Concurrence des réseaux de bus : Optile dénonce un avis du Conseil d’Etat

L’organisation professionnelle qui rassemble l’ensemble des opérateurs privés de transport routier de voyageurs en Île-de-France (dont Transdev) conteste une mise en concurrence anticipée des réseaux de bus franciliens, qui avantagerait la RATP.
Mounia Van de Casteele
De deux choses l'une : soit il faut conserver la date initiale de 2024 pour acter la mise en concurrence des opérateurs, soit il faut pouvoir empêcher la RATP de participer aux appels d'offres d'après l'administrateur général d'Optile.

La concurrence oui, mais pas à n'importe quel prix. Tel est, en substance, le message porté par Jean-Sébastien Barrault, administrateur général d'Optile. Celui-ci s'étonne ainsi d'un avis du Conseil d'Etat du 29 novembre 2016, selon lequel les transporteurs et le Stif (syndicat des transports d'Ile-de-France) seraient d'accord sur le principe d'une mise en concurrence anticipée, au terme de leurs contrats qui s'achèveront fin 2020.

Si tel était le cas, le réseau de bus Optile (qui fédère 90 opérateurs privés) pourrait être ouvert à la concurrence, alors que le monopole de la RATP serait protégé jusqu'en 2024. Cela n'est pas sans poser un souci de taille aux yeux de Jean-Sébastien Barrault. Celui-ci évoque ainsi "une injustice pour Optile vis-à-vis de la RATP". La députée LR Valérie Lacroute, accessoirement ancienne secrétaire générale d'Optile, comme le rappelle Mobilettre, faisait elle aussi remarquer ce déséquilibre au mois de décembre 2016 :

"Le comble est que la RATP pourrait aussi répondre aux appels d'offres sur le périmètre des entreprises d'Optile, sans que son propre réseau soit soumis à la concurrence. Il me paraît donc sage, madame la ministre, de confirmer l'ouverture à la concurrence à une date unique, commune à tous les opérateurs d'Île-de-France, en l'occurrence le 31 décembre 2024, date fixée par la loi."

Empêcher la RATP d'être candidate aux appels d'offre

Par conséquent, il faudrait, pour éviter toute distorsion de concurrence, empêcher la RATP et sa filiale RATP Dev de répondre à des mises en concurrence en 2020. "Pour les entreprises d'Optile c'est une condition absolument essentielle", argue Jean-Sébastien Barrault. "Mais dans quelle mesure est-ce possible ?", interroge-t-il. Selon la revue spécialisée Mobilettre, le Stif pourrait tout à fait décider d'exclure de la participation aux appels d'offres un opérateur dont plus de la moitié des lignes ont été attribuées sans mise en concurrence", conformément à l'article 8 du règlement (CE) n° 1370/2007 du Parlement européen et du conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route.

Conserver la date de 2024

Cela dit, Jean-Sébastien Barrault estime le plus sage serait encore de conserver la date de 2024 initialement prévue par la loi ORTF du 8 décembre 2009. Sans quoi cela risquerait en effet d'engendrer une certaine précipitation, néfaste pour les entreprises, met en garde le président d'Optile, dans une lettre envoyée au Secrétaire d'Etat aux Transports:

"Nombre de nos membres sont des entreprises familiales franciliennes de transport exploitant un ou deux réseaux de bassin. Dès lors, une mise en concurrence anticipée de trois ans de leurs marchés vitaux - sans qu'elles n'aient pu comme elles le prévoyaient s'y préparer grâce à des investissements gradués dans le temps - pourrait tout simplement constituer leur mise à mort".

D'autant que le Stif trouve lui aussi le délai trop court, alors que sa présidente veut dans le même temps mettre en œuvre son projet de "Grand Paris des bus", destiné à améliorer les réseaux de bus franciliens et à mettre en circulation 1.000 nouveaux bus d'ici à 2020. Valérie Pécresse assurait ainsi récemment:

"Objectivement, nous ne sommes pas en mesure d'engager la mise en concurrence avant 2020 vraisemblablement"

"Surtout dans la perspective des Jeux Olympiques de 2024, mieux vaudrait-il avoir des transports efficients", poursuit Jean-Sébastien Barrault, évoquant le risque d'une déstabilisation du réseau au détriment des usagers. "Notre volonté c'est une mise en concurrence en 2024", insiste-t-il. "C'est ce que prévoit la loi, et contrairement à ce que certains ont pu dire, l'avis du Conseil d'Etat n'a pas force de loi".

C'est pourquoi il entend attirer l'attention des candidats à la présidentielle sur ce point, "afin de pérenniser la date de 2024". En revanche, si son message n'est pas entendu, il ne s'interdit pas d'utiliser tous les moyens à sa disposition, comme la saisine de la Cour de justice de l'Union européenne. Et de prévenir : "si la concurrence est actée pour 2021, nous allons vers de lourds contentieux". Aux grands maux, les grands remèdes.

Mounia Van de Casteele

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