Loi climat : le débat parlementaire s’annonce musclé

Examiné en commission spéciale à l’Assemblée nationale dès ce lundi, le projet de loi « climat et résilience » cristallise les tensions. Près de 5.000 amendements ont déjà été déposés, dont une partie a été déclarée irrecevable.
Marine Godelier

Il suscite des divergences jusque dans la majorité. Inspiré par les propositions des 150 citoyens tirés au sort en 2019, le projet de loi « climat et résilience », qui arrive ce lundi à l'Assemblée en commission spéciale, promet de vifs débats. Durant deux semaines, les soixante-dix députés qui la composent devront discuter du texte, avant un examen en plénière fin mars. Du bâtiment à la consommation, en passant par la mobilité, ils examineront les 69 mesures portées par le gouvernement, sur tous les domaines de la vie économique. Avec, en ligne de mire, la réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre en France d'ici à 2030 par rapport à 1990.

Un travail qui s'annonce fastidieux : près de 5000 amendements ont déjà été déposés, parmi lesquels plus de 1500 émanent de La République en Marche (LREM). Alors que les citoyens de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) ont noté à 2,5 sur 10 seulement la traduction de leurs propositions, les parlementaires de tous bords entendent se saisir du texte pour le faire évoluer. Le Haut Conseil pour le Climat les y a d'ailleurs appelés, par son avis publié le 23 février, dans lequel il dénonce un projet de loi trop flou et au périmètre limité.

Un texte qui « sonne creux »

De nombreuses mesures formulées par les 150 citoyens ont été tronquées, retardées, voire rejetées. Ainsi en est-il de l'interdiction de la publicité sur les produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre, cantonnée dans le projet de loi à celle sur les énergies fossiles. Ou encore de la baisse de la TVA sur les billets de train, que la CCC a conseillé à 10%, passée à 5,5% dans le texte soumis à l'Assemblée. Autre exemple : la mise en place d'un score carbone sur tous les produits de consommation et de service d'ici à 2024, désormais précédée d'une « phase d'expérimentation d'une durée maximum de cinq ans ».

Lire aussi : Loi climat et résilience : le gouvernement présente un texte déjà contesté par la société civile

Alors, à gauche comme à droite, les contestations vont bon train. Mathilde Panot (LFI) a ainsi glissé à l'AFP regretter que « les trois quarts des mesures » de la CCC aient « été abandonnées ou édulcorées ». Vent debout contre un texte qui « sonne creux », le socialiste Guillaume Garot a promis, lui, des « propositions concrètes », comme « l'interdiction de la publicité pour les produits les plus gras et les plus sucrés ». Chez LR, Damien Abad a affiché l'ambition de son parti de porter « une écologie de droite, davantage fondée sur les bonus que sur les malus ».

15 propositions des écologistes

Côté écologistes, la réaction ne s'est pas non plus fait attendre. Face à des propositions « totalement insuffisantes », une dizaine de députés et sénateurs de cette obédience ont réagi par la publication de quinze mesures alternatives. Constitués en coalition, ils ont ainsi vanté leur feuille de route pour une « vraie loi climat ». Fidèle au travail de la CCC, celle-ci devrait permettre de « diminuer de 55% les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030, pour s'aligner avec les objectifs européens récemment fixés en la matière », font-il valoir.

Au menu : l'obligation de rénovation énergétique globale et optimale dès 2024 de tous les logements au moment de la vente du bien, du renouvellement du bail pour les locations, ou des grands travaux pour les copropriétés. Ou encore l'instauration dès 2023 d'une redevance sur l'engrais azoté. Y figure également l'interdiction de la vente de tous les véhicules thermiques dès 2030, couplée d'un accompagnement des ménages pour les aider dans la transition.

Rejet des amendements

Mais un certain nombre de leurs amendements ont déjà été déclarés « irrecevables ». Jugés sans lien avec les mesures formulées dans le projet de loi, ils ne pourront faire l'objet d'un débat parlementaire. « Celui qui réclame la mise en place d'un droit au télétravail de deux jours par semaine, par exemple, a été rejeté. Il en va de même pour la demande d'adoption par la France de l'objectif européen de réduction de 55% des gaz à effet de serre en 2030, au lieu de 40. C'est aberrant », a fustigé la députée des Deux-Sèvres Delphine Batho (GE).

Pourtant, maintient le gouvernement malgré les discordes, « il n'y a aucune baisse d'ambition » face à l'urgence climatique. « L'esprit de la CCC, il est là », a assuré la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, qui défend des mesures « mieux acceptées » par les secteurs comme l'aérien, « sinistré » par la crise sanitaire. Et de s'appuyer sur une étude réalisée par le Boston Consulting Group, qui fait valoir que le potentiel de réduction visé par l'ensemble des mesures déjà prises et celles proposées dans le projet de loi est « globalement à la hauteur de l'objectif de 2030, sous réserve de leur exécution intégrale et volontariste ».

Lire aussiAffaire du siècle sur le climat : la justice reconnaît la faute de l'Etat français

Marine Godelier

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Commentaires 3
à écrit le 09/03/2021 à 12:34
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Le climat Européen se déplace vers l'émysphère Nord, c'est une tendance que l'on ne pourra pas contrer, car cela est naturel . De nouvelles terres vont être disponibles pour une future immigration Européenne , alors qu'elles étaient gelées en permane...

à écrit le 09/03/2021 à 11:26
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Article trompeur : il n'y a plus de débat parlementaire en France grâce à Macron. Les LREM/Modem voteront comme un seul homme sans avoir lu et étudié quoi que ce soit, en se moquant de l'opposition qui ne peut rien faire d'autre que s'opposer ... et ...

à écrit le 08/03/2021 à 18:59
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L'opposition ne peut pas laisser passer çà, sans perdre la face aux prochaines élections présidentielles! Sauf le RN qui a le beau rôle n'ayant pas de groupe parlementaire!

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