix électrique mondial, contre 28% en 2021.
Conséquence de ces deux mouvements opposés (baisse de la demande d'électricité vs hausse des capacités de production renouvelables), le recours aux combustibles fossiles pour la production d'électricité devrait reculer de 1% en 2022. Résultat : l'AIE anticipe une très légère baisse des émissions de dioxyde de carbone (CO2) liées à la production d'électricité de 0,3% en 2022, puis de 1% en 2023, après avoir atteint un record en 2021. Le secteur devrait ainsi émettre cette année 13.091 millions de tonnes équivalent CO2.
Cette bonne nouvelle pour le climat ne s'applique toutefois pas à l'échelle européenne, région pour laquelle l'AIE prévoit, au contraire, une hausse de 3% des émissions de CO2 ainsi qu'une hausse de 2% de l'intensité des émissions de la production électrique.
« Malgré la croissance des énergies renouvelables, l'utilisation du charbon augmente afin de réduire la consommation de gaz et de compenser la baisse de la production nucléaire », observent les auteurs du rapport.
...mais en Europe, le charbon joue les prolongations
Les Européens craignent, en effet, une pénurie de gaz l'hiver prochain, alors que la Russie baisse progressivement ses livraisons vers les Vingt-Sept dans un contexte de fortes tensions entre les pays occidentaux et le régime de Vladimir Poutine, qui a envahi l'Ukraine le 24 février dernier.
Pour y faire face, de nombreux gouvernements ont annoncé qu'ils allaient recourir davantage aux centrales à charbon pour produire de l'électricité, au détriment des centrales à gaz. L'objectif est d'économiser du gaz pour ses autres usages que sont : le chauffage, l'eau sanitaire et son utilisation industrielle.
Dans le détail, l'Allemagne a décidé de garder en activité près de 14 gigawatts de centrales à charbon qui devaient fermer dès cette année. Les Pays-Bas ont, eux, donné leur aval pour un fonctionnement à plein régime des centrales utilisant cette roche noire, alors qu'elles étaient jusqu'à présent limitées à 35% de leurs capacités. La France et l'Autriche prévoient respectivement de rouvrir sur leur territoire une centrale à charbon, récemment mise en sommeil, tandis que l'Italie se prépare à autoriser une demi-douzaine de centrales à augmenter leur production. La Grèce, enfin, a prolongé l'exploitation de son parc de centrales au charbon jusqu'à 2028, contre 2023.
La tendance s'inversera en 2023
Or, la production électrique au charbon est plus émettrice de gaz à effet de serre que celle à partir du gaz. Pour rappel, une centrale à charbon émet environ 1kg équivalent de CO2 par kilowattheure produit, contre un peu plus de 440 grammes pour une centrale thermique fonctionnant au gaz naturel.
Dès 2023, cette tendance à la hausse en Europe devrait toutefois s'inverser. L'AIE prévoit, en effet, une baisse de 8% des émissions de CO2 liées à la production électrique sur le Vieux Continent grâce à la forte croissance des énergies renouvelables. Leur développement doit être largement dopé par le plan RepowerEU présenté par Bruxelles au printemps dernier.
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