Pour l'instant, tout le monde est dans son rôle dans le débat sur la restitution des créneaux horaires de décollage à Orly qu'Air France que devrait respecter en contrepartie d'un feu vert à sa recapitalisation par l'Etat français. La direction s'étrangle, les syndicats s'indignent, certains observateurs (parfois très proches de ces derniers) crient au scandale et le ministre des transports Jean-Baptiste Djebbari s'y oppose. De l'autre, Ryanair met la pression sur Bruxelles en lui demandant dans un communiqué diffusé ce mercredi de rester ferme afin "de garantir une concurrence loyale sur le marché français et de protéger les intérêts des consommateurs français".
Ryanair candidate pour Orly
La compagnie low-cost irlandaise se dite en capacité d'assurer tout ou partie des créneaux horaires que devraient restituer Air France à Orly, et évoque aussi Roissy et Lyon où la situation est différente puisque, contrairement à Orly, la pénurie de créneaux s'observe dans les plages de hub d'Air France.
"L'UE doit mettre fin à ce flot de renflouements discriminatoires à coups de milliards d'euros à des compagnies aériennes inefficaces qui faussent le marché unique européen et déprécient la concurrence juste et loyale.La commissaire Vestager se doit de rester ferme dans ses discussions avec le gouvernement français. Soit Air France n'obtient aucune aide d'État, soit des recours appropriés devront être mis en place pour garantir des conditions de concurrence justes et équitables pour toutes les compagnies aériennes. Cela implique l'abandon par Air France de créneaux dans des aéroports français clefs. Les 24 créneaux horaires de Paris Orly mentionnés dans certains articles de presse ne suffisent pas, la Commission doit aller plus loin.
Depuis le début de la crise, Ryanair tire à boulets rouges sur les aides d'Etat reçues par les grandes compagnies comme Air France ou Lufthansa. En juin dernier, Edward Wilson, le directeur général de Ryanair avait déclaré dans nos colonnes :
"Les difficultés sont vraiment dues au fait que nous sommes en concurrence avec d'anciennes compagnies nationales qui ont obtenu d'importantes aides financières de leur État. Cet argent sera utilisé pour lutter contre les compagnies à bas coûts. Ce qui signifie que les compagnies aériennes qui dépendent de leurs propres ressources comme Ryanair sont désavantagées. C'est un vrai problème pour l'Europe. Que des compagnies aériennes bénéficient d'un traitement spécial va à l'encontre des principes de l'Union européenne. Nous ne voulons pas d'aides".
Alors que les syndicats d'Air France ne cessent de dénoncer son modèle basé sur des subventions dans les régions, il avait répondu :
"C'est complètement différent. Pour lancer des routes européennes, les régions françaises ne décident pas d'accorder des "incentives" pour nous faire plaisir, mais parce qu'il y a un retour sur investissement. Il y a un sens pour les régions d'investir pour faire venir des passagers qui dépensent de l'argent sur leur territoire. Chaque passager de Ryanair ou d'une autre compagnie dépense en moyenne plus de 700 euros dans l'économie locale. C'est une forme de décision commerciale. C'est totalement légitime. Avec ses prix exceptionnellement bas, Ryanair peut faire venir des passagers dans les régions. Les autres compagnies peuvent le faire également car les "incentives" des régions ne sont pas proposés à Ryanair seulement, mais à tout le monde. La difficulté pour les autres compagnies, c'est qu'elles ne peuvent pas -ou ne veulent pas- voler vers des petites villes comme Béziers ou Carcassonne, car leur structure de coûts élevée ne leur permet pas de proposer des bas tarifs. C'est un cercle vertueux : la compagnie est performante et a des coûts bas, lesquels permettent de proposer des bas tarifs et de faire venir des touristes dans des régions, lesquelles nouent des partenariats avec des compagnies comme Ryanair ou d'autres comme Easyjet. Comparé à l'aide reçue par Air France, cela a du sens. Air France, dit à l'État : "On perd de l'argent. Donnez-nous-en s'il vous plaît !" Le secteur du voyage aérien n'est pas systémique. Il survit à la faillite d'une compagnie. Les passagers se moquent d'utiliser ou pas une compagnie nationale. Pourquoi le contribuable doit-il payer pour les maintenir" ?
Sujets les + commentés