Une classe moyenne en gestation

Entre le Superama, le supermarché du quartier chic de Santa Fé, où l'on vend du foie gras et du thé bio, et les cantinas aux façades délavées du "pueblo de Santa Fe", il n'y a - quand les embouteillages le permettent - qu'une dizaine de minutes en voiture. Un monde, pourtant, sépare ces deux quartiers de Mexico. Dans un pays où les revenus des familles les plus pauvres sont 23 fois inférieurs à ceux des plus riches, les inégalités sociales sont criantes. Et le Mexique a beau se féliciter de compter parmi ses citoyens l'un des hommes les plus riches du monde, Carlos Slim, un quart de la population vit dans l'extrême pauvreté et 56 % connaît "l'insécurité alimentaire".Où est donc, dans ce paysage extrême, la classe moyenne, traditionnelle garante de la stabilité économique et politique d'un pays ? "Elle est en gestation", répond Pablo Cotler, professeur d'économie à l'université ibéro-américaine de Mexico. En effet, celle qui tentait d'exister dans le passé a été laminée par les crises économiques de 1976, 1982, 1987 et enfin de 1994, synonymes d'inflation élevée, de dévaluation et donc de perte de pouvoir d'achat. Ce n'est qu'au cours du dernier mandat présidentiel - et en l'absence de crise - que la classe moyenne a commencé à se rétablir. Mieux, certains éléments ont favorisé une nouvelle éclosion. "Certaines entreprises, nationales ou internationales, situées dans des villes à forte croissance, comme Mexico, mais aussi Oaxaca ou Veracruz, offrent désormais à une nouvelle génération de professionnels la possibilité de prospérer à mesure que leur carrière évolue positivement", souligne Alfonso Monreal.Nouvelle générationLe directeur de la communication de Renault Mexico fait partie de cette nouvelle génération, éduquée à l'étranger - venant de la classe moyenne, il a étudié, avec une bourse, aux États-Unis puis en France - et soucieuse de monter dans l'échelle sociale. "Qui dit mobilité sociale dit avant tout capacité à s'endetter et accès au crédit - en particulier pour l'achat immobilier", précise toutefois Pablo Cotler. Or la nouvelle concurrence entre banques a permis un début d'octroi de prêts immobiliers, mais aussi, dans une certaine mesure, en direction des PME, à taux raisonnables. Les moins bien lotis ont quant à eux pu profiter de la politique de logement social du gouvernement Fox. D'autres s'appuient sur la manne financière de l'immigration pour entrer dans la "classe moyenne basse". En espérant que tous atteignent un jour la classe moyenne tout court.Lysiane J. Baudu, envoyée spéciale au Mexique
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