Dénouement imminent pour la reprise d'Air Austral

L'idylle voulue par Bercy entre Corsair et Air Austral n'aura pas lieu. Cette dernière devrait rester dans le giron réunionnais avec la validation d'un plan de reprise par des investisseurs locaux soutenu par la région. En dépit de difficultés à le mettre en place, ce plan est désormais en phase finale. Mais il doit encore passer sous les fourches caudines de la Commission européenne, faisant de Bruxelles le juge de paix dans ce dossier.
Léo Barnier
Air Austral devrait rester pleinement réunionnaise après l'échec du mariage avec Corsair.

C'est un long feuilleton qui va prendre fin dans les prochaines semaines : celui de la reprise d'Air Austral. Sauf retournement de situation, c'est la solution locale portée par un consortium d'investisseurs réunionnais ainsi que les collectivités locales qui va l'emporter. Selon nos informations, confirmées par la compagnie, le projet a fini par être validé par Bercy en août et est sur le point d'être notifié à la Commission européenne. S'il était confirmé par Bruxelles, cela sonnerait définitivement le glas du projet de mariage entre Air Austral et Corsair, longtemps poussé par l'État mais refusé par la région Réunion, propriétaire d'Air Austral via la société d'économie mixte Sematra. Tous les espoirs de coopération entre les deux compagnies ne sont pas enterrés pour autant.

Le projet de reprise local est donc dans sa phase finale. Après avoir mis du temps à se constituer avec, a priori, une première version déboutée, il a fini par obtenir l'approbation du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI, service de l'État à la manœuvre dans ce dossier, comme dans ceux des aides aux compagnies aériennes). Seul un refus de Bruxelles semble encore pouvoir le faire dérailler.

55 millions sur la table, la région remet au pot

Le dossier s'articule autour d'une offre ferme d'un montant de 55 millions d'euros. Sur ce total, 30 millions d'euros seront apportés par le consortium d'investisseurs réunionnais rassemblé autour de Michel Deleflie, PDG du groupe Clinifutur. Il deviendrait ainsi actionnaire majoritaire avec 55 % du capital d'Air Austral.

Au vu du besoin de la compagnie de disposer d'une recapitalisation conséquente, la Sematra remettra également au pot avec un apport validé de 25 millions d'euros. Celui-ci se compose d'une participation de la part de la région Réunion à hauteur de 15 millions d'euros, du département Réunion pour 5 millions d'euros et de la Chambre de commerce et d'industrie de la Réunion (CCIR) pour 5 millions d'euros également.

En contrepartie, l'Etat pourrait effacer une partie de la dette de 220 millions d'euros d'Air Austral. Selon un connaisseur du dossier, cela pourrait aller jusqu'à 75 ou 80 % de ce total. La compagnie indique pour sa part que ces données sont à confidentielles à ce stade, mais confirme qu'une restructuration de la dette a été négociée sous l'égide du CIRI. Selon ses termes, un accord acceptable a été trouvé entre la Sematra, le consortium d'investisseurs et les créanciers.

Dénouement attendu début octobre

La notification à la Commission européenne devrait intervenir dans les prochains jours. Elle devrait étudier les différents éléments du dossier tels que la crédibilité à long terme du plan de redressement, le montant apporté par les investisseurs, l'effacement de la dette par l'Etat, l'équilibre entre ces deux sommes...

D'après les précisions d'Air Austral, Bruxelles a réglementairement entre 20 jours et deux mois pour rendre sa décision. La compagnie l'espère dans la première quinzaine d'octobre. De leur côté, les investisseurs réunionnais avaient posé une date limite au 30 septembre, mais selon un délégué syndical, il y a peu de chance que l'offre soit retirée si elle venait à être dépassée.

De futurs actionnaires exigeants

Outre ce calendrier, le consortium a posé d'autres exigences. L'une d'elles porte sur des efforts à faire de la part des personnels d'Air Austral afin de réduire la masse salariale entre 16 et 17 % du chiffre d'affaires, soit l'équivalent d'une compagnie low cost. Un effort jugé trop conséquent par un représentant des salariés, qui rappelle qu'une rupture conventionnelle collective et un accord de performance collectif ont déjà été signés pour faire face à la crise du Covid.

De son côté, la compagnie indique qu'au vu des mesures prises pendant la crise, elle doit d'abord faire le point sur ses besoins de remplacement des effectifs et de procéder aux équilibrages nécessaires. En fonction des sources, ce ratio masse salariale/chiffre d'affaires varie aujourd'hui entre 18 % - ce qui placerait déjà Air Austral a un niveau très compétitif - et 24 %. Avant crise, en 2018, il se situait autour de 21 %.

Des discussions ont été engagées avec les représentants du personnel et ont, semble-t-il, permis de pondérer quelque peu cette exigence. Les syndicats ont fait valoir qu'une amélioration de la productivité et donc du chiffre d'affaires était possible pour réduire ce ratio. Les discussions se poursuivent et les différents leviers sont en cours d'identification.

Une autre exigence posée par les futurs investisseurs est le lancement d'une réflexion sur le renouvellement de la flotte. Un bon connaisseur de la compagnie estime que celle-ci est peu contraignante, des travaux ayant déjà été engagés conformément aux habitudes de la compagnie qui fait évoluer son parc aérien tous les 7 ou 8 ans. Les avions devaient ainsi être changés aux alentours de 2024, mais cet objectif a été repoussé à 2026 du fait de la crise sanitaire.

Tous ces sujets devront de toute façon être adressés par la prochaine équipe dirigeante d'Air Austral, nommée par les futurs actionnaires quels qu'ils soient. Depuis le départ de son PDG Marie-Joseph Malé en juin dernier, après dix ans passés à la tête de la compagnie, celle-ci est actuellement dirigée par intérim par Joseph Brema, jusque-là directeur financier. Selon les mots mêmes de Marie-Joseph Malé, cette période de transition doit permettre l'arrivée de la future équipe de direction.

Léo Barnier

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Commentaires 3
à écrit le 12/09/2022 à 17:47
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Une compagnie financée par des fonds publics et dirigée par des bras cassés ! Un gouffre sans fin pour le contribuable Réunionnais. Que l'on arrête d'interdire la desserte de la Réunion par les compagnies low coast étrangères ! Tout cela pou...

à écrit le 12/09/2022 à 17:46
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Une compagnie financée par des fonds publics et dirigée par des bras cassés ! Un gouffre sans fin pour le contribuable Réunionnais. Que l'on arrête d'interdire la desserte de la Réunion par les compagnies low coast étrangères ! Tout cela pou...

le 13/09/2022 à 14:12
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Huguette fait tout pour sauver cette compagnie et Macron l'a écoute

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