Transport aérien : septembre sera décisif dans la lutte contre le CO2

Si l’aviation n'était pas à l'ordre du jour de la COP21, la prochaine assemblée générale de l’OACI qui se tiendra en septembre étudiera en revanche la mise en place d’un système de compensation des émissions de CO2 du transport aérien. À défaut d’accord, les compagnies aériennes risquent de se voir imposer de nouvelles taxes, notamment en Europe. Ce fut l’un des thèmes du Paris Air Forum (organisé par La Tribune le 21 juin), sur lequel ont débattu Michel Wachenheim, conseiller spécial du PDG d’Airbus et Michael Gill, directeur exécutif de l’ATAG, (Action Transport Air Group).
Michel Wachenheim (à gauche), conseiller auprès du PDG d'Airbus et ancien ambassadeur de la France à l'OACI, et Michael Gill, directeur exécutif de l'ATAG (Action Transport Air Group), débattent lors de la 3e édition du Paris Air Forum, organisé par La Tribune le 21 juin.

Le trafic aérien double tous les quinze ans. De quoi illustrer l'enjeu pour le secteur aérien de réduire ses émissions de dioxyde de carbone qui participent aujourd'hui à hauteur d'environ 2% aux émissions de CO2 mondiales.

Le cas spécifique de l'aviation

L'aviation n'a pourtant pas été concernée par la COP21. Pour Michel Wachenheim, conseiller auprès du PDG d'Airbus et ancien ambassadeur de la France à l'OACI, et Michael Gill, directeur exécutif de l'ATAG (Action Transport Air Group), c'est légitime.

«Dès le protocole de Kyoto, il y avait un sort particulier réservé à l'aviation et au maritime. Il s'agit d'une activité internationale et la distribution des émissions de ces activités internationales entre les différents États est extrêmement compliquée », insiste Michel Wachenheim.

Même écho du côté de Michael Gill :

« L'approche de la Cop ne convient pas au secteur de l'aviation où il est impossible d'attribuer des émissions émanant de l'aviation à un seul pays ».

A charge pour l'OACI (Organisation internationale de l'aviation civile) de faire des propositions en matière environnementale. Des engagements ont par ailleurs été pris par différentes structures du secteur depuis plusieurs années.

À court terme, il s'agit d'améliorer l'efficience carburant de 1,5% par an jusqu'à 2020. Puis, à partir de 2020, stabiliser les émissions de CO2 avant de les diviser par deux en 2050 comparé à leur niveau de 2005.

Le premier objectif semble pour l'heure tenu :

« Depuis 2009, on a réussi à obtenir un taux d'amélioration de 13% », précise Michael Gill.

De bons résultats qu'il impute à une stratégie basée sur les nouvelles technologies, la gestion de l'espace aérien et la mise en place de mesures technologiques et économiques.

Les biocarburants bloqués dans un cercle vicieux

Les progrès technologiques en matière de diminution de consommation de carburant des appareils sont aussi un fait : chaque nouvel avion présente des améliorations de consommation de l'ordre de 20% à 25%, d'après Michel Wachenheim. Mais pour abaisser les émissions des avions existants, les biocarburants restent une piste majeure. Problème, les carburants alternatifs sont pris dans un cercle vicieux.

« Le prix est trop élevé, donc les transporteurs n'en achètent pas. Il n'y a pas assez de demandes, donc il n'y a pas de production, donc le prix reste trop élevé... ».

Comment en sortir ? Le problème n'est plus nécessairement technique.

«Il y a eu plus de 2.000 vols commerciaux jusqu'aujourd'hui et on espère que d'ici à la fin d'ici 2016, on aura plus de 5.000 vols commerciaux utilisant ce type de carburant », souligne Michael Gill. Pour Michel Wachenheim, la question des biocarburants est aussi celle de la volonté des États.

«Aux États-Unis, il y a une politique définie, avec des objectifs de production. Il y a une diminution à attendre des biocarburants, et ce serait dommage que l'Europe prenne du retard», s'inquiète-t-il. En tous les cas, il devient compliqué de contenir les émissions de carbone sans un recours plus significatif aux biocarburants.

Des mesures fondées sur le marché

« Il faut continuer à investir dans d'autres technologies, les appareils d'avenir, mais la solution pour réduire notre impact CO2 existe aujourd'hui : ce sont des carburants alternatifs. C'est là qu'on peut vraiment changer les règles du jeu », estime le président de l'ATAG.

En attendant, les regards se tournent vers un mécanisme mondial de mesures fondées sur le marché (MBM, en anglais : "Market Based Measures") qui permettrait aux compagnies aériennes de racheter leurs crédits carbone dans d'autres secteurs pour compenser leurs émissions supérieures à l'objectif de 2020. Un sujet qui incombe à l'OACI, chargée d'obtenir un accord de tous ses États membres... qui ne sont pas nécessairement sur la même longueur d'onde quant aux modalités. Le rendez-vous est donné à la prochaine assemblée, prévue pour septembre.

À défaut d'accord, une taxation lourde est à craindre, notamment en Europe où le système d'échanges de permis d'émissions (ETS) avait été suspendu, le temps que soit trouvée une solution à l'OACI.

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