Faire de l'agriculture et de l'alimentation durables l'un des chantiers prioritaires du mandat, c'est l'engagement que Rennes Métropole, présidée par la maire PS de Rennes, Nathalie Appéré, entend tenir. L'agglomération a comme ambition de devenir un territoire « zéro pesticide de synthèse » d'ici à 2030, de diminuer de 15% les émissions de gaz à effet de serre issues de l'activité agricole et d'atteindre la moitié de la surface agricole utile en bio. Déjà annoncée depuis juillet 2020, cette stratégie co-construite avec les citoyens et les partenaires territoriaux, a été approuvée le 28 avril par le Conseil métropolitain. La présentation du programme d'actions pluriannuel est fixée à 2023.
Peser sur la production et sur la consommation
« Permettre à tous d'avoir accès à une alimentation durable et de qualité est un enjeu majeur, sur les plans sociaux, environnementaux et en matière de santé », avance Yannick Nadesan, conseiller métropolitain, délégué à l'agriculture et à l'alimentation.
« Il n'y avait pas de politique allant dans ce sens jusqu'ici », explique-t-il. Aménagée en ville archipel, Rennes Métropole est un territoire agricole de 43 communes composé à 78% de terres agricoles et d'espaces naturels et à 55% de surface agricole utile. 718 fermes exploitent 38.800 hectares, dont 17% en agriculture biologique. La filière agricole et le secteur de l'agro-alimentaire génèrent 28.000 emplois, énumère le conseiller. « Nous comptons nous appuyer sur cet écosystème dynamique et innovant pour développer et accompagner une agriculture respectueuse des sols, des ressources et de la biodiversité, et continuer de créer des emplois. »
30.000 emplois sous cinq ans
Rennes Métropole prévoit en effet d'atteindre 30.000 emplois dans toute la filière sous cinq ans. La stratégie de la collectivité s'appuie sur le Projet alimentaire territorial (PAT), dont la deuxième phase a été présentée le 28 avril. Reconnu par l'État en juin 2021 dans le cadre du Plan de relance, ce PAT, qui a déjà reçu 486.000 euros de subventions, aborde de façon globale la question des transitions agricoles et alimentaires pour peser à la fois sur la production et sur la consommation.
Le PAT vise à accompagner l'évolution des pratiques agricoles tout en garantissant des débouchés économiques aux exploitations engagées. Une majorité de produits bio et locaux sera à terme proposée dans toutes les restaurations publiques municipales.
100% du patrimoine foncier de Rennes Métropole en bio
Rennes Métropole se donne cinq ans pour atteindre les 17 objectifs fixés, dont les plus notables sont le passage de 100% du patrimoine foncier de Rennes Métropole en bio et le doublement à 600 hectares du foncier agricole de la collectivité pour permettre l'installation-acquisition en agriculture durable.
La Métropole, qui aidera aussi les porteurs de projets pourvoyeurs d'emplois, vient de lancer un appel à manifestation d'intérêt pour trouver des candidats en maraîchage et petites cultures pour sa ferme de Mérol (31 hectares), en conversion bio depuis 2021. Alors que plus de quatre agriculteurs sur 10 ont plus de 55 ans, la question de la transmission des exploitations devient cruciale.
« Nous souhaitons amener 25% des agriculteurs à conduire un diagnostic afin de changer leurs pratiques, faire émerger une ou des plateformes logistiques axées sur la production locale durable et structurer de nouvelles filières locales, dont les dix filières du programme Terres de Sources, label de protection de l'eau » détaille Yannick Nadesan.
Le projet de Rennes Métropole s'adresse aussi aux consommateurs. Croisant l'ambition de la Région Bretagne, la collectivité entend « cultiver le bien manger » qui sera au cœur des réflexions autour de projets d'agriculture urbaine. Elle souhaite aussi encourager à « la transition des comportements alimentaires » vers moins de produits carnés et plus de légumineuses.
« Clivant et illusoire » fustige la FDSEA
Le projet de Rennes Métropole, qui assure avoir reçu 1.100 contributions écrites lors de sa consultation citoyenne et le concours des agriculteurs, ne fait pas l'unanimité. Dans une lettre ouverte, la FDSEA d'Ille-et-Vilaine a dénoncé, le 6 mai, un « projet clivant, illusoire et construit pour l'élite rennaise ».
Affirmant ne pas avoir été associé aux discussions, le syndicat fustige un dénigrement d'une partie des agriculteurs du territoire au profit de l'agriculture biologique. Le syndicat agricole marque son désaccord avec l'objectif d'interdire tous les produits phytosanitaires de synthèse en 2030, estimant que le passage à 50% de bio aura « des conséquences dévastatrices sur tous les élevages et notamment sur l'élevage bovin et laitier, encore majoritaire ».
La Fédération Départementale des Syndicats d'Exploitants Agricoles (FDSEA) estime aussi que « le marché des produits biologiques se situe autour des 10% » et qu'il est « en berne depuis quelques mois, sans doute en lien avec la crise du pouvoir d'achat ». Si le citoyen souhaite du bio, le consommateur n'est peut-être pas prêt à en payer le prix, 20 à 100% plus cher, avance le syndicat. « Les discussions se poursuivent » tempère Yannick Nadesan. « Notre porte d'entrée c'est quand même que l'agriculture reste un pilier fort du territoire rennais ».
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